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ACCUSER, RECUSER, PESTER?

par M. Abdou BENABBOU

A quoi donc répond ce dérèglement de nos comportements et cette impossibilité d'ordonner nos esprits pour que nous prenions attache avec la sérénité ? Le malaise profond dans lequel nous plongent les flots des grèves, des protestations de la rue et des turbulences de tout genre et notre incapacité à définir ce que nous voulons vraiment ne sont pas de simples humeurs quand la mosquée reste le seul havre de paix pour ceux qui prient. Il y a comme une âcre odeur tenace imposée par une fatalité pour que la société tout entière soit empêchée d'aller vers ses propres retrouvailles. Nous aurons beau accuser, récuser et pester, notre désarroi ne serait pas seulement le produit d'une mauvaise gouvernance et l'alchimie qui nous fait et qui nous dérange sans cesse est d'abord en nous. Nous sommes les acteurs de notre propre déchéance et les Algériens comme tous les autres sont incapables de redéfinir l'Humanité pour humer les senteurs des paradis.

Les petites et grandes puissances se fourrent le doigt dans le nez en croyant qu'il suffit de dresser des barricades faites de lois nouvelles et de béton pour stopper la vague envahissante des désespérés. On ne badine pas impunément avec l'Histoire en creusant avec intempérance des fossés entre les hommes. Elle est vengeresse quand hier encore on battait le rappel par bateaux entiers des bras corvéables et que l'on décide aujourd'hui d'annihiler ce qui leur reste comme élans désemparés en érigeant des murs de fils de fer barbelés. La dîme à verser est imparable et l'on récolte fatalement ce que les civilisations ont semé.

Le malheur des hommes est de ne s'en tenir qu'au temporel. Ceux qui régissent la marche des peuples plus que les autres. A l'évidence, cette marche est toujours contrariée par ceux qui étalent, tour à tour, tantôt des prophéties et tantôt leurs contraires jusqu'à pousser aux suicides dans les mers et aux immolations par le feu. Ici comme ailleurs. Au pas de sa porte comme sous les cieux les plus éloignés.

Parce que l'on oublie que l'éternité n'est pas garantie, que la mort est programmée pour tous et que l'Humanité est une petite famille.