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Le monde est-il mauvais ?
Ou est-il ce qu'il est, et les êtres humains doivent-ils aller de l'avant comme
ils ont été conçus ? Il y a toutes sortes de mauvaises choses dans l'existence
des peuples. Les calamités naturelles comme les tremblements de terre, les
ouragans et aujourd'hui un problème de climat qui occupe le monde entier, les
guerres, les crises économiques, la pauvreté ; bref, des malheurs qui font
partie de la vie des peuples.
Mais est-ce pour cela que le monde est mauvais ? N'est-ce pas que c'est le mal qui nous pousse à avancer, à lutter pour l'existence ? D'autre part, lorsque les humains réussissent, ne sont-ils pas contents de leurs efforts, heureux dans leur vie ? Car, tout compte fait, c'est en sortant victorieux des vicissitudes de l'existence qu'ils se sentent libérés, libres, qu'ils ont influé sur leur destin Donc nous agissons sur notre histoire, nous ne pouvons croire que l'histoire est maîtresse de notre vie. Elle ne peut être maîtresse de notre vie que si nous n'opposons aucune résistance aux malheurs qui nous arrivent. Il y a, certes, des malheurs auxquels nous ne pouvons rien, comme les calamités naturelles, et encore pas toutes, le réchauffement climatique, par exemple, les hommes peuvent s'unir, s'entendre et lutter ensemble contre lui. De même, contre la mort qui vient, qui nous touche ou touche des êtres chers, on n'y peut rien. En revanche, d'autres malheurs qui nous arrivent, par exemple, des crises intérieures et peu importe leur objet, si le peuple est uni, s'il tait ses différences et en fait comme des richesses dans la diversité, ce peuple peut se défendre, peut y répondre rationnellement pour peu qu'il comprend les causes qui ont été à l'origine, et dès lors peut y répondre positivement. S'il ne comprend pas les causes et y va tête en avant sans comprendre, c'est aussi assumer ce qui peut découler en termes de désunion, d'égoïsme, chaque partie cherchera son intérêt et la crise peut s'aggraver. Ce peuple sera voué à la fatalité et tout peut survenir en termes de malheurs. Donc le peuple, dans toutes ses composantes, doit être rationnel. En cas de crise, il doit taire ses divisions et œuvrer pour l'unité de la nation. Donc privilégier le dialogue au sein du peuple. Peut-on dire que lorsqu'«un peuple qui ne se sauve pas par lui-même, par la réflexion sur ce qui lui arrive, par le dialogue, peut-il espérer d'être sauvé par Dieu ?» Il est évident que la grâce divine existe déjà en lui, puisque tout lui a été donné du pouvoir de penser à la liberté d'agir. Il revient à lui de trouver les solutions à la crise qui s'est ouverte. S'il n'y a pas de solution, si des passerelles ne sont pas posées, il doit assumer son destin et ce qu'il lui arrive. Regardons sur un plan philosophique pour comprendre l'essence des hommes, et donc des peuples. Rappelons la phrase énigmatique de Heidegger lors d'une interview accordée au grand quotidien allemand Der Spiegel le 23 septembre 1966 : « Seul Dieu peut encore nous sauver... » Cette phrase demeure aujourd'hui assez énigmatique tant les interprétations divergent. Un extrait de l'interview. Spiegel : Nous devons reconnaître que nous préférons être ici, et de notre vivant nous ne serons sans doute pas non plus obligés d'en partir ; mais qui sait si c'est la destination de l'homme d'être sur cette terre ? Il n'est pas impensable que l'homme n'ait aucune destination du tout. Mais en tout cas on pourrait voir aussi une possibilité de l'homme dans le fait que de cette terre il étende son emprise à d'autres planètes. Nous n'en sommes sûrement pas encore là d'ici longtemps. Simplement, où est-il écrit qu'il ait sa place ici ? Martin Heidegger : D'après notre expérience et notre histoire humaines, pour autant que je sois au courant, je sais que toute chose essentielle et grande a pu seulement naître du fait que l'homme avait une patrie (Heimat) et qu'il était enraciné dans une tradition. La littérature d'aujourd'hui, par exemple, est largement destructive. Spiegel : Le mot «destructif» nous gêne ici, entre autres raisons parce que le mot «nihiliste» a reçu de vous-même et dans votre philosophie un sens dont le contexte est très étendu. Cela nous frappe d'entendre le mot «destructif» rapporté à la littérature, que vous pourriez très bien ou même devriez considérer comme faisant partie de ce nihilisme. Martin Heidegger : J'aimerais dire que la littérature dont je parle n'est pas nihiliste dans le sens où je pense ce mot. (...) Spiegel : Bien. Alors une question se pose, naturellement : l'individu humain peut-il encore avoir une influence sur ce tissu d'événements qui doivent forcément se produire, ou bien