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Le poids de l'informel
par Moncef Wafi
Avec un
maximum de retard, l'Algérie a enfin décidé de se lancer dans le e-commerce ou,
pour faire plus simple, dans le paiement en ligne. Les Algériens pourront payer
les services et acquérir des biens en payant dans un premier temps sur Internet
puis directement chez les commerçants si le processus venait à se généraliser.
En effet, malgré les discours rassurants des responsables et leur fermeté quant
à l'utilisation des cartes de paiement électronique, on est en droit de
s'interroger sur la réceptivité des premiers intéressés. En optant pour ce
moyen de paiement, l'Etat cherche désespérément à capitaliser une partie des 50
milliards de dollars, masse monétaire informelle qui circule sur le marché
parallèle. Il en est autrement de la majorité des citoyens et des commerçants.
Pour donner l'exemple, les banques publiques et les grandes entreprises sont
sollicitées pour donner plus de visibilité et de lisibilité à ce levier
d'autant que les Algériens restent constamment prudents lorsqu'il s'agit de
leurs économies, échaudés qu'ils sont par l'expérience malheureuse de la
banqueroute de Khalifa Bank. Cette absence de confiance dans le système
bancaire a déjà fait capoter l'opération de capitalisation de l'argent du
circuit informel et mis à mal toute tentative de balisage des flux monétaires
en Algérie. Si le client craint pour son argent, préférant le cacher sous un
matelas, le commerçant voit dans ce paiement électronique une intrusion directe
dans sa comptabilité souvent en décalage avec ses déclarations aux impôts. Ce
mode de paiement permet une traçabilité des transactions effectuées par les
commerçants utilisant les terminaux de paiement électronique qui sont soumis à
une taxe forfaitaire et redoutent de ce fait un redressement fiscal. Une
traçabilité également mal venue pour les citoyens qui devront justifier de leur
argent auprès des services financiers concernés. Si la crainte est réelle,
ancrée dans nos gènes, les expériences passées ont montré que pratiquement
toutes les initiatives et les décisions prises dans le secteur de la finance
n'ont jamais réellement abouti. Si on donne quatre mois pour l'e-paiement pour
qu'il soit adopté par les institutions étatiques et les grands facturiers,
gageons que son ancrage sociétal prendra le même chemin que l'obligation du
paiement par chèque pour peu que la mesure ne soit pas renforcée par un
contrôle rigoureux sur terrain.
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