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Un vaccin inutile ?

par Abdelkrim Zerzouri

La pandémie de Covid-19 a-t-elle joué un mauvais tour aux grands laboratoires pharmaceutiques ? A la suite de l'apparition du coronavirus, en décembre 2019, plusieurs laboratoires pharmaceutiques de renommée mondiale ont engagé une course contre la montre pour produire le vaccin anti Covid-19, qui a occupé en 2020 et 2021 le top de la demande mondiale. C'était le temps à qui pouvait obtenir un lot de vaccins auprès de ces laboratoires, qui ont commencé à servir les premiers demandeurs, les pays riches où ils sont généralement implantés, alors que pour les Africains, les lots sont arrivés avec du retard et au compte-gouttes, et ce malgré la mise en place du mécanisme COVAX qui prévoyait de fournir des doses de vaccins au pays pauvres, et qui a fini par déclarer ne plus en avoir assez pour atteindre ses objectifs. Mais, ces laboratoires avaient des projets pour le continent africain, très prometteur en matière de demande de vaccin, du moins c'est ce qu'on croyait. Plusieurs laboratoires pharmaceutiques se sont ainsi engagés à réaliser, sur place, des usines de production de ces vaccins, d'autres étaient prêts à envoyer des usines en kits fin-prêts afin de répondre en urgence à la demande locale du pays d'accueil et en exporter vers d'autres. C'était également le temps à qui pouvait capter ces investissements dont l'importance était vue comme doublement bénéfique pour le pays qui réussira à devenir producteur de vaccins anti Covid-19, afin d'assurer la vaccination à sa population, et engranger des bénéfices grâce à son exportation. Des laboratoires pharmaceutiques ont ainsi entamé les recherches des meilleurs terrains en Afrique pour installer leurs usines pour produire directement le vaccin et répondre au plus pressé à une demande qui avoisinait les 500 millions doses en ces temps-là, une quantité qui devait tout juste permettre le démarrage des campagnes de vaccination. Alors que d'autres ont élaboré de sérieux projets d'installation d'usines qui peuvent fonctionner sur le long terme. Mais, le long terme n'ayant pas été au rendez-vous, on commence à déchanter. Certains pays africains n'ont pas demandé une seule dose de vaccin depuis plus d'un an, poussant (pour l'exemple publiquement avoué) le laboratoire Moderna à mettre en pause son projet d'usine de vaccins à ARN messager (ARNm) au Kenya. Les risques du métier, dira-t-on ? Ou une précipitation vers l'appât du gain qui n'a pas donné le temps de mesurer l'expansion de la pandémie dans le temps ? La question se pose également pour d'autres pays où la production de vaccin a été lancée. Qu'a-t-on fait des lots de vaccins produits, si production il y a, et non utilisés ? Doit-on aller vers le redéploiement de ces usines vers la production d'autres vaccins pour lutter contre d'autres maladies répandues en Afrique ?