Les beaux
jours du téléphone arabe, marque déposée de chez nous, ne sont plus qu'un vague
souvenir de notre passé exubérant de la communication. «Allo», a eu le dessus
sur «galou !» (Ils ont dits). Le téléphone sans fil
populaire est classé, aujourd'hui, au patrimoine immatériel au musée de la
rumeur chez les arabes. L'utilisation du téléphone arabe remonte à une époque
très lointaine, une époque de notre histoire où les ragots, la rumeur et les commérages
étaient diffusés et semés de bouche-à-oreille aux quatre vents du douar grâce à
ce moyen de communication qui fonctionnait à cette époque sans fil et sans
satellite. Admirez la prouesse ! La téléphonie mobile moderne d'aujourd'hui
fait désormais partie des mœurs et de la tradition, elle a relégué au placard
le téléphone arabe qui semble somnoler et ne plus communiquer selon les
«on-dit». Le bouche-à oreille arabe est devenu un sous-traitant des nouveaux
opérateurs. Les temps ne sont plus favorables à la tradition et l'utilisation
du répertoire de notre terroir est reléguée au passé. De la puce à l'oreille,
la rumeur court plus vite et sa vitesse a effacé un
patrimoine gardé jalousement par les arabes qui ont découvert le téléphone avec
la Wifi bien avant les occidentaux. Le téléphone arabe est une propriété
inaliénable des sociétés «arabes», il est breveté S.G.D.G. (Sans garantie du
gouvernement). Dans les temps présents, les nouvelles boutiques de téléphonie
poussent comme des champignons et restent le penchant professionnel favori des
jeunes qui aiment investir dans le métier très lucratif de la parlotte. Un
travail qui semble être très bien maîtrisé et encadré ici, chez nous, et qui a
beaucoup d'avenir dans le futur. Les gens aiment frimer en communiquant pour
rien, juste pour se dire uniquement «allo» et «kirakoum».
Cela fait
plus d'un siècle que le téléphone «made in arabe» fonctionne sans batterie ni
puce, il suffit tout simplement de colporter une nouvelle, bonne ou mauvaise,
dans un souk ou un café et dire «galou k'dha wa k'dha»
(on dit ceci et cela), pour la voir se propager partout sur le réseau national
ou international avec gratuité d'appels, de nuit et de jour. Le téléphone arabe
est une merveille et une trouvaille qui a révolutionné la communication et la
publicité dans notre continent sous le slogan de «diaaya»,
la rumeur. Qu'en reste-t-il aujourd'hui dans un monde ou l'homme de quelque
condition qu'il soit, est soumis à un véritable matraquage médiatique à travers
les médias, anciens et nouveaux, dont le plus spectaculaire demeure sans doute
le téléphone sans fil. Le seul inconvénient est que parler au téléphone coûte
cher, alors que le téléphone arabe permet des palabres interminables et
entièrement gratuites. N'a-t-on pas dit que les temps changent ? Assurément, du
moment où, avec le progrès, la parlotte est devenue payante (el-hadra bedraham). Allo, yaw kirakoum ?...