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Je suis un antisémite

par Moncef Wafi

Il y a deux jours, je suis entré dans une supérette pour acheter un pack d'eau minérale. J'ai pris la première marque à portée de ma main et en passant à la caisse je me suis rendu compte que c'est un label qui soutient l'effort de guerre israélien. Par solidarité, et parce que, au fond, ce geste ne me coûtait absolument rien sauf le sentiment d'avoir contribué, à ma façon, à soutenir Ghaza dans sa guerre contre l'occupation israélienne, j'ai pris une autre marque d'eau minérale, nationale cette fois.

Une joie révolutionnaire toute puérile au sortir de cette adresse commerciale vite estompée lorsque je me rendis compte, mais trop tard, que j'avais également acheté, sans même y penser, une bouteille de soda d'une marque mondialement connue pour être l'un des plus fervents défenseurs d'Israël depuis 1966. Un achat réflexe qui renseigne sur la complexité mentale d'un acte de résistance que le monde arabe et musulman n'arrive toujours pas à assimiler du fait d'un battage médiatique et publicitaire sans pareil. Le boycott des marques qui versent des dividendes à un Etat terroriste doit être la première réponse quand on n'a pas le courage ou les moyens de riposter derrière une arme.

Le boycott reste un acte hautement symbolique qui ne demande aucun sacrifice seulement celui de se passer de ses habitudes alimentaires, vestimentaires ou d'hygiène corporelle pour un moment. Ne pas acheter systématiquement un produit dont une partie des bénéfices va directement dans le tiroir-caisse d'une armée qui tire sur des enfants de quatre ans. Ne pas boire un soda, ne pas avaler un yaourt, ne pas mettre un pantalon ou un déodorant dont les marques financent les armes et les écoles de religieux extrémistes dans le monde. Un geste simple qui ne demande ni un communiqué, encore moins un appel au djihad. Rien qu'entre vous et votre reflet.

Se dire que même si votre action paraît dérisoire, le fait de la voir se multiplier par deux, cinquante, mille et cent millions, elle trouvera toute sa mesure. Ne pas attendre le voisin pour l'imiter, commencez vous et le reste suivra. Commencez dès aujourd'hui à boycotter ces marques guerrières qui habillent et arment Tsahal pour qu'elle assassine femmes et enfants. Si vous ne le faites pas, alors sachez que vous allez dormir mal parce que au fond de votre conscience vous savez que votre inertie financera une autre balle qui se logera, peut-être demain, dans la tête d'un bébé palestinien. Ces enseignes labellisées sont connues de tous et un petit tour sur la Toile pourra vous renseigner sur ces marques présentes un peu partout. Tapez simplement «boycott des marques internationales qui soutiennent l'effort de guerre d'Israël» pour avoir une liste exhaustive de ces produits.

Quand on a une conscience, qu'on s'appelle Mohamed, Jésus ou Moïse, qu'on soit blanc, noir, jaune ou arc-en-ciel, que les images de cadavres d'enfants, de femmes et d'hommes désarmés, sans défense jonchent les rues éventrées d'un pays martyr, on ne peut que condamner. Crier son refus de cautionner un tel massacre à huis clos, dénoncer la barbarie et le terrorisme d'Etat d'Israël doit être le minimum syndical d'une lutte inégale. Valls, le Premier ministre français mais surtout ami d'Israël à qui il doit son poste à Matignon, a mis en garde contre la haine de l'Etat d'Israël. Une haine qu'il assimile tout bonnement à de l'antisémitisme. La boucle est bouclée, alors que des capitales arabes pressent le Hamas d'accepter le cessez-le-feu de la reddition, version mouloukhia égyptienne, la France vient de trouver la parade pour défendre l'Etat sioniste de toute critique. Aujourd'hui dire qu'Israël est un Etat terroriste équivaut à un acte antisémite. Alors je le dis haut et fort, Israël est un Etat assassin, criminel, terroriste quitte à ce qu'on m'accuse d'antisémitisme.