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Cherchell: L'éternelle panne des CCP

par Larbi Houari

Plusieurs dizaines voire une centaine de personnes pour la plupart du 3ème âge sont là, agglutinées en train d'attendre depuis huit heures du matin l'ouverture des portes de la poste de Kaïd Youcef, l'une des plus importantes glomérations de la ville de Cherchell.

Facilement reconnaissables à leur âge avancé et à leur dos voûté. Ils ont un regard attentif et vif guettant la moindre information les concernant. Parmi ce lot, on retrouve de vieilles dames, discrètes, effacées et patientes pour accéder à l'intérieur de la poste.

Il s'agit en fait de personnes retraitées, venues ce samedi 21 août pour percevoir leur pension de retraite. Il convient de rappeler que la Caisse nationale de retraite vire ces pensions à terme échu, en l'occurrence le 20 août. Or pour ce mois, le 20 août c'est le vendredi, la poste étant fermée. La cohorte de vieilles personnes agglutinées aux portes de la poste de Kaïd Youcef est impressionnante, car nous sommes en pleine période du Ramadhan, mois de piété mais aussi de dépenses faramineuses.

Les premiers qui se sont frayés leur chemin jusqu'au comptoir, sont tout fiers de se présenter devant le guichetier en alignant sagement leur pièce d'identité avec leur chèque, ou le formulaire qu'il faut remplir pour se faire payer avec la carte magnétique. Pourtant pour ce dernier cas, les difficultés sont identiques au chèque.

Le client est obligé de faire la chaîne, de se frayer un chemin jusqu'au comptoir, et enfin de remplir un formulaire s'il n'est pas illettré pour finalement arriver à aligner et disposer sagement son document et attendre son tour comme tous les autres. Faut-t-il préciser encore que le guichet unique n'existe pas ici.

Les premiers lots de vieilles personnes sont servis dès 09 heures 30.

A 12 heures 45, l'un des préposés au guichet informa les personnes présentes que «le système» est en panne. C'est la désolation et la panique .Un mouvement de réprobation et de mécontentement se fit ressentir. La chaleur torride qui régnait au sein du hall de la poste contribua à faire sourdre un bruit de colère. «Encore, ce système en panne. Pourtant nous sommes en 2010, on maîtrise l'informatique et l'électronique», s'insurgea un vieux, à l'air distingué, chemise d'été et porte-documents sous les bras, lui donnant l'air d'un fonctionnaire rompu aux textes et aux lois. Cette remarque fit éclater d'autres réprobations. «C'est curieux, ces pannes sont fréquentes ici à Kaïd Youcef, c'est bizarre», fit remarquer une vieille dame au regard belliqueux, en signe de désapprobation.

Il est 15 heures. Trois heures durant que le système est en panne. Personne n'y peut rien. Aucun responsable ne s'est engagé à donner une réponse catégorique et formelle. «Le système est toujours en panne», répond inlassablement un guichetier. La fermeture des guichets de la poste est prévue à 15 heures 30, nous affirma un vieux, accoudé au comptoir. A 15 heures 15, il y croit toujours pouvoir être payé. Sa carte d'identité ainsi que celle de trois autres personnes sont toujours là déposées et bien alignées. A 15 heures 20 minutes, nous nous sommes rapprochés d'un préposé au guichet, très calme en cette période particulière, qui répondit à nos interrogations d'un air courtois et affable: «la connexion fait actuellement défaut pour pouvoir payer ces gens tant pour notre poste que pour celle de Bordj El-Ghoula et pour celle de Sidi Ghiles. Mieux, ces pannes ont tendance à être régulières surtout les samedis», nous confie-t-il.

Dehors, la colère gronde, un groupe de citoyens s'est rapproché de nous en nous faisant part de leur colère : «Devant ce constat, est il admissible qu'il y ait absence de vigilance dans la maintenance du système, surtout lors du paiement des centaines de retraités, qui sont dans le besoin en cette période de mois sacré ? Peut-on tolérer qu'il y ait une telle indifférence ?», martela haut et fort un monsieur d'un âge avancé, dont la colère se voit au tremblement de ses mains noueuses. Une autre personne anonyme s'inquiéta devant ce qu'il qualifie «d'absence quasi-totale des autorités locales devant cet événement inopiné, inattendu, et de surcroît préjudiciable au citoyen et dont leur responsabilité est engagée».