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LOURDE LETHARGIE

par Abdou BENABBOU

Notre ministre des Finances ne doit certainement pas ignorer qu'il est dans de beaux draps. En se voulant rassurant dans sa dernière sortie, il a utilisé l'esquive politique pour éclairer un état des lieux financier du pays et on ne peut lui en vouloir d'avoir survolé les vrais problèmes de fond. Se préoccuper du devenir des entreprises propriétés des magnats aujourd'hui en prison et du sort de leurs travailleurs est une grande œuvre de charité mais notre trésorier en chef ne doit pas ignorer que c'est tout le monde du travail qui est en danger.

Il est certain d'ailleurs que l'explosion sociale de ces derniers mois a d'abord pour première origine le ras-le-bol du peuple n'en pouvant plus, tétanisé jusqu'alors par les atrophies phénoménales de l'économie du pays. La mise à l'ombre par l'armée du président déchu n'aura été qu'une perfusion obligée pour préserver ce qui était à garantir et à sauver. Les péripéties autour d'un cinquième mandat n'ont été que la goutte pestilentielle débordant du verre.

Les immédiates et premières conséquences sont connues. Une lourde léthargie s'est installée à tous les niveaux. La prise de responsabilité par ceux qui avaient l'habilitation de fluidifier le circuit et l'activité économiques s'est sclérosée, démultipliant les conséquences nées du coup d'arrêt donné par les autorités en décidant de fermer la vanne des importations. L'immobilisme trône en roi et l'effervescence des banques s'est estompée.

Evidemment, tout n'a pas encore été dit sur le négoce désarticulé et à la limite du pourri de ces dernières années. La catastrophe des législations sciemment contradictoires au bénéfice d'une caste est connue. Les touches et les retouches des lois préconçues sur la base de roublardises politiciennes établie pour un maintien au pouvoir se sont avérées catastrophiques pour le pays.

Une pléthore d'entreprises est en voie de fermer ses portes. L'inquiétude du monde du travail est à son comble et il est certain que notre premier argentier a besoin de bien plus que de recettes de rafistolages pour rassurer. L'incarcération spectaculaire des quelques acteurs du drame ne suffit pas à répondre aux turpitudes économiques et sociales aux origines lointaines. C'est d'une hardiesse encore plus colossale dont l'Algérie a besoin.