Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

La solitude de la commission de Derbal

par Abdelkrim Zerzouri

Les commissions de surveillance des élections ont fait leur temps, prouvant d'une joute électorale à l'autre qu'elles ne constituent que «des légumes sur le dîner», et encore les légumes de nos jours ont bien plus d'importance. Parfois, ces mêmes commissions servent plus à cautionner la fraude que de l'empêcher, y compris pour les commissions dépêchées par les Européens et autres organismes étrangers qui ne sont pas exemptes des doutes qui pèsent sur leur mission. A quoi peut donc servir une commission de surveillance des élections dépourvue de prérogatives et qui, de surcroît, ne fait pas l'unanimité au sein des partis en lice pour les élections attendues pour le 23 novembre prochain, pour s'en tenir à ce rendez-vous proche ?

Certains partis accordent de l'importance à l'élément humain, à la procédure de la désignation des membres de la commission, et souhaiteraient de ce fait agir au niveau de sa composante pour la rendre plus crédible à leurs yeux. D'autres ne se lassent pas de critiques à son égard, jusqu'à nous faire croire qu'ils jouent plutôt à l'intimidation afin de faire entendre leurs voix, pas celles des électeurs. La commission de surveillance des élections est ciblée de toute part, faisant ainsi l'objet de tirs croisés de la part de ceux-là mêmes qui vont demain faire dans le harcèlement pour dénoncer les irrégularités supposées ou réelles dans le vote. La pression exercée sur la commission de surveillance des élections est infernale. Tellement difficile à supporter qu'on se demanderait ce qui pousse ses membres à accepter d'y siéger. L'argent ? Le profit financier reste, effectivement, une motivation très convaincante pour bon nombre d'entre eux.

Cet aspect de la mission rémunérée au sein des commissions de surveillance des élections n'est-il pas une forme de corruption morale ? De toute évidence, elles gagneraient plus en crédibilité si la mission est acceptée sans contrepartie financière. Il n'y a qu'à voir le président de la Haute instance indépendante de surveillance des élections (HIISE), Abdelwahab Derbal, se démener à gauche et à droite pour sentir sa profonde solitude. Il a fini par rendre la monnaie à ses détracteurs, lançant que la surveillance des élections est l'affaire de tout le monde, partis politiques engagés et HIISE. Certes, mais le dernier mot doit revenir à la HIISE et non aux partis qui ne peuvent pas porter les habits et du joueur et de l'arbitre.

Enfin, en vérité, la HIISE étant limitée dans ses prérogatives, le mot de la fin reviendrait bien aux magistrats, devant lesquels finissent par atterrir toutes les requêtes et les plaintes portant sur la fraude. Ni les journalistes, appelés par le président de la HIISE à faire preuve de neutralité (!), ni les partis ne peuvent garantir un scrutin honnête et régulier.