Le début du
grand boucan politique à la veille des élections locales et législatives, un
pavé avant la présidentielle, annonce une longue pré-campagne électorale sale,
méchante et sans merci. Des leaders de formations politiques passent à
l'offensive, médiatique surtout, provocatrice à l'extrême, puis creusent des
tranchées et s'y tassent en attendant que s'accomplisse la décantation des
rangs. Les deux premiers à sortir de l'ombre ont été les chefs des deux partis
du pouvoir, eux-mêmes. Simple hasard de calendrier ou calcul de chapelles, ce
qui est sûr, c'est que les deux hommes à la tête des partis de l'alliance
présidentielle, ou ce qui en reste, ont étalé toute l'inimitié qui les sépare. Saadani, qui a déjà dit ouvertement tout le mal qu'il pense
d'Ouyahia, a été le premier à sortir la grande
artillerie contre les «faiseurs» de présidents et ceux qui nourrissent
l'ambition d'accéder au fauteuil d'El Mouradia. Il
descendra en flammes l'ex-patron du DRS, le général à la retraite Toufik,
accusé d'être derrière tout ce qui se trame contre l'Algérie, ainsi que les
généraux de la France, Rachid Nekkaz montré comme une
personne ramenée (de France) par Toufik pour jouer les perturbateurs aux
dernières élections présidentielles et Abdelaziz Belkhadem,
dont la famille entière a été la cible de ses attaques, laissant entendre
qu'ils sont tous du parti de la France.
Cette
France qui, selon Saadani, doit comprendre maintenant
qu'elle a en face des institutions avec lesquelles elle doit traiter de toute
question pouvant engager les deux pays. Constant dans ses positions,
l'ex-patron du DRS n'a pas réagi à cette énième attaque frontale du SG du FLN.
Mais les deux autres hommes politiques cités par Saadani
sont immédiatement montés au créneau, l'un (Nekkaz)
promettant d'intenter contre lui une action en justice s'il ne s'empresse pas
de présenter ses excuses (avant le 1er novembre), et le second en qualifiant à
chaud son discours d'ordurier et en appelant par la suite les militants du FLN
à le chasser du parti. Puis vint la sortie, attendue, du SG du RND. Ahmed Ouyahia, égal à lui-même, telle une anguille dans ce gotha
politique, a encensé tout le monde ou presque. Même Saadani,
«qui ne lui fait pas confiance» (dixit Ouyahia), ne
sera pas trop dérangé et ses déclarations ne seront pas commentées, du moins
pas directement. Bien sûr, Ouyahia n'a pas manqué de
montrer qu'il se trouve à l'autre bout des positions de Saadani,
exprimant un respect immuable pour Belkhadem et
considérant l'ex-patron du DRS loin des coups tordus contre le pays, «menés de
l'extérieur et de l'intérieur». Ouyahia n'a pas raté
l'occasion de faire une petite remarque, montrant son étonnement, sur le cas
des ambassadeurs et du patron de Sonatrach qui
devraient, selon sa vision, figurer sur la liste des postes interdits pour les
doubles nationalités et qui n'ont pas été mentionnés. Quand on sait que cette
question (double nationalité) divise les leaders du FLN et du RND, on peut
aisément comprendre qui est visé par la flèche. En tout cas, rien ne peut
concilier les deux hommes, et l'approche des élections présidentielles
attiserait le feu qui couve dans les cendres. Parce que les élections locales
et législatives ne sont qu'un prélude à la présidentielle, la bataille engagée
d'une manière précoce entre les deux hommes illustre parfaitement les divisions
en haut de la pyramide sur la question de la succession, en 2019, à la tête de
la magistrature suprême.