alors la philosophie peut-elle avoir une influence, ou bien les deux ensemble, dans la mesure où la philosophie conduit l'individu ou plusieurs individus à entreprendre une action définie ? Martin Heidegger : (...) Si vous me permettez une réponse brève et peut-être un peu massive, mais issue d'une longue réflexion : la philosophie ne pourra pas produire d'effet immédiat qui change l'état présent du monde. Cela ne vaut pas seulement pour la philosophie, mais pour tout ce qui n'est que préoccupations et aspirations du côté de l'homme. Seulement un Dieu peut encore nous sauver. Il nous reste pour seule possibilité de préparer dans la pensée et la poésie une disponibilité pour l'apparition du Dieu ou pour l'absence du Dieu dans notre déclin, que nous ne fassions, pour dire brutalement les choses que «crever» ; que nous déclinions à la face du Dieu absent. Spiegel : Y a-t-il un rapport entre votre pensée et l'avènement de ce dieu ? Y a-t-il là, à vos yeux, un rapport causal ? Croyez-vous que nous pouvons penser ce dieu de manière à le faire venir ? Martin Heidegger : Nous ne pouvons pas le faire venir par la pensée, nous sommes capables au mieux d'éveiller une disponibilité pour l'attendre. Spiegel : Mais pouvons-nous aider ? Martin Heidegger : La préparation de la disponibilité pourrait bien être le premier secours. Le monde ne peut pas être ce qu'il est et comme il est par l'homme, mais il ne peut l'être non plus sans l'homme. Cela tient, d'après moi, au fait que ce que d'un mot venu de très loin, porteur de beaucoup de sens et aujourd'hui usé, j'appelle «l'être», est tel qu'il lui faut l'homme pour sa manifestation, sa garde et sa forme. L'essence de la technique, je la vois dans ce que j'appelle le Ge-stell, une expression souvent tournée en ridicule et peut-être maladroite. (...) Le règne du Ge-stell signifie ceci : l'homme subit le contrôle, la demande et l'injonction d'une puissance qui se manifeste dans l'essence de la technique et qu'il ne domine pas lui-même (...). Nous amener à voir cela : la pensée ne prétend pas faire plus. La philosophie est à bout. Spiegel : Dans le temps passé - et pas seulement dans le temps passé - on a tout de même pensé que la philosophie a beaucoup d'effets indirects, rarement des effets directs, mais qu'elle pouvait avoir beaucoup d'effets indirects, qu'elle a suscité de nouveaux courants. Si, à ne s'en tenir qu'aux Allemands, on pense aux grands noms de Kant, Hegel, jusqu'à Nietzsche, sans même parler de Marx, on peut faire la preuve que la philosophie, par des chemins détournés, a eu une énorme influence. Voulez-vous dire maintenant que cette influence de la philosophie a pris fin ? Et quand vous dites que l'ancienne philosophie est morte, qu'il n'y en a plus, est-ce que vous pensez en même temps que cette influence de la philosophie, si elle en a jamais eu, aujourd'hui en tout cas n'existe plus ? Martin Heidegger : Une autre pensée pourrait avoir une influence médiate, mais aucune directe d'une façon qui ferait dire que la pensée «cause» un changement de l'état du monde. Il est évident que Heidegger dans ce qu'il dit que «Seulement un Dieu peut encore nous sauver.», mais Dieu est déjà en nous. Comment pouvons-nous exister sans que l'on soit sans Lui ? Pouvons-nous penser par nous-mêmes ? Impossible ! Non par nous-mêmes dans le sens absolu, notre pensée ne nous appartient pas, elle est seulement en nous, et nous permet de vivre. Sans cette pensée qui est en nous et dont nous ne savons pas comment, nous ne pouvons vivre. Est-ce notre cerveau qui pense la pensée ou la pensée pense notre cerveau, on ne le sait pas, mais ce qu'on sait, c'est que c'est par notre pensée que nous existons. Quand nous nous arrêtons de penser, nous sommes morts, nous n'existons plus, comme si nous n'avons jamais existé sauf ceux qui restent vivants témoignent de notre existence. Et encore dans les temps longs, on aurait cessé d'exister dans les mémoires puisque les mémoires restées en vie seraient parties aussi. «Préparer dans la pensée et la poésie une disponibilité pour l'apparition du Dieu ou pour l'absence du Dieu dans notre déclin, que nous ne fassions, pour dire brutalement les choses que «crever» ; que nous déclinions à la face du Dieu absent.», en vérité, tout est inné dans l'existence. Pensée, poésie, disponibilité pour l'apparition du Dieu, existe en nous, sauf que la pensée ne le dévoile qu'à celui qu'elle veut. La pensée ne se commande pas. D'autre part, ce qu'on croit déclin par l'absence de Dieu, n'est que «réajustement» ou «avancée naturelle» de l'être. Et l'omniprésence de Dieu est partout dans sa Création, sauf qu'il faut comprendre sa pensée dans cette omniprésence de Dieu. C'est pourquoi