|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Sur la question de la gouvernance d'entreprise autour de laquelle il y a
une véritable floraison mimétique de définitions commises par la doctrine et
les enjeux liés à son ancrage universel, nous citons le code algérien de
gouvernance d'entreprise de 2009, pour livrer la synthèse ci-après:
«Dans son acception actuelle la gouvernance d'entreprise est une démarche managériale apparue dans les pays développés au début des années quatre-vingt-dix. Elle est venue répondre à un certain nombre de dérives constatées dans la gestion des sociétés cotées en bourse. Il s'agissait précisément de protéger les intérêts des petits porteurs de titres qui, en raison d'une structure très diluée de l'actionnariat, n'avaient aucune prise sur les organes de gestion et de contrôle de la Société. La démarche consiste à introduire rigueur et transparence dans la manière dont une entreprise est gérée, administrée et contrôlée, et de se procurer, ainsi, à ses propriétaires, notamment minoritaires, une protection ultime de leurs intérêts fondamentaux. Au fil des ans, le concept s'est étendu aux entreprises non cotées et a débordé les frontières des pays développés, pour s'imposer comme une innovation contemporaine majeure du management des organisations, en tant que discipline universelle ». La gouvernance d'entreprise fait aussi référence aux relations entre la Direction d'une Entreprise, son Conseil d'Administration, ses Actionnaires et d'autres parties prenantes. Elle détermine également la structure par laquelle, sont définis les objectifs de l'Entreprise, ainsi que les moyens de les atteindre et d'assurer une surveillance des résultats obtenus. La RSE, qui est un mécanisme important de la bonne gouvernance, est une démarche de responsabilisation, née dans le monde industrialisé, en réponse aux pressions exercées par la Société civile (ONG, Associations) sur les entreprises pour les inciter voire les obliger à prendre en charge les aspects sociaux et écologiques liées à leurs activités économiques. Cette préoccupation était déjà à l'ordre du jour du Sommet de la terre de Johannesburg en 2002, qui confirme et précise à la fois la demande internationale de prise en charge environnementale formulée dès le début des années 70, par suite de la sonnette d'alarme écologique tirée par le Club de Rome et la conférence de Stockholm. Selon Mme Laurence Parisot Ex-Présidente du MEDEF : « la pratique de la RSE est aussi une façon de s'adapter aux attentes des parties prenantes : c'est une réponse à l'évolution de la demande sociale. En effet la durabilité, d'une entreprise ne dépend pas uniquement de sa maitrise de la gestion courante mais également de son aptitude à anticiper les besoins et les crises et donc à prendre au bon moment les bonnes orientations qui la prémuniront des instabilités futures et lui permettront de saisir les opportunités de demain». Au fait que recouvre l'abréviation RSE et quel est son contenu ? A) LA RESPONSABILITE SOCIETALE DE L'ENTREPRISE: Une définition au pluriel Cette définition au pluriel est celle émanant d'organisations internationales et régionales. A ce propos, nous évoquerons les définitions institutionnelles ci-après : L'Organisation Internationale du Travail (OIT) : «la RSE traduit la façon dont les entreprises prennent en considération les effets de leurs activités sur la société et affirment leurs principes et leurs valeurs, tant dans l'application de leurs méthodes et procédés internes que dans leurs relations avec d'autres acteurs. La RSE est une initiative volontaire dont les entreprises sont le moteur et se rapporte à des activités dont on considère qu'elles vont plus loin que le simple respect de la loi». L'Organisation pour la Coopération et le Développement Economique (OCDE) : «la responsabilité des entreprises va au-delà de la fonction essentielle de réalisation d'activités commerciales. Les entreprises sont censées se conformer aux diverses lois qui leur sont applicables et, sur le plan pratique, elles doivent souvent répondre à des attentes sociétales qui ne sont inscrites dans le droit formel ». La Commission Européenne : « la RSE est l'intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités commerciales et à leurs relations avec toutes les parties prenantes internes et externes (actionnaires, personnels, clients, fournisseurs et partenaires, collectivités humaines?), et ce, afin de satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables