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L'Algérie et le Brexit

par Abdelkrim Zerzouri

L'avènement du Brexit provoque les inquiétudes des uns et fonde les espoirs de certains autres pays, mais il ne laisse pas grand monde indifférent, du moins pas parmi ceux qui possèdent une veille économique efficace. Si le Brexit, effectif depuis le 1er février, fait bouger l'Amérique, la Chine et la Russie, pour ne citer que ces pays, l'Afrique, elle, reste relativement indifférente. L'Algérie également ne semble pas prendre rapidement toute la mesure de cette importante opportunité économique et commerciale offerte par le Brexit. La sortie de la Grande-Bretagne de l'UE doit, certes, passer par une période transitoire de 11 mois, toutefois cela ne devrait pas pousser à rester trop loin des négociations qui vont s'ouvrir non seulement entre la Grande-Bretagne et l'UE mais s'étendront à tant d'autres pays en raison des changements attendus dans la législation commerciale britannique.

C'est une nouvelle époque avec tous les pays, comme le dira Boris Johnson, le Premier ministre de l'Angleterre. Tout retard, donc, laisserait en rade l'économie algérienne qui se cherche, justement, un nouveau modèle basé sur les petites et moyennes entreprises et les start-up, ainsi que d'une voie de salut pour les exportations qui sortiraient le pays de sa dépendance aux hydrocarbures, et qui pourrait trouver ses repères dans cette conjoncture. Est-il assez tôt pour en parler ou d'initier des accords dans ce sens avec le Royaume-Uni ? On en parlait entre Algériens et Britanniques, déjà, de cet-après Brexit, en 2017, pourquoi alors ne rien entreprendre de concret maintenant et tout de suite, si on n'a fait que parler tout ce temps ?

Les relations commerciales entre le Royaume-Uni et l'Algérie sont de niveau faible, 9e client de l'Algérie avec des importations britanniques de 1,13 milliard de dollars et son 12e fournisseur avec des importations algériennes de 765 millions de dollars, mais l'après-Brexit peut s'avérer fort bénéfique pour les échanges commerciaux entre les deux pays. Jusque-là constituées essentiellement des hydrocarbures et de dérivés de produits énergétiques, les exportations algériennes vers le Royaume-Uni peuvent s'étendre ou se renforcer dans les domaines des produits agroalimentaires, agricoles et d'emballage, où une tradition existe malgré sa faiblesse. La Grande-Bretagne, un marché de plus de 65 millions d'habitants qui se situe à 2,5 heures de vol d'Alger, devrait constituer une bonne piste pour les exportations des produits agricoles notamment.

Il est vrai que cela ne tombe pas totalement à pic, à un moment où l'Algérie cherche encore à s'organiser sur le plan interne, mais il est à espérer que cette nouvelle donne constitue un stimulant pour mettre en place le mécanisme nécessaire qui boosterait les exportations algériennes vers le Royaume-Uni. Relevons dans ce contexte, sur la base d'informations rendues publiques par l'ambassade du Royaume-Uni à Alger, rien que pour les fruits et légumes par exemple, la Grande-Bretagne importe à plus de cinq milliards de livres sterling auprès de fournisseurs situés géographiquement plus loin que l'Algérie. La concurrence sera rude mais il suffit de miser sur la qualité/prix pour se frayer du chemin dans cette voie. En tout cas, il serait utile de tirer les leçons de la «mal négociation» des accords d'association avec l'UE pour construire un solide nouvel accord de partenariat économique et commercial bilatéral entre l'Algérie et la Grande-Bretagne.