à la question «Y a-t-il un rapport entre votre pensée et l'avènement de ce Dieu», Heidegger répondit «nous ne pouvons pas le faire venir par la pensée, nous sommes capables au mieux d'éveiller une disponibilité pour l'attendre.» Mais, c'est déjà une attente qu'énonce la pensée de Heidegger sans même que lui-même sache ce qu'exprime sa pensée dans l'attente de ce Dieu, qui est certainement beaucoup plus proche de lui-même qu'Heidegger n'est avec lui-même. Mais néanmoins sa pensée a été claire en «éveillant en lui une disponibilité pour l'attendre.» Dans l'existence de l'humanité, et du monde, il y a la main de Dieu, et cette «main qui est invisible» peut être visible par la pensée, par la «conscience». Dans le Coran, Sourate 16, An-Nahl (Les Abeilles), il est écrit au Verset 9 : «Il appartient à Allah [par Sa grâce, de montrer] le droit chemin car il en est qui s'en détachent. Or, s'Il voulait, Il vous guiderait tous.» Au Verset 93, «Si Allah avait voulu, Il aurait certes fait de vous une seule communauté. Mais Il laisse s'égarer qui Il veut et guide qui Il veut. Et vous serez, certes, interrogés sur ce que vous faisiez». Ce qui signifie que l'homme peut se rapprocher de Dieu pour peu qu'il le veuille, pour peu qu'il le cherche vraiment, pour peu qu'il cherche le sens de son existence, ses relations avec autrui et le monde. Quand Heidegger énonce : «Le monde ne peut pas être ce qu'il est et comme il est par l'homme, mais il ne peut l'être non plus sans l'homme.» C'est qu'il existe entre l'homme et le monde une telle symbiose que l'un ne peut aller sans l'autre. C'est par l'homme qu'il y a le monde, et par le monde qu'il y a l'homme. Sans l'homme, sans l'être et le non-être, il n'y a ni monde, ni vide, ni néant. Rien n'aurait existé. De la même façon, les peuples sont dans l'attente de leur Créateur. Sans penser que le Créateur qui les a créés est en eux à travers la «Grâce qu'Il leur a accordée». Mais les peuples comprendraient-il ce qu'est sa Grâce ? Les peuples passés, par exemple. Des peuples ont été réduits à l'esclavage par d'autres peuples puis sont redevenus libres. Des peuples ont été colonisés par d'autres peuples puis sont devenus indépendants. A qui doivent-ils leur libération ou leur indépendance ? A eux-mêmes ? A leur combat pour leur libération ? Assurément ! Mais essentiellement ? A la «Grâce» qui était en eux et à «l'histoire et au temps qui avançaient.» Ce qu'il faudrait dire «les êtres humains ne sont pas, ils deviennent par la Grâce qui est en eux». Ils ne sont jamais toujours eux-mêmes, ils ne peuvent être toujours eux-mêmes, parce qu'ils doivent avancer sans même qu'ils prennent conscience qu'ils ont avancé. Et pour désigner à travers les instances mentales des hommes, cette Grâce, et en prenant le court chemin, elle ne peut être que venant du Créateur, donc Dieu. Notre existence est redevable donc à Dieu. Et Dieu ne peut jamais être absent à notre existence. Une absence signifierait la fin de notre existence, ou encore notre retour, après notre mort, à Dieu. Dieu reprend ce qu'il a créé. «Tout ce que nous pensons, ce que nous faisons de bon ou de mauvais», Dieu forcément le sait. Et les textes bibliques l'Evangile, la Torah et l'Islam le confirment. «Nous avons créé l'homme ; nous savons ce que son âme lui suggère ; nous sommes plus près de lui que la veine [jugulaire] de son cou» (Coran : Sourate Qaf, Verset16). Dieu est plus proche de nous que nous de nous-mêmes. L'homme ne peut exister sans la Grâce qui est insufflée en nous-mêmes. Par conséquent, son existence devient une «ek-sistence » dont parle Heidegger, c'est-à-dire un être qui est à la fois inspiré par Dieu et libéré de Dieu par son libre-arbitre [octroyé par Dieu] mais aussi rattaché au dessein divin du monde. Et c'est là le miracle, l'homme produit par un détour ek-sistentiel fait l'histoire du monde. Et dans cette histoire humaine, l'action divine se déploie implicitement dans l'infinité des temps. Pour préciser par l'histoire des grands événements passés, les deux guerres mondiales qui ont été provoquées par les peuples européens, les ont-ils provoquées les peuples européens ou ce sont les pensées de leurs élites qui les gouvernaient qui les ont provoquées ? Assurément, ce sont leurs élites qui ont provoqué ces guerres. Hitler a-t-il provoqué la Deuxième Guerre mondiale ? Assurément, c'était lui. Mais c'était avant tout sa pensée. Et c'est sa pensée dans les desseins de la Pensée du monde qui lui a fait gravir les échelons pour être le Führer, et provoquer ce qui devait être. A suivre *Auteur et chercheur spécialisé en économie mondiale, relations internationales et prospective |
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