et d'investir dans le capital humain et l'environnement ». Le Ministère Français de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement Durable : «la RSE est la déclinaison des principes du développement durable à l'échelle de l'entreprise. Elle signifie essentiellement que les entreprises, de leur propre initiative, contribuent à améliorer la société et à protéger l'environnement, en liaison avec les parties prenantes ». A première vue, ces définitions paraissent faciles à comprendre. Elles mettent l'accent sur des mots clés tels que : effets des activités économiques sur la société, affirmation des valeurs et principes, initiative volontaire, relations avec les parties prenantes internes et externes, satisfactions aux obligations juridiques, investissement dans le capital humain et l'environnement. Elles ont l'avantage d'éclairer sur l'étendue du champ couvert par la RSE et de comprendre la diversité des acteurs (Etat, Actionnaires, Managers, Clients, Citoyens des communautés locales, Travailleurs, Syndicats, Fournisseurs, Banques, Investisseurs, Compagnies d'assurances) et intérêts portés par ce groupe varié d'acteurs, avec lesquels l'entreprise se doit désormais de composer pour une meilleure acceptabilité sociale de son activité. En Algérie, les axes constitutifs de la démarche RSE sont fondamentalement au nombre de quatre : -les mesures pour veiller au respect par les entreprises des droits humains et du travail : droit des travailleurs de former un syndicat, procédure de traitement des conflits sociaux, création d'un environnement de travail sain, citations à comparaitre et poursuites engagées contre les entreprises pour violation de la législation du travail ; -les actions environnementales et sociales de quelques entreprises publiques (SONATRACH, SONELGAZ) et des entreprises privées nationales et étrangères ; -la mise en œuvre des instruments de prévention des atteintes à l'environnement (système de management environnemental, Charte de l'Entreprise, Délégations à l'environnement, contrats de performance) ; -et la mise en œuvre de la politique environnementale industrielle (traitement de l'amiante, du mercure, des boues de zinc, des pesticides périmées, des huiles usagées, des déchets cyanurés, des produits pharmaceutiques périmés, des déchets ultimes). En référence aux termes du chapitre 3 intitulé Gouvernance des Entreprises du Rapport National d'Autoévaluation de l'Algérie de novembre 2006, il est possible d'observer quelques résultats en matière de RSE au niveau de la liberté d'association , du droit syndical reconnu à tous les citoyens, du droit de grève, de la protection de la santé , du droit au repos, du droit au travail, du droit à la protection, , à la sécurité et à l'hygiène dans le travail puisque : a)La Constitution de 1996 consacre les principes qui fondent la nouvelle législation du travail qui a commencé à produire ses effets dès 1990 ; b)Les lois sociales de 1990 qui sont la source essentielle du droit du travail ont pour référence les conventions internationales de l'OIT ratifiées par l'Algérie (55 sur 59 sont en vigueur) ; c)Le conflit collectif est en principe pris en charge par la loi N°90-02 du 06 février 1990, modifiée et complétée qui le définit comme tout désaccord relatif aux relations socioprofessionnelles et aux conditions générales de travail entre les travailleurs et l'employeur ; d)La loi N°88-07 du 26 janvier 1988 relative à l'hygiène, la sécurité et à la médecine du travail, qui prévoit des mécanismes de prise en charge des problèmes de nuisances sur le lieu de travail ; e)La mise en œuvre par les entreprises du secteur de l'Energie et des Mines du Programme d'Actions du Projet d'Investissement Social 2003. Ce programme a embrassé plusieurs domaines : la formation professionnelle : actions de formation de SONELGAZ qui ont représenté entre 4,5 et 5% de sa masse salariale en période normale et 7,5 et 9% en période de développement alors que le ratio légal minimal est fixé à 1%, SONATRACH : bourses à l'Etranger pour le 3eme cycle, l'éducation, le désenclavement, la santé, la mise en valeur agricole, le sport et la culture. La RSE en Algérie semble pour l'instant n'être qu'une préoccupation de l'Etat et d'un nombre très limité d'entreprises nationales et étrangères. Même si les pouvoirs publics sont en droit d'espérer à moyen terme, une meilleure dynamique en la matière, au regard des efforts notables consentis, force est de relever que la contribution des syndicats, des