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In Salah: ce n'est pas l'émeute mais l'insurrection citoyenne

par Kharroubi Habib

Ce qui se passe à In Salah, une véritable insurrection citoyenne contre le démarrage des forages de puits de gaz de schiste, ne se serait probablement pas produit si au lieu de décider arbitrairement de l'opération, les autorités s'étaient inquiétées de savoir ce qu'en pense la population de la région.

A n'en point douter ces autorités ont pris leur décision en ayant pour a priori que les habitants d'In Salah ignorent totalement ce de quoi il s'agit dans le débat contradictoire opposant partisans et adversaires de l'exploitation du gaz de schiste. Partant elles ne se sont pas attendues à l'ample mouvement de protestation anti-gaz de schiste qui rassemble tous les habitants de la région et pas seulement une poignée de militants écologistes. Il leur faut bien maintenant se rendre à l'évidence que le mépris qu'elles ont de ce que peuvent ressentir et penser les Algériens à l'égard des décisions qu'elles prennent les aveugle et les empêche de prendre la mesure de la colère populaire qui s'accumule contre elles.

Ce à quoi nous assistons à In Salah n'a rien d'une explosion anarchique provoquée par la frustration de revendications ayant trait à la satisfaction d'un besoin portant sur l'emploi, le logement et autres. Le pouvoir est en l'occurrence en face d'un mouvement citoyen responsable englobant l'ensemble de la population de la région qui lui conteste le fait d'avoir arbitrairement lancé des chantiers de forage de gaz de schiste sans se soucier de l'avis de ses habitants. Si le mouvement de protestation rassemble autant, c'est parce que la population de cette région n'est pas aussi ignorante des enjeux encourus à travers l'ouverture du chantier de forages de puits de gaz de schiste comme l'ont pensé les autorités qui lui ont accordé leur feu vert. Les gens d'In Salah sont parfaitement renseignés sur la controverse nationale et internationale que suscite la problématique de l'exploitation du gaz de schiste. Ils se rangent du côté de ses adversaires au constat que chez nous ces voix ont été ignorées et leurs arguments rejetés purement et simplement. Leur conviction est d'autant plus arrêtée que comme à leur habitude les autorités du pays ne sont pas crues redevables d'aller au-devant d'eux en estimant qu'il leur suffisait de décréter l'exécution des forages pour que se taisent les protestations ou qu'à l'extrême l'étalage de la force publique dissuaderait les impénitents.

Pour les profanes qui sont la majorité, il est difficile de savoir qui dit vrai dans le débat contradictoire auquel se livrent partisans et adversaires du gaz de schiste. Ce qu'ils saisissent parfaitement par contre est que les autorités exigent d'eux qu'ils leur fassent entièrement confiance pour ce qu'elles décident et entreprennent. Or, si dans les relations autorité-citoyens il y a quelque chose qui manque, c'est bien la confiance. Ce déficit de confiance est la marque commune que l'on décèle dans les explosions de protestation et de contestation populaire dans tous les recoins du territoire national qui en sont agités à un moment ou à un autre.