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Quand deux volontés se confrontent

par Kharroubi Habib

Le caractère pacifique et grandiose par l'ampleur des marches et rassemblements populaires anti-cinquième mandat et contre le régime prévaricateur et corrompu qui se déroulent dans le pays depuis le 22 février a dissuadé le pouvoir d'employer la force pour les empêcher et en disperser les participants. Il n'est pas sûr que maintenant que ce pouvoir a mis le cap après la démission de Bouteflika sur une transition dans le cadre constitutionnel dont le peuple ne veut pas, les marches et autres manifestations qui vont avoir lieu en protestation de sa démarche vont l'être dans un climat détendu.

Il est clair que l'autorité de fait qui s'est substituée au président démissionnaire ne paraît pas avoir l'intention de donner satisfaction à la revendication populaire d'une transition hors le cadre constitutionnel ne faisant pas la part belle aux affidés du régime encore en place, va être tentée de sonner la fin de la «récréation». Le premier signal indiquant qu'elle est dans cette intention est à la fois dans le harcèlement dont sont la cible des activistes du mouvement populaire anti-régime et dans la dispersion musclée par les forces de l'ordre samedi d'un rassemblement citoyen à Alger contre le régime et la solution d'une transition constitutionnelle.

Gaïd Salah que les imposantes marches de vendredi dernier ne semblent pas avoir impressionné apparaît résolu à ne pas tenir compte de la volonté populaire qui s'est exprimée contre la transition que vont piloter des affidés du régime et qui a son aval. Il est enclin à maintenir sa position au constat qu'elle a reçu le soutien et des lâcheurs de Bouteflika qui font désormais de lui leur champion et de partis et de personnalités de l'opposition contempteurs du régime que les premiers ont servi. Ces ralliés pour des considérations diverses vont lui servir de masse de manœuvre pour tenter de semer les graines de la dissension et de la discorde dans les rangs du mouvement citoyen qui pourraient générer sa dislocation. Leur mission est de rendre impossible au sein de ce mouvement l'émergence d'une alternative consensuellement acceptée à la transition constitutionnelle pipée qu'elle sera par son pilotage confié aux piliers du régime rejeté.

Après le gant de velours dont il a usé dans la gestion du mouvement anti-régime, Gaïd Salah brandit, semble-t-il, la main de fer contre lui après s'être vu compris par les manifestants dans le lot des tenants du régime dont ils exigent le départ. L'Algérie est sur le fil du rasoir dans une situation donnant à voir que les deux protagonistes de sa crise campent dans des positions apparemment irréconciliables en raison qu'elles visent des objectifs respectifs auxquels ni une partie ni l'autre ne veut la réalisation. L'on est au bord d'un basculement à haut risque aux enchaînements pouvant s'avérer dramatiques.