associations et des nombreuses entreprises privées reste mineure, pour ne pas dire pratiquement inexistante. B) EXPERIENCES D'ENTREPRISES EN AUDIT RSE Relater les expériences d'entreprises ayant conduit des missions d'audit RSE, répond à une logique de vulgarisation et de promotion d'une démarche socialement responsable qui introduit de bonnes pratiques d'une part et qui peut inspirer et susciter la mise en œuvre de vocations managériales semblables ou plus développées au sein d'organisations , parmi lesquelles l'entreprise algérienne, acquises à une RSE plus reconnue et plus légitime d'autre part. Les expériences rapportées dans la présente contribution s'inspirent principalement des travaux de M.M Jacques Igalens et Jean Marie Peretti. B.1. NIKE OU L'ORIGINALITE D'UNE DEMARCHE DE RUPTURE La société Nike fut l'une des premières sociétés à être interpellée sur le fondement de l'article 17200 du Business and Profession Code de l'Etat de Californie (qui donne au consommateur la possibilité d'intenter une action contre tout opérateur économique aux pratiques déloyales, trompeuses ou illégales). Nike a été conduit devant un tribunal californien en 2003, du fait d'un activiste des droits de l'homme du nom de Kasky qui lui reprochait d'avoir tenu des propos « trompeurs» en réponse aux accusations sur les conditions de travail de certains de ses employés dans ses usines à l'étranger, alors même que l'employeur n'était pas dans l'obligation de répondre aux accusations en question. L'affaire a failli atteindre la Cour suprême des États-Unis. Cependant, une transaction est intervenue entre les parties entre-temps, impliquant un paiement d'un million et demi de dollars par Nike à l'association américaine Fair Labor Association, sans bien entendu que Nike ne reconnaisse un quelconque manquement à l'article 17200. Les abus en Californie ont d'ailleurs été tels qu'une loi a été adoptée à l'automne 2004 afin de restreindre les actions en justice sur ce fondement en exigeant que les consommateurs établissent un préjudice personnel résultant de la pratique incriminée. Le code de conduite de Nike date de 1992 et il est demandé aux quelques 150 fournisseurs et sous-traitants des marques Nike et Jordan de le traduire dans leurs langues nationales, ainsi que d'assurer des formations à son sujet. Nous prendrons l'exemple du travail des enfants: dans son code de 1998, Nike a imposé à ses fournisseurs de fixer l'âge minimum à 16 ans pour le vêtement et à 18 ans pour les chaussures, ce qui était une exigence plus élevée que celle figurant dans le code précédent de 1991, et plus élevée également que celle de l'OIT qui est fixée à 15 ans. Le code de Nike stipule que si un fournisseur ou un sous-traitant emploie un travailleur en dessous de ces âges, il doit le retirer du lieu de travail et continuer à le payer, il doit le scolariser, puis lui offrir un emploi lorsqu'il atteint l'âge requis. Mais, ainsi que le reconnaît Nike, si les exigences et la politique sont claires, le contrôle est difficile car les enregistrements comportant les dates de naissance peuvent être falsifiés. Par ailleurs, la scolarisation n'étant pas forcément obligatoire après 15 ans dans certains des pays concernés, le jeune entre 15 et 16 (ou 18) ans est poussé par les exigences de Nike vers le secteur informel et donc il est moins protégé ... B.2 CARREFOUR : UNE DEMARCHE DE PARTENARIAT ONG/ENTREPRISE Avec onze enseignes de la distribution (Auchan, Casino, Cora, Leclerc, Monoprix, Camif, etc.), Carrefour est engagé dans l'initiative « clause sociale» destinée à inciter les fournisseurs à respecter les principes universels des droits de l'Homme et la réglementation sociale locale dans leurs unités de production. Cette initiative permet de mettre en commun les résultats d'audits sociaux de conformité autour de neuf thèmes (travail des enfants, travail forcé, discrimination, pratiques disciplinaire, harcèlement ou mauvais traitements, liberté d'association, heures de travail, salaires et avantages, santé et sécurité). Ils sont confiés à des cabinets d'audit tels que le bureau Veritas, CSCC, Intertek et SGS. Carrefour a souhaité aller plus loin en nouant un partenariat avec la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) dans le but de: sensibiliser et former le personnel de l'entreprise et de ses fournisseurs ; participer à la définition d'une politique RSE; apporter une expertise, des connaissances spécifiques; définir des indicateurs de progrès; accompagner sur le