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50 ans après la création de l'OUA, l'unité de l'Afrique est toujours en débat

par Kharroubi Habib

L'organisation panafricaine des Etats célèbre ces jours-ci le cinquantième anniversaire de sa création en 1963 à Addis-Abeba. Avec grande pompe puisque pas moins de dix mille invités représentant le gratin mondial des sphères politiques, diplomatiques, associatives, culturelles et sportives ont été conviés pour la circonstance dans la capitale éthiopienne où se déroulent les cérémonies commémoratives. L'événement vaut assurément d'être marqué solennellement mais les organisateurs de sa commémoration auraient été mieux inspirés en le faisant avec sobriété ne serait-ce que pour ne pas ajouter aux difficultés financières dont souffre l'organisation panafricaine dont il est notoire qu'elle est accablée d'un déficit budgétaire qui limite son ambition à intervenir sur le continent notamment en matière de prévention des conflits et de maintien de la paix.

Le bilan de ce que fut l'OUA à la création puis devenue l'Union africaine après n'est pas également de ceux qui prêtent à de fastueuses célébrations. Fondée dans l'euphorie des indépendances africaines avec pour horizon d'être le creuset de l'unité continentale passée sur la mise en commun des potentialités des Etats africains pour la promotion de l'Afrique et de ses populations, l'OUA aujourd'hui l'Union africaine est loin d'avoir assumé ce rôle. Elle en a été initialement bloquée par les divisions idéologiques qui ont fait se combattre ses «pères fondateurs», puis réduite par ceux-ci et leurs successeurs à n'être qu'un «syndicat de chefs d'Etat» dont la tribune a été transformée en prétoire pour la défense de ses membres et la glorification de leur «contribution au développement de leurs pays et à la défense de la cause du continent».

Le tableau n'est pas totalement négatif dans le bilan de l'organisation panafricaine. Mais il est loin de mériter les satisfecit outranciers qui pleuvent sur elle en son cinquantième anniversaire. L'unité africaine est loin d'être tangible à l'heure de la commémoration de celui-ci. Les Etats membres de l'Union africaine se contentent d'une unité de façade qui se limite à des prises de position et à des résolutions qui pour ceux les ayant entérinées n'ont pas force d'imposer leur respect et application à leurs Etats respectifs. Sous couvert d'unité, les Etats africains persistent néanmoins à agir en ordre dispersé sur la scène internationale. La majorité d'entre eux étant restés dans une dépendance quasi organique à l'égard de leurs ex-puissances colonisatrices. Dispersion qui fait que l'organisation panafricaine peine à se faire entendre dans l'arène internationale et à faire prendre en compte en ce lieu les intérêts et les droits du continent.

A quelques exceptions près, l'OUA puis l'Union africaine ont toujours été à la remorque des puissances étrangères au continent s'agissant des règlements de conflits multiformes dont malheureusement Afrique est le triste théâtre depuis les indépendances des pays qui en partagent le territoire. Ce n'est pas pour autant qu'il faille tirer la conclusion que l'Union africaine est une coquille totalement vide. Peu à peu à petits pas grâce à la «conscientisation» de ses peuples, l'Afrique avance vers son unité. Et cette avancée impose aux dirigeants africains d'en jeter les jalons qui contribueront à sa matérialisation inéluctable.