Il n'y a
pas un seul gou-vernement qui ne s'est pas frotté,
tout au long de ces cinq dernières années, à la revendication du retour à la
retraite anticipée. La suppression, en 2017, des départs à la retraite sans
condition d'âge après 32 ans de service est restée en travers de la gorge de
milliers de travailleurs et des syndicalistes de tous bords, qui n'ont cessé de
remettre sur tapis cette réclamation. Vainement jusque-là. Les responsables à
la tête du département du Travail ayant tous opposé un niet catégorique face
aux revendications des syndicats, avançant l'argument massue du déficit
financier effarant, quelque 600 milliards de dinars, enregistré par la Caisse
nationale des retraites (CNR). Un déficit creusé, justement, en plus de la
diminution du nombre de travailleurs participants (cotisations), par
l'augmentation du nombre de retraités dans le sillage des départs massifs de
travailleurs à la retraite proportionnelle, notamment en 2016 où les
travailleurs qui remplissaient les conditions pour partir en retraite anticipée
ont pris d'assaut les guichets de la CNR afin de bénéficier de cette mesure,
avant sa suppression l'année suivante. Mais, les lignes sont en train de bouger
ces derniers jours. Car, le gouvernement semble disposé à étudier le dossier de
la retraite anticipée. Le ministre du Travail, Abderrahmane Lahfaya,
a annoncé le 4 novembre dernier devant des membres du Conseil de la nation,
qu'il a chargé une commission sectorielle d'étudier le dossier de la retraite
anticipée. Un pas vers un retour à la retraite anticipée ? Ce n'est plus le
même ton utilisé par l'ex-ministre du Travail, El Hachemi
Djaaboub, qui se montrait intransigeant face à la
revendication en question, soutenant à plusieurs reprises que le dossier de la
retraite anticipée est clos, car le ministre en poste laisse la porte
entrouverte quant à un possible retour à la retraite proportionnelle. Des
décisions seront certainement prises dans ce cadre selon les résultats auxquels
aboutira l'étude confiée à la commission sectorielle. Pas forcément un retour à
la même formule avec les mêmes conditions, difficile à imaginer, en cela qu'il
accentuera davantage le déficit financier de la CNR avec la prise en charge de
dizaines de milliers de nouvelles pensions de retraite, mais « un retour à la
source » de l'abrogation de l'ordonnance 97/13 régissant la retraite
proportionnelle et la retraite sans condition d'âge n'est pas à écarter. Dans
le sillage de la suppression de cette ordonnance, il était convenu, en effet,
que les travailleurs exerçant des métiers pénibles et dangereux continueront à
bénéficier de la retraite sans condition d'âge. Cette éventualité avait
effectivement décrispé l'atmosphère sur le front social, faisant dévier le
débat sur la nomenclature des postes pénibles, confié à l'UGTA, mais qui ne
verra jamais le jour. Est-ce par cette fenêtre des métiers pénibles qu'on compte
revenir à la retraite anticipée et contenir l'actuelle vague de contestation
des syndicats ?