site. L'objectif de Carrefour était de concrétiser l'engagement proclamé du groupe en faveur des droits de l'Homme. L'objectif de la FIDH était double, contribuer à l'amélioration des droits de l'Homme au niveau local et approfondir une expérience lui permettant d'appréhender le fonctionnement d'un groupe multinational. C) RSE /DROIT DU TRAVAIL ET AUDIT INTERNE EN ALGERIE: bilan et perspectives pour une gouvernance socialement responsable C.1 : LE NOUVEAU DROIT DU TRAVAIL : enjeu d'une appropriation managériale plus responsable Le Droit du travail actuellement en vigueur en Algérie, a opéré dès sa mise en œuvre en 1990 une véritable rupture par rapport à la législation et à la réglementation du travail antérieures à l'année 1990 ; année pendant laquelle furent promulguées cinq lois qui constituent désormais la nouvelle trame juridique des relations de travail (lois sur les relations de travail ; la prévention et le règlement des conflits de travail et l'exercice du droit de grève ; l'exercice du droit syndical ; le règlement des conflits individuels de travail et l'inspection du travail). Ces nouvelles lois sociales, amendées en 1991, 1994, 1996,1997, 2000, 2006 visent en effet à modifier profondément les relations de travail en introduisant certains principes nouveaux qui vont assurer le passage d'une gestion que l'on pourrait appeler étatique de la force de travail à une forme contractuelle/ concurrentielle de cette gestion. Le désengagement relatif de l'Etat, la libre expression des employeurs et des salariés et la gestion contractuelle de la force de travail apparaissent comme le triptyque sur lequel repose désormais cette nouvelle législation. La loi 90/11 du 21 Avril 1990 modifiée et complétée, relative aux relations de travail a abrogé en effet les dispositions de l'ordonnance N° 71/74 du 8 novembre 1971 relative à la gestion socialiste des entreprises et lui substitue outre des organes de participation (Comité de Participation) de nouvelles règles de jeu basées sur les négociations collectives (conventions collectives). Elle abroge également le Statut Général du Travailleur (S.G.T, loi N°78/12 du 5 août 1978) dont elle garde toutefois certaines dispositions telles celles relatives aux œuvres sociales ou à la retraite. La loi N°90/11 portant relations de travail, consacre par ailleurs le droit de négocier comme un droit désormais accordé aux salariés ainsi qu'aux employeurs. Avec la nouvelle législation du travail, nous assistons à une véritable réhabilitation des relations de travail contractuelles. Il ressort clairement de ces énoncés introductifs que le nouveau dispositif juridique régissant le Monde du Travail en Algérie, est venu pour sanctionner l'existence D'ACTEURS SOCIAUX AUTONOMES, en précisant leurs prérogatives et en encadrant l'exercice de leurs pouvoirs au travers notamment de la négociation sociale qui est la nouveauté majeure des lois sociales de 1990 par l'entremise de laquelle, les dits acteurs œuvreront à l'émergence et à l'élaboration d'un droit du travail de source professionnelle. Dans ce nouveau décor normatif, qui est venu imposer une rupture fondamentale par rapport à l'ancienne législation de travail (le SGT à titre principal), qui était au centre des débats depuis 20 ans, une question basique mérite d'être soulevée : Est ce que le législateur algérien fait cas ou non de la RSE ? Pour y répondre, notre analyse sera restreinte à la loi N° 90/11 du 21 Avril 1990 modifiée et complétée, relative aux relations de travail, qui est considérée par les professionnels du droit du travail en Algérie, comme la pierre angulaire du droit du travail algérien et ce au travers d'un certain de ses dispositions qui renvoient à quelques facettes clés de GRH, telles que : le recrutement, la formation professionnelle, la promotion et les œuvres sociales. C.2 : CONSTATS Au regard de la loi N°90/11 du 21Avril 1990 modifiée et complétée, relative aux relations de travail, la RSE saisie comme pratique professionnelle se résume en une simple mise en conformité avec les normes énoncées par la loi-référence. Il est ressort de l'examen minutieux des dispositions de la loi N°90/11 du 21 Avril 1990 modifiée et complétée, relative aux relations de travail, que la responsabilité sociale de l'entreprise algérienne se résume dans le développement et la mise en œuvre d'activités sociales étroitement conformes avec les obligations énoncées par la loi. En filigrane, est disséminé un esprit RSE exprimé à minima, puisque