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Les boulangers et les aisances de la vie

par Abdou BENABBOU

On est sans doute allé vite en besogne en affirmant que pendant la journée de l'Aïd et le long week-end qui a suivi, le circuit commercial a été bien huilé à la grande satisfaction des consommateurs. Pour ne pas déroger à la règle en de similaires circonstances voulues festives, et si un nombre de commerçants a obéi aux recommandations dictées par les autorités, le marché national s'est malheureusement fardé d'une triste pâleur. Une évidente logique s'est imposée et il devenait normal que le trou d'air commercial habituel pendant les jours de fête que les étals soient dégarnis d'autant que celle qui s'est déroulée a été empreinte de trois jours de relâche pour tout le monde. Il était prévisible que l'itinérance de milliers de travailleurs, bénéficiant légitimement de trois jours de congé, causerait des perturbations.

A Oran, le maillon faible a été les boulangeries, nonobstant l'offre normale et réduite des fruits et légumes. L'escapade des coutumiers des fours et du pétrin n'est pas en cause, mais la distorsion particulière vécue est due à un esprit et une mentalité ancrée chez la majorité des consommateurs. Le bât a surtout blessé la veille de l'Aïd, les ménages s'étant laissé emporter par une réelle furie, croyant opportun de parer à la préciosité du pain du lendemain.

Le spectacle offert avait quelque chose d'effarant pour offrir une véritable empreinte de famine qui n'existait que dans leurs cervelles et qu'ils tenaient à étaler. Cette dérégulation comportementale n'a pas sans raison permis de mettre le doigt sur une culture pressante mettant en exergue le regret des anciens et des grands-mères qui fulminent contre la disparition du pain pétri à la maison.

A juste titre, la vie moderne ne procure pas que des aisances de vie quand un ministre du Commerce lui-même soit obligé de recommander à la population de boycotter la banane qui trône en reine dans les marchés.