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A propos des «mi-figue, mi-raisin»

par Kharroubi Habib

T rois types de comportement sont à distinguer parmi le panel de personnalités, de partis et d'organisations sociales que la commission des consultations politiques a invité à la rencontrer.

 Il y a celui tranché et annoncé de ceux qui ne voient aucune utilité à participer à un processus de réformes dont les consultations menées par cette commission sont un maillon. Conséquents donc, ils ont décliné son invitation. Il y a ensuite celui, tout autant tranché et attendu de ceux qui, partisans du régime, adhèrent à sa démarche et donc répondent positivement à l'invite de la commission. Et il y a enfin celui de ceux qui, parce qu'ils sont à la fois dedans et en dehors du régime, se rendent à son invitation tout en affichant des réserves ou en formulant des critiques sur le projet et le processus de réformes retenus par ce régime.

 Autant les attitudes des deux premiers groupes découlent d'une incontestable cohérence, autant celle du troisième ressort d'une logique floue qui ne rehausse nullement le crédit de ses tenants.

 Le pays vit un moment qui est une cruciale croisée des chemins. Raison pour laquelle les citoyens attendent des acteurs politiques et des personnalités censés être des médiateurs entendus qu'ils se déterminent sans ambiguïté, et non qu'ils se retranchent derrière des positions « mi-figue, mi-raisin ».

 Le projet de réformes du pouvoir a le mérite de la clarté dans ses intentions. Il vise à apporter des changements cosmétiques qui ne remettent nullement en cause dans le fond la gouvernance du pays, les mœurs et pratiques de son personnel dirigeant. C'est parce qu'ils en sont convaincus que des partis et des personnalités nationales ont refusé de prendre part aux consultations menées par la commission Bensalah. Et c'est au contraire parce qu'ils souscrivent totalement à l'objectif de ce projet que les partis et organisations satellitaires du pouvoir et des personnalités n'ayant pas rompu les amarres avec celui-ci, se succèdent dans le bureau de la troïka qui mène les consultations.

 Aux uns et aux autres, l'on ne peut faire le reproche d'être en porte-à-faux avec leurs convictions, même si l'on ne partage pas l'une ou l'autre. En revanche, l'on ne peut que fustiger « le pragmatisme » de ceux qui ont opté pour la posture de rester au « milieu du gué ». Qui consiste à dénoncer le processus de réforme du pouvoir comme incompatible avec une véritable volonté de changement profond et à lui apporter une caution en acceptant d'y prendre part, ne fût-ce qu'en participant aux consultations menées par la commission Bensalah.

 D'aucunes parmi les personnalités qui s'adonnent à ce douteux exercice se pensent dotées d'un « destin national ». Ambition qu'elles pensent pouvoir favoriser en ne rompant avec aucun côté. Sauf que ni le pouvoir ni ses véritables adversaires ne sont amnésiques et n'oublieront donc le grand écart auquel elles se soumettent en ce contexte où ne sont recevables que les prises de position fermes et sans détour. Leur positionnement peu glorieux ne fait que renforcer le détachement des citoyens à leur égard et de toutes les déclarations de bonnes intentions qu'elles pourront leur adresser.