confiné à la conformité légale. Ainsi les articles 5 et 6 de la loi N°90/11 astreignent l'entreprise au respect des droits fondamentaux des travailleurs salariés rappelés ci-après : -Exercice du droit syndical, -Négociation collective, -Participation dans l'organisme employeur, -Sécurité sociale et retraite, -Hygiène, sécurité et médecine du travail, -Repos, -Participation à la prévention et au règlement des conflits de travail, -Recours à la grève, -Occupation effective, -Respect de l'intégrité physique et morale et de la dignité, -Protection contre toute discrimination pour occuper un poste autre que celle fondée sur l'aptitude et le mérite, -Formation professionnelle et la promotion dans le travail, -Versement régulier de la rémunération qui est due, -?uvres sociales, -Tous avantages découlant spécifiquement du contrat de travail. Le SGT, promulgué en 1978 qui a été abrogé par l'article 157 de la loi N°90/11 consacre de manière détaillée, tout un chapitre (26 articles dédiés aux droits du travailleur). Nous citons les articles 10, 11 et 16 qui explicitaient déjà (en 1978), à notre sens les fondements constitutifs d'une approche RSE à forger et à consacrer dans les pratiques de l'entreprise «socialiste» algérienne de l'époque. Article 10 : «L'Etat assure la stabilité et la sécurité de l'emploi à tous les travailleurs dans les conditions prévues par la présente loi et par les textes d'application qui en découlent», Article 11 : «Chaque travailleur a droit au développement de sa personnalité au plan physique, moral, culturel et professionnel», Article 16 : «Le travailleur bénéficie de tous les droits que la loi lui confère en matière d'œuvres sociales. L'organisme employeur doit réunir les conditions d'exercice de ces droits .Elles doivent être les plus aptes à permettre au travailleur d'accéder au bien-être physique, moral et culturel». En rapport avec la problématique abordée, il sera procédé à une forme de revue normative centrée sur les activités recrutement, formation, promotion et œuvres sociales et ce aux fins de déceler et d'y puiser des éléments de traçabilité devant servir de référentiel pour consacrer cet état d'esprit RSE devant inspirer au-delà de ce qui relève du légal, la conviction managériale d'investir de manière significative dans cette culture nécessaire de la RSE . 1/ LE RECRUTEMENT : La question du recrutement est mise en exergue au niveau des articles 15, 16 et 17 de la loi N°90/11. Article 15 : «L'âge minimum requis pour un recrutement ne peut en aucun cas être inférieur à seize ans, sauf dans le cadre de contrats d'apprentissage établis conformément à la législation et à la réglementation en vigueur. Le travailleur mineur ne peut être recruté que sur présentation d'une autorisation établie par son tuteur légal. Le travailleur mineur ne peut être employé à des travaux dangereux, insalubres et nuisibles à sa santé ou préjudiciables à sa moralité». Article 16 : «Les organismes employeurs doivent réserver des postes de travail à des personnes handicapées selon des modalités qui seront fixées par voie réglementaire». Article 17 : «Toute disposition prévue au titre d'une convention ou d'un accord collectif, ou d'un contrat de travail de nature à asseoir une discrimination quelconque entre travailleurs en matière d'emploi, de rémunération ou de conditions de travail, fondée sur l'âge, le sexe, la situation sociale ou matrimoniale, les liens familiaux, les convictions politiques, l'affiliation ou non à un syndicat, est nulle et de nul effet ». 2/ LA FORMATION PROFESSIONNELLE : Elle est évoquée par les articles 57, 58, 59 et 60 de la loi N°90/11. Article 57 : «Chaque employeur est tenu de réaliser des actions de formation et de perfectionnement en direction des travailleurs selon un programme qu'il soumet à l'avis du comité de participation. L'employeur est tenu également, dans le cadre de la législation en vigueur, d'organiser des actions d'apprentissage pour permettre à des jeunes d'acquérir des connaissances théoriques et pratiques indispensables à l'exercice d'un métier». Article 58 : «Tout travailleur est tenu de suivre les cours, cycles ou actions de formation ou de perfectionnement organisés par l'employeur en vue d'actualiser, d'approfondir ou d'accroitre ses connaissances générales, professionnelles et technologiques». Article 59 : «L'employeur peut exiger des travailleurs dont les qualifications ou les compétences le permettent, de contribuer activement aux actions de formation et de perfectionnement qu'il organise». Article 60 : «Sous réserve de l'accord de l'employeur, le travailleur qui s'inscrit à des cours de formation ou de perfectionnement professionnels, peut bénéficier d'une adaptation de son temps de travail ou d'un congé spécial avec une réservation de son poste de travail». 