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VENDRE SA VESTE

par Abdou BENABBOU

Dans le débat houleux animé ces derniers jours à propos de la redéfinition de la loi sur les hydrocarbures, non initié à la complexité des nombreuses théories politiques et économiques, et éloigné de la circonvolution d'un sujet aussi important, l'Algérien ne pipe pas mot. Les théories des experts et les équations savantes à plusieurs inconnues lui sont indigestes et tout ce qu'il retient du bras de fer actuel et ce qui lui semble le plus important est que l'autorité officielle est en passe de se situer à l'étage de la quémande. Un peu comme si un chef de famille chômeur trop agressé par la misère se décidait à vendre sa veste.

Tout le monde le sait, la crise économique est à son apogée, et la croisée de fer des argumentations et des approches savantes, aussi nécessaires soient-elles, paraissent bien dérisoires, au vu des préoccupations terre à terre de la population. Que le sujet des hydrocarbures, source de la première nourriture du peuple, n'intéresse que de façon évasive la majorité est très significatif sur un état d'esprit général. Il est peu probable que les inscriptions véhémentes des banderoles du Hirak puissent refléter une maîtrise juste et profonde des données. Le manque de communication, de vulgarisation et d'explication du pouvoir sur une décision aussi hâtive ouvre les portes aux légitimes suspicions et donne libre cours aux oppositions par l'humeur et la vindicte. Ce n'est ni la langue de bois ni le vase clos d'une représentation décriée dite populaire à la légère qui convoqueraient un patriotisme susceptible d'accepter de porter le très lourd fardeau national qui s'annonce.

Faudrait-il alors espérer qu'un nouveau président de la République puisse créer un miracle ? Si tant est qu'il soit au rendez-vous, il n'est pas du tout certain qu'il apporterait du bonheur dans son sac. Se mouvoir avec toute la bonne volonté du monde dans une arène qui ne cache plus une tragédie n'est pas l'affaire d'un homme. Isolé, il finira par céder son pantalon pour nourrir tout un peuple.