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LA REGLE DE L'A-PEU-PRES

par Abdou BENABBOU

Le ministre algérien des Finances doit certainement faire face en ce moment à des nuits blanches. Jeudi à la tribune de l'APN, ses réponses explicatives sur la loi de finances ne pouvaient se débarrasser d'un trompe-l'œil trop audible tant il est évident pour tout le monde que la situation financière du pays est caractérisée par un manque de clarté inquiétant. Au détour de chacune de ses affirmations, on surprend des dits et leurs contraires et le résumé que l'on en déduit est que le bateau Algérie est aux prises avec un tangage désastreux. L'addition des reflux qui empoisonnent la situation financière du pays subit la logique des nombreux impondérables nés d'une gouvernance et d'une gestion nationale sur la base de nombreuses législations contradictoires, les unes après les autres au fil des années.

Tout y est. Retraites, politique de soutien des prix, importation des véhicules, inflation, financement non conventionnel, jusqu'à l'obligation de la déclaration de l'origine des devises en quelques heures seulement reniée. Tout porte à croire que devant l'énormité des problèmes, la culture reste ancrée dans l'instantané et continue à être guidée par la règle de l'à-peu-près.

Le bien embarrassé ministre des Finances ne pouvait faire ni dire mieux. L'état des lieux de l'économie algérienne est une énorme pelote de fer dont les fils rouillés sont si entremêlés et si enchevêtrés qu'en essayer de dénicher la tête devrait obéir à un chamboulement titanesque. Cette révolution économique si nécessaire ne s'effectuerait pas cependant sans gros dégâts sociaux. Le peuple et ses actuels dirigeants en sont très conscients. Ni les uns ni les autres ne seraient volontaires ni en mesure d'en payer le prix. L'esprit de la rente est aujourd'hui si ancré qu'il est devenu impossible de s'en défaire. Pour preuve, une nouvelle colère a surgi au cœur des banques pour témoigner que les paradoxes et l'irrationalité sont devenus une monnaie non conventionnelle courante. Les banquiers censés gérer les deniers et les petits sous exigent une valorisation de leurs salaires. L'esprit qui prévaut actuellement leur a donné raison. Ils viennent d'avoir gain de cause.