3/ LA PROMOTION : Elle est prévue à l'article 61 de la loi N°90/11/. Article 61 : « La promotion sanctionne une élévation dans l'échelle de qualification ou dans la hiérarchie professionnelle. Elle s'effectue compte tenu des potes disponibles, de l'aptitude et du mérite du travailleur ». 4/ LES ?UVRES SOCIALES : Citées à l'article 94 de la loi N°90/11, parmi les attributions dévolues au comité de participation, les œuvres sociales sont encadrées par le décret N°82-179 du 15 mai fixant le contenu et le mode de financement des œuvres sociales (dont le contenu a été modifié et complété par les décrets exécutifs N°94/186 du 06/07/1994 et N°96/74 du 03/02/1996). Il est stipulé à l'article 2 du décret N°82-179 que : « sont considérées comme œuvres sociales au sens du présent décret, toutes actions ou réalisations tendant à contribuer à l'amélioration du bien-être physique et moral des travailleurs par un complément à la rémunération du travail sous forme de prestations en matière de santé, de logement, de culture et de loisirs et, de en règle générale, toutes mesures à caractère social visant à faciliter la vie quotidienne du travailleur et de sa famille ». Aux termes de cette présentation autour de l'éventuelle prise en compte de la thématique RSE par le Droit du travail algérien circonscrit à la loi N°90/11 du 21 Avril, modifiée et complétée, relative aux relations de travail, force est de constater que : -Le thème de la RSE n'est pas consacré de manière formalisée, au sein du droit de travail algérien. Il est clair que la RSE ne se décrète pas. Elle doit par contre, résulter d'une conviction de gouvernance (Conseil d'Administration/ Direction Générale) acquise à ses enjeux. -Mise à part, un nombre réduit de grandes entreprises publiques et privées qui ont décidé d'engager de leur propre initiative des actions non énoncées par la loi, la RSE ne constitue pas une préoccupation managériale de premier plan, n'est pas suffisamment répandue et son ancrage volontaire au sein des entreprises algériennes et par là son évolution restent à faire. -Le droit du travail algérien qui est fortement imprégné des normes internationales de l'OIT, impose à tout employeur le respect des droits fondamentaux des travailleurs salariés. Ces droits au nombre de 15, peuvent être au-delà du strict respect conforme de la règle de droit, de véritables chantiers propices à l'appropriation par le management des enjeux réels de la RSE d'une part et à l'ancrage graduel sous l'impulsion avisée du Conseil d'Administration, relayée volontairement par celle du TOP Management avant tout, d'une culture RSE à conforter. C.3 : L'ACTION DE L'AUDIT INTERNE L'apport de l'audit interne, sollicité dans sa dimension sociale serait salutaire pour s'assurer de l'état effectif de la mise en œuvre sur le plan de la conformité de l'esprit RSE implicitement énoncé au niveau des principales dispositions du droit du travail algérien. Guidé dans sa mission par la maitrise de la démarche méthodologique de l'audit interne, par son objectivité , son souci permanent d'éthique et sa compétence technique et comportementale, l'auditeur social imprégné des enjeux liés à la question RSE devrait pouvoir mettre en évidence, les insuffisances en matière de RSE car il existe un large décalage entre l'œuvre normative et la réalité des faits, ce qui constituera réellement un véritable challenge pour sa discipline de rattachement, qu'est l'audit interne et un enjeu certain de dépassement de son périmètre d'intervention au service d'une organisation réellement convaincue et acquise à une promotion véritable d'un management socialement responsable. L'exigence de dépassement qui requiert du courage pour dire les faits établis, annoncer des recommandations fortes et pertinentes pour permettre l'éclosion d'une âme managériale acquise à la RSE et d'être à ce sujet un véritable éveilleur d'une conscience sociale sans taches, propre à l'organisation algérienne, est plus affirmée pour l'auditeur interne évoluant au sein surtout de l'entreprise privée, qui ne fait rien pour amorcer un rapprochement inévitable et plus que nécessaire avec la démarche RSE. L'action de l'auditeur social pour y remédier par