Si Marine Le Pen a annoncé qu'elle votait blanc, elle a,
par con-tre, laissé le libre arbitre à ses ouailles. Et pour un militant de
l'extrême droite quoi de plus naturel de voter à droite au lieu de faire le
grand écart. Et c'est cette non-option qui fait courir le candidat de la droite
à l'Elysée. Sarkozy, qui n'a eu de cesse de faire du pied au peuple lepéniste
pour le persuader d'adhérer à son programme électoral, clone celui de l'extrême
droite, en ce qui concerne plusieurs points. Les derniers sondages rendus
publics montrent que l'écart dans les intentions de vote s'est réduit entre les
deux candidats, ce qui rend davantage primordiales les voix du Front national.
Ce n'est plus un secret de polichinelle de dire que Sarkozy veut ses voix et à
n'importe quel prix, et c'est dans cette optique que la droite au pouvoir joue
sur la fibre sensible des adhérents et sympathisants du FN, en stigmatisant, à
tout va, l'immigration, source de tous les maux de la France depuis Waterloo.
Si la déclaration du ministre UMP de la Défense, Gérard Longuet, considérant
comme une «interlocutrice» possible la présidente du Front national, Marine Le
Pen, a été mollement dénoncée par son propre camp, il n'en demeure pas moins
que cette stratégie de rapprochement de l'extrême droite reste la dernière
cartouche de Sarkozy. Si, officiellement, il n'est pas question d'alliance
entre l'UMP et le FN, qui a recueilli 17,9% des voix au premier tour de la
présidentielle, son meilleur score sous la Ve République, il ne faut pas
l'oublier, la dernière sortie médiatique de Claude Guéant, le ministre de
l'Intérieur, a de quoi étonner. Hier, et à peine à quelques heures du débat
entre Sarkozy et Hollande, il a déclaré qu'il tablait sur l'expulsion de 40.000
étrangers en situation irrégulière en 2012, soit une augmentation d'environ 20%
par rapport à 2011. Et c'est sur ce dossier, fer de lance du FN, que repose la
manœuvre «récupératrice» de l'UMP qui met en avant ses statistiques dans la
chasse à l'étranger, supplée par les trop nombreux documentaires passés et
ressassés par les chaînes de la TNT sur l'insécurité ambiante généralisée à
tous les secteurs en France. Ainsi, être noir ou beur, coiffé d'un capuchon
fait de vous un criminel en puissance prêt à assassiner sur les quais du métro
ou à violer une gentille Française blanche. Les relais médiatiques de la droite
au pouvoir ont monté en épingle et l'immigration clandestine et l'insécurité
pour pousser les Français moyens à avoir peur et chercher refuge dans le tout
sécuritaire prôné par l'UMP. Faisant un pas de plus dans cette surenchère et
conformément à son programme où il propose de réduire l'immigration légale,
Nicolas Sarkozy répète désormais dans ses meetings qu'à ses yeux, la France
compte trop d'étrangers. Un message on ne peut plus clair adressé aux électeurs
du Front national. Le problème qui se pose actuellement, et au-delà du 6 mai,
se profile à l'horizon des législatives qui verront certainement le champ
politique français chamboulé par l'arrivée tonitruante de l'extrême droite. Et
pour troubler un peu plus la vision démocratique, l'UMP sort un bulletin blanc
de la poche en cas de jeu égal entre la gauche et le FN.