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Le bourbier libyen

par Moncef Wafi

Malgré toutes les démarches régionales pour contenir le conflit libyen et faire cesser la guerre civile qui y fait rage, le moins que l'on puisse dire c'est que la voix des armes n'est pas près de se taire. Les deux hommes, présentés comme forts de la Libye, sont loin de vouloir s'entendre sur un minimum syndical pour s'asseoir à la même table des négociations, inclusives comme souhaitée par Alger, et chaque jour voit la situation s'enliser dangereusement dans les sables mouvants d'une bataille pour le pouvoir et pour le contrôle de l'or noir.

A Tripoli, à Benghazi ou à Tobrouk, les seigneurs de la guerre imposent leur loi et brouillent les cartes d'une réconciliation prise en otage par les intérêts des parrains des uns et des autres. En plus des factions locales, des milices rebelles et des forces paramilitaires, de l'improvisation des frappes aériennes américaines sous le couvert de la lutte antiterroriste initiée sous le parapluie de l'Otan, la Russie s'invite dans ce magma à forte teneur de soufre. Selon un responsable américain, des soldats des forces spéciales russes se trouvent actuellement dans une base militaire dans l'ouest de l'Egypte. Pour Washington, il ne fait aucun doute, les spetsnaz sont la tête de pont de Moscou qui cherche à jouer un rôle accru dans la région.

Information vite démentie par le ministère de la Défense russe malgré un deuxième recoupement fait par un diplomate occidental. Moscou explique qu'une ingérence russe «excessive» actuellement dans les affaires libyennes «n'aiderait sûrement pas et ne serait certainement pas utile» sans toutefois se déjuger des contacts que la Russie mène «avec les parties qu'elle juge nécessaires». Moscou multiplie, depuis son intervention militaire en Syrie, les initiatives en vue de rapprocher Haftar de Fayez al-Sarraj, le chef du gouvernement d'union nationale (GNA) basé à Tripoli et reconnu par la communauté internationale. Le maréchal s'était rapproché de la Russie dernièrement, se rendant début janvier sur le porte-avions russe qui passait au large du pays en rentrant d'une mission au large de la Syrie. Fayez al-Sarraj s'est rendu, quant à lui, début mars à Moscou. Les pays voisins de la Libye espèrent encore que la somme des efforts puisse aboutir à un début de solution pour peu que toutes les parties agissantes jouent cartes sur table.