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Alors, on parle !

par Moncef Wafi

Le gouvernement appelle toutes les forces vives du pays, partis politiques, syndicats et associations, à un dialogue national. La première tentation est de dire encore un. Les dialogues on connaît et l'Algérie en a collectionné quelques-uns depuis ces deux dernières décennies et le résultat est le moins qu'on puisse dire mitigé. On se souvient tous du marathon de Ouyahia et les dérapages qui ont suivi. Alors à quoi va servir la démarche de Tebboune qui, au demeurant, n'attend que le feu vert de la présidence de la République ? Les sceptiques diront à rien puisqu'elle va perpétuer une tradition stérile, propre à la consommation extérieure, donnant de l'Algérie l'image d'un pays ouvert et franchement démocratique.

Si l'appel est d'actualité, personne ne répond de sa réussite puisque des partis politiques avaient même décliné l'offre d'intégrer le nouveau gouvernement qu'on voulait, en haut lieu, d'union nationale. La volonté de brasser large est là, maintenant il faut définir les interlocuteurs et canaliser les discussions pour éviter qu'elles ne partent dans toutes les directions et ne débordent sur l'action même du gouvernement. Si l'initiative paraît à priori louable, sa présentation suggère toutes les maladresses de communication qu'on prête à la propagande des appareils lourds. Le choix même des partenaires n'est pas aussi pertinent puisqu'il ne reproduit que les anciens schémas qui ont démontré leurs limites.

En s'adressant aux traditionnels associés des dialogues nationaux (partis politiques siégeant dans les deux chambres, mouvement associatif, partenaires sociaux), Tebboune risque d'hypothéquer fortement les chances de succès, si d'aventure elles existent, d'une action qui paraît presque frappée du sceau du superflu. Le gouvernement cherche-t-il pour autant à légitimer son existence, lui à qui on reproche d'être né d'une élection où l'abstention et la fraude ont été les moteurs ? En l'absence de la légitimité des urnes, Tebboune cherche-t-il une caution de base, contournant ainsi les critiques qui ont accompagné les dernières législatives ?

Quoi qu'il en soit et pour peu que la volonté politique adoube ce dialogue, il est fort à parier que les cercles proches du pouvoir vont se bousculer devant la porte de l'initiative en attendant l'adhésion des véritables partenaires sociaux, particulièrement les syndicats autonomes qui restent, quelque part, et avec la défection des partis politiques, les réels représentants de la base citoyenne.