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Le prix du poulet flambe

par A. Zerzouri

Le marché des viandes blanches s'affole. Après avoir enregistré une chute libre des prix ces derniers mois, descendant jusqu'à 180 dinars le kilo, le poulet s'est fait des ailes plus solides durant ces premiers jours de la saison estivale. Hier, sur les marchés de Constantine, le prix du poulet a atteint les 360 dinars le kilo, enregistrant une flambée jamais vécue par le passé, selon l'aveu des commerçants eux-mêmes. «Le prix du poulet a connu une hausse de 80 dinars en l'espace de deux journées coïncidant avec ce dernier week-end», nous a indiqué un vendeur installé au marché Boumezzou, considéré comme un baromètre des prix des viandes blanches. Interrogé sur les raisons de cette brusque envolée des prix du poulet, notre interlocuteur lancera la balle dans le camp des aviculteurs, désignés comme responsables de ces augmentations. «Ce sont les éleveurs qui ont augmenté le prix de vente en gros, en fixant le kilo à 320 dinars ces deux derniers jours», affirment des vendeurs détaillants installés dans les deux marchés du centre-ville de Constantine, Boumezzou et Bettou en l'occurrence. Les ménages, qui n'en revenaient pas de voir cet affichage de prix, jugé très excessif, considèrent que cette hausse des prix du poulet est décidée d'une façon arbitraire et que cela cache mal une volonté vengeresse contre le consommateur, sur le dos duquel on compte récupérer «les pertes» accusées par les aviculteurs ces derniers mois. Le poulet qu'on achetait il y a quelques semaines à 250 dinars, revient aujourd'hui à plus de 600 dinars ! «Comment se fait-il que le prix du kilo de poulet saute de 230 dinars jusqu'à 360 dinars en une journée ?», s'interroge sur un air sévère un client devant le comptoir frigorifique d'un vendeur de poulet au marché Boumezzou. Le vendeur lui rétorquera qu'il a lui aussi payé chèrement le prix sur le marché de gros. Questionné sur ces «sautes d'humeur» des prix du poulet, l'ex-président de l'association des aviculteurs, M. Bahi, explique ce phénomène par «la pression exercée sur le marché suite à une forte demande saisonnière, provoquée par les organisateurs des fêtes de mariage notamment» d'une part, et d'autre part, il ne manquera pas de soulever les problèmes des professionnels du secteur, «totalement livrés au chaos d'un marché qui n'obéit plus à aucune règle d'éthique commerciale depuis l'arrivée de nouveaux aviculteurs sans foi, ni loi, qui n'ont aucun souci pour veiller à l'organisation du marché». D'ailleurs, indique-t-il, il n'y a plus d'association des aviculteurs, car la plupart ont déclaré faillite face à la concurrence déloyale imposée par les éleveurs des serres en plastique, qui sont non identifiés et constituent aujourd'hui près de 70% du taux global des professionnels, c'est-à-dire qu'il reste 30% seulement qui pratiquent encore l'élevage dans des bâtiments appropriés et dans le respect des conditions environnementales. Ainsi, l'arrêt de production décidé par plusieurs aviculteurs, dont le nombre est insoupçonné, est derrière cette instabilité des prix du poulet. «La demande a augmenté et la production a baissé, cela ne peut qu'entraîner une spirale infernale des prix», lâchera-t-il. Sur un autre registre, plusieurs aviculteurs dénoncent la qualité du poulet, nourri au pain rassis dosé en sel et aux corticoïdes afin de lui faire prendre du poids en quelques jours, aux dépens de la santé du consommateur. Enfin, le prix du poulet qui a pris l'envol n'est pas près de redescendre de sitôt. Le Ramadhan est à nos portes, et la demande qui va connaître encore plus de pression risque «de doper» les prix à leur plus haut niveau.