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![]() ![]() ![]() ![]() Tout y était pour
un coup d'envoi correct de la seconde édition du Festival de la chanson
oranaise. Sauf le public. Ni le climat doux de la soirée d'avant-hier, ni la
présence des autorités locales accompagnées d'un service d'ordre pas trop
voyant, ni la gratuité de l'accès au Théâtre de verdure qui abrite cette
manifestation n'ont incité les familles, et encore moins les jeunes, à faire
honneur à une chanson attribuée à leur ville. Le label «chanson oranaise» que
certains responsables de la culture à Oran tentent de substituer à celui du raï
est tout simplement invendable. Pour des raisons faciles à élucider, le public
se reconnaît plus et mieux dans la musique et les paroles de Cheb Billal (dont
le passage au Théâtre de verdure remonte à quelques semaines) que dans ceux de
Baroudi Ben Khedda. Voilà une évidence qui ne mérite pas de démonstration.
Clairsemés en petits paquets au sein du Théâtre de verdure apparu du coup très
vaste, le public a suivi la prestation de quelques amateurs, filles et garçons,
mobilisés pour meubler une programmation tatillonne. Erreur fatale des
organisateurs qui n'ont pas su immobiliser les présents en annonçant les têtes
d'affiche de la soirée. Lassés des reprises maladroites des chansons d'Ahmed
Wahbi, un exercice devenu sorte de passage obligé pour tout chanteur débutant,
les spectateurs ont commencé à vider les lieux aux environs de minuit.
Autrement dit, au bout d'une petite heure de l'ouverture de cette seconde
édition de ce soi-disant festival. Au point où la soirée s'est presque
transformée à un moment donné en un spectacle destiné exclusivement au wali,
ses accompagnateurs et ses invités occupant les deux premiers rangs en face de
la scène.
Mais on retiendra le passage sur scène de quelques vieux routiers de la chanson que nous prenons le soin de ne pas affubler d'oranaise. Celui d'Assou, un musicien au théâtre de Sidi Bel-Abbès où il venait juste de prendre part au jury du Festival du raï. Il lui a fallu, lui aussi, terminer son passage par une reprise d'une chanson de Wahbi, pour pouvoir insérer sa prestation dans le cadre de la chanson oranaise. Autrement, le genre qu'il a présenté s'apparente davantage avec le style marocain qu'avec l'oranais. Un autre chanteur de Sidi Bel-Abbès (décidément !!) dont le style appartient franchement au chapitre raï est passé devant le public des «officiels» sans grande conviction : il s'agit du Cheikh Ennaâme qui a eu ses moments de gloire durant la précédente décennie. Cheikh Sanhadji d'Oran a essayé de ressusciter un vieux texte de cheikh Hamada, répertorié dans le genre bédouin, en reprenant «Biya dak el mor». Enfin, Baroudi Ben Khedda, qui a beaucoup plus discouru que chanté, s'est contenté de présenter un «cocktail» à partir du répertoire de Blaoui El Houari, présent sur les lieux. Mais on retiendra des propos de Baroudi que la chanson oranaise est représentée par les maîtres (Wahbi, Blaoui présenté par Baroudi en tant que père incontesté, Ahmed Saber dont on se limite à citer le nom) et un petit cercle d'héritiers, composé de Houari Benchenet, Baroudi Ben Khedda et un autre nom. Au fait, Baroudi a posé, peut-être à son insu, le problème de la transmission d'un genre à qui on veut insuffler une vie après l'extinction de ses initiateurs. Voilà, selon un responsable d'une institution culturelle présent lors de la première soirée, un débat que ce festival aurait pu initier dans le cadre d'une causerie ramadhanesque. Malheureusement, les organisateurs avaient la tête ailleurs. Le wali d'Oran leur a interdit de tenir ce festival dans une salle de cinéma et les a empêchés de le loger aux Arènes. Donc le choix du Théâtre de verdure a été retenu à la dernière seconde. Pour des interférences du même genre, la liste des participants a été élaborée, corrigée et revue plusieurs fois. Donc, jusqu'à la dernière minute, les organisateurs se sont embourbés dans ce genre de détail. Selon un Oranais, jaloux de tout ce qui se rapporte à sa ville, «au mieux, ce festival sera un remake de l'édition de l'année dernière. C'est-à-dire un fiasco...» La seconde soirée de ce festival, jeudi, a connu une meilleure affluence. Cependant, le public qui s'est déplacé au Théâtre de verdure à partir de 22 h 30 s'est caractérisé par sa mobilité et surtout par sa jeunesse. En dehors du carré des invités occupé par des familles, le reste de l'espace a été investi par des jeunes dont des enfants en bas âge. Des bandes d'adolescents se sont donné rendez-vous ou se sont retrouvés sur place. Certains d'entre eux n'ont raté aucune opportunité pour donner libre cours à leurs élans corporels et danser. «Vive l'ambiance», criait celui qui jouait au leader d'un groupe d'ados, espérant ou émettant le voeu de retrouver des rythmes de raï. D'ailleurs, on dirait que ces ados avaient rendez-vous avec Saïd Tata, venu d'Aïn Témouchent, parce que ses chansons parlent du «maghboun» et usent d'un langage presque ordinaire, il a réussi à accrocher la partie la plus jeune des spectateurs. Auparavant, Mesbah, reprenant une chanson de Wahbi et une d'Ahmed Saber, a été salué par un public, plus adulte, de connaisseurs. Abdelkader El Khaldi a clôturé la soirée, moins ennuyante que celle d'ouverture. |
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