l'entremise de recommandations considérées comme actions de progrès devant interpeller l'entreprise algérienne et son management à une vraie prise de conscience en matière de RSE. Ces recommandations qui plaideraient à juste titre pour l'émergence d'un « management » socialement responsable devraient mettre l'accent, sur la nécessité de développer la dimension opérationnelle de la RSE au niveau des organisations algériennes, telles que : - Travailler à convaincre et à « vendre » au Conseil d'Administration et au Chef d'entreprise, par le biais des recommandations, les avantages pour l'organisation en termes entre autres de gouvernance socialement responsable, induits par la démarche RSE appliquée au droit du travail et ce au titre d'un contrat moral pérenne porté et défendu par le chef d'entreprise, contrat qui se place bien avant l'obligation légale énoncée de manière impérative par le législateur, - Initier une démarche pédagogique, acceptée par la Direction Générale, pour « vulgariser » voire populariser auprès des différents niveaux hiérarchiques la RSE et ses enjeux, - Proposer l'élaboration d'une charte RSE qui portera la signature du premier responsable de l'organisation, qui sera affichée au niveau des différents lieux de travail et dont le contenu sera explicité à fond et de manière récurrente à l'ensemble du personnel et ce pour corriger un véritable déficit pédagogique et informationnel tant au niveau de l'entreprise privée que publique, - Identifier avec l'aval de la Direction Générale, les acteurs (managers de proximité, représentants des travailleurs) dont on devrait attendre une intervention particulièrement active dans le cadre de la mise en œuvre de la RSE, les former sur la thématique RSE pour les mobiliser en tant compétences relais pour que s'opère à l'intérieur des organisations algériennes , une logique nouvelle forgée dans la culture citoyenne de la RSE à savoir celle de la rupture par rapport aux insuffisances relevées qui altèrent la notoriété et l'image de marque de l'organisation, telles que : conditions d'hygiène et de sécurité déplorables, violation caractérisée des droits fondamentaux, négation pour ne pas dire bannissement de la représentativité syndicale, recul manifeste du budget dédié à la formation, refus délibéré de procéder à la déclaration des salariés à la Caisse de sécurité sociale, etc ? Ce volet formation peut prendre la forme de journées d'études, séminaires consacrés à des thématiques RSE, conduites par les professionnels du mouvement associatif , avec le concours de spécialistes seront des espaces appropriés pour créer et susciter au niveau des organisations algériennes , des centres d'intérêts auprès des différentes parties prenantes de l'entreprise aux fins de favoriser l'émergence et la diffusion des bonnes pratiques RSE. - Suggérer l'introduction du thème RSE parmi les points éligibles à la négociation sociale, - Inscrire la RSE appliquée au droit du travail, comme thème incontournable devant figurer au niveau du bilan social qui mérite d'être codifié pour affirmer de par la force de la loi, son caractère obligatoire au sein de l'entreprise algérienne, - Programmer et dérouler des missions périodiques d'audit RSE pour disséminer et conforter dans le cadre d'une pratique sereine et responsable, la culture naissante RSE. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES : -Benamrouche, A (1994). : Le nouveau droit du travail en Algérie. 1ere édition. Editions HIWARCOM (1994). -Boudjema , R (2009) : Violence du capitalisme ; développement durable et responsabilité sociétale des entreprises. ACLCOM Editions 2009. -Code Algérien de Gouvernance d'Entreprise. Edition 2009. CARE/Forum des Chefs d'Entreprises/ apab. -Igalens, J et Peretti, J.M (2008) : Audit Social ; EYROLLES Editions d'Organisation. 2008. -Liabes, D (1994) : Du statut au contrat : vers de nouveaux rapports sociaux. Revue algérienne du travail N°21 janvier 1994. -MEDEF, (2012) : Guide CAP vers la RSE ; faire de la responsabilité sociétale de l'entreprise un levier de performance. Juin 2012. -Meziane, M (1994) : Audit du règlement intérieur du 14 août 1991. Document de synthèse présenté en juillet 1994 auprès du jury ESSEC Paris, pour l'obtention du Certificat d'Auditeur Social et Juridique. -Rapport sur l'état de mise en œuvre du programme d'action national en matière de gouvernance. MAEP/Point Focal National Novembre 2008. * Consultant Formateur GRH/Audit Interne. Auditeur Social et Juridique ESSEC.Paris. |
|