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Quelles perspectives pour Belkhadem et Ouyahia ?

par Mohamed Ghriss

C'est parti avec le nouveau gouvernement du Premier ministre Abdelmalek Sellal que personne, apparemment, n'attendait au tournant et dont la nouvelle d'intronisation semble néanmoins, avoir été accueilli avec un certain satisfecit chez nombre de citoyens du pays et à l'extérieur.

En effet, ces derniers planquent, visiblement, sur la tendance technocrate et sorties fréquentes sur le terrain de ce politique connu pour son caractère moins bureaucratique et casanier. D'autre part la composante du nouveau gouvernement, quoique reconduisant la moitié du gouvernement antécédent, comprend toutefois trois éléments de nouveaux Partis d'opposition, de nouvelles têtes de divers courants d'appartenances politiques, quelques revenants et surtout l'écartement de personnalités notoires dont jusqu'ici l'inamovible ex ministre de l'Education, M. Abou Bakr Benbouzid. Bien sur, on retiendra surtout l'écartement du sécretaire général du FLN . M. Belkhadem que certains attendaient au gouvernement crédité des résultats des législatives en faveur de son Parti. Mais il n'en fut rien, il rejoint à la grande surprise les Yazid Zerhouni, Temmar, etc. naguère principaux animateurs du bastion pro-Bouteflika ! Il en est de même pour le Premier ministre sortant, M.Ahmed Ouyahia, que d'aucuns présentant son «évincement», s'attendaient en revanche, à le voir nommé à la tète de la diplomatie extérieure. Mais là encore les spéculateurs furent pris au dépourvu.

Il faut dire que la décision d' «écartement», de «limogeage», ou de «fin de fonction» ( appelez cela comme vous voulez) des deux hommes politiques de la composante du nouveau gouvernement a suscité l'étonnement des milieux politiques nationaux mais,par contre, elle a bien été accueillie par les adversaires de Belkhadem et Ouyahia : d'une part les redresseurs du FLN reprochent au secrétaire général du Parti d'avoir mal géré ses responsabilités au sein du FLN et encore moins fait preuve de compétence au gouvernement lorsqu'il y était nommé Premier ministre. D'autre part, du coté des dissidents du RND, il est reproché à Ouyahia d'avoir dirigé sa formation depuis son bureau étatique et non pas au contact des réalités qui le cernaient quotidiennement. D'où le mouvement de contestation RNDiste qui monte crescendo?

Cela dit, on serait tentés de croire, par ailleurs, que les deux hommes ont été «libérés» pour se préparer sereinement aux Présidentielles de 2014 qui les intéresseraient plus que tout. Seulement, la manière et les conjonctures complexes dans lesquelles est intervenue leur mise à l'écart laisse supposer que M. Abdelaziz Belkhadem et M. Ahmed Ouyahia ont tout simplement récolté les fruits de ce qu'ils ont «imprudemment» semé auparavant. C'est ce que rapportent, en tour cas, certains échos à leur propos, dont notamment ceux répercutés par la presse, qui s'appuyant sur des avis d'observateurs politiques aguerris, font état, vraisemblablement, de déclarations ou de démarches, en certaines circonstances, de ces deux hommes qui n'auraient guère été appréciés par le premier magistrat du pays. Ainsi, selon un commentaire du quotidien arabophone El Khabar, le secrétaire général du FLN qui aurait recouru dans la confection de ses têtes de listes électorales lors du dernier scrutin aux conseils d'éléments proches du DRS. Recours qui, répercute-t-on, ne semble pas avoir été du tout apprécié par le président de la République, qui, pour le dire au passage, n'a certainement pas oublié également le manège du secrétaire général du FLN durant sa période de convalescence mais avec un œil rivé en permanence sur les affaires du pays.

En ce qui concerne M. Ahmed Ouyahia, ces mêmes échos de presse font également état de piques adressées à l'endroit de Monsieur le président de la République durant les joutes électorales et qui ont laissé entendre que le secrétaire général du RND aurait laissé entendre que la crise que traverse le pays imputait à la seule politique suivie de M. Bouteflika, lui s'en lavant les mains. On aurait été tentés de croire, M.Ouyahia, seulement ses propos de constat n'ont pas été suivis concrètement par une démission? avant qu'il ne soit «démissionné» de son poste stratégique !

Quoi qu'il en soit, il reste aux deux grandes figures politiques des ex-gouvernements de la République, à convaincre l'opinion publique lors des locales du 29 novembre prochain et au-delà, qu'ils ont encore des atouts à faire prévaloir pour se maintenir encore en lice pour les Présidentielles de 2O14.

En attendant, c'est M. Abdelmalek Sellal, qui est nommé au poste convoité du premier ministère, parce que, avance-t-on, fort apprécié pour sa non appartenance à aucun Parti et étant susceptible d'assurer une certaine neutralité entre les tendances rivales Belkhadem-Ouyahia et de préparer sans grandes difficultés les prochaines locales, la révision de la Constitution et partant les présidentielles à venir. Sachant le nouveau Premier ministre, M. Abdelmalek Sellal, n'est pas étranger à M. Bouteflika, ayant déjà été par deux fois son directeur de campagne présidentielle. Comme quoi, c'est toujours le tenant du gouvernail qui supervisera de près celui qu'il a chargé d'assurer les objectifs essentiels de l'agenda programmé , après quoi pourra se dégager, de façon plus nette, probablement, si Bouteflika entend changer résolument l'ordre des choses régnantes avec l'entame d'une réforme profonde, si jamais il serait décidé de tout nettoyer après lui . Ou si tout simplement pout tout préparer à un 4 è mandat qu'il serait appelé à assurer aux cotes d'un vice-président imposé par les parties négociantes du système? toujours aussi fidèle à sa fameuse maxime «le changement dans la continuité !»... Et les réformes dans tout ça, entends-je s'élever de toutes parts?