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Le pouvoir devant l'écueil des préalables

par Kharroubi Habib

Dans l'allocution qu'il a prononcée le 2 septembre depuis In Amenas, Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense et chef d'état-major de l'armée, avait plaidé pour l'organisation de l'élection présidentielle avant la fin de l'année. Pour que cela soit possible, il a « suggéré » à l'autorité censée statuer sur le sujet, en l'occurrence le président de l'Etat par intérim, qu'il serait opportun de convoquer le corps électoral le 15 du mois de septembre courant.

En traduction de cette suggestion émise par le chef de l'armée, Bensalah signera sous peu le décret enclencheur du processus électoral qu'il justifiera en faisant valoir tout comme l'a prétendu Gaïd Salah que la décision répond « à une revendication populaire insistante ». Mais s'il est vrai qu'une telle revendication émane de la part d'une majorité populaire, elle est incontestablement assortie de préalables que le mouvement populaire martèle sans discontinuité et sans esprit de compromis dans leur exigence. Ce que même le rapport établi par l'instance de dialogue et de médiation à l'issue de ses rencontres avec des partis politiques, des acteurs de la société civile et des personnalités nationales a confirmé.

Dans ses conclusions, cette instance est certes allée dans le sens soutenu par le général de corps d'armée à savoir qu'il y a un large consensus populaire en faveur de l'organisation de l'élection présidentielle mais en mettant en exergue les conditionnalités auxquelles le pouvoir ne peut continuer à faire la sourde oreille qui sont pour elle le départ de Bedoui et de son gouvernement et la mise en place d'une commission électorale indépendante à tout point de vue et à même de conférer régularité, transparence et honnêteté au scrutin envisagé. Même si l'instance de Karim Younes a fait l'impasse sur les autres préalables que scandent les marcheurs du vendredi, elle a posé problème au pouvoir et à son homme fort en consignant dans son rapport qu'il y a unanimité populaire sur les deux conditionnalités en question.

Gaïd Salah qui a défendu et louangé le gouvernement Bedoui, suivra-t-il à son sujet la conclusion de l'instance qu'il sait acquise à sa préconisation de l'organisation au plus vite de l'élection présidentielle ? Le fera-t-il aussi s'agissant de la commission de surveillance des élections dont la nature et l'autorité sont l'enjeu sur lequel le pouvoir de fait ne veut pas perdre la main ? Sur cette dernière, il pense parvenir à lever les préventions que suscitent ses intentions en faisant confier par Bensalah la conduite des discussions sur sa composante et ses prorogatives au même Karim Younes qui à la tête de l'instance du dialogue n'a pas démérité du point de vue officiel. Ce dernier parviendra-t-il à faire fléchir sur ce sujet ainsi que celui du départ du gouvernement Bedoui les parties dont il a constaté l'inflexibilité de l'exigence qu'il semble faire sienne ? Rien n'est moins sûr d'autant que ces parties sont sous la pression d'un mouvement populaire qui ne lâche rien concernant les préalables à l'élection présidentielle.