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Le 19 Mars, lectures d'aujourd'hui

par Brahim Chahed

«Chaque génération doit, dans une certaine opacité, découvrir sa mission : l'accomplir ou la trahir». Frantz Fanon

Un PDG d'une entreprise au chiffre d'affaires astronomique réunissait ses 42 proches collaborateurs pour leur annoncer son départ pour convenance personnelle. Au lieu de vanter ses mérites dans la conduite des affaires de la société, il commence par les remercier d'avoir fait de lui l'homme qu'il était devenu aujourd'hui. «Sans vous, je n'aurais jamais pu réaliser ce rêve, je n'aurais jamais pu faire de cette entreprise l'une des plus grandes, je n'aurais jamais connu le succès que j'ai pu connaître, ni vécu les émotions, exceptionnelles, que j'ai pu vivre». S'adressant à quelques personnes autour de lui : «Vous, vous et vous ou encore vous, dites-leur, s'il vous plait, lorsque vous êtes venu me voir le premier jour, ce que je vous ai dit». Se tournant vers son public, un public admiratif conquis à sa cause, il enchaînait : « Je leur ai dit d'accord, je les ai engagés de suite, sans formalités, et j'ai demandé à ce qu'on leur verse une avance pour commencer.

Ce que vous ne savez pas, tous, c'est que ce jour, ce n'était pas de la générosité de ma part; je suis un chef d'entreprise, tout ce qu'il y avait, c'est que j'ai cru en vous. Et bien oui, j'ai cru en chacun de vous et aujourd'hui je vous le dis, j'ai eu raison de croire en vous, de croire en chacun de vous, merci de ne pas m'avoir déçu».

La télévision, pour la majorité écrasante des gens, a été l'invention la plus géniale de l'Homme. Mais la télévision, l'Internet, les usines high-tech, les imprimantes 3D, les voitures intelligentes et les avions dernier cri qui se pilotent tout seuls, restent tout de même des inventions infiniment simples et grandement petites comparées à la complexité de chacun de nous.

L'homme reste, de très loin, la machine la plus perfectionnée, la plus élaborée et la plus performante; il excelle dans l'utilisation des moyens existants, il est parfait dans la combinaison de plusieurs moyens et il a du génie dans la création des moyens nouveaux et innovants si ceux existants se révèlent inefficaces. De toutes les créatures de Dieu, il est le seul qui a son destin en main, il dispose du libre arbitre. L'homme est un fleuve, un grand fleuve et « nul ne peut contraindre un fleuve à la capitulation ». Que vous soyez étudiant, enseignant ou chercheur; que vous soyez petit agent, cadre moyen ou cadre supérieur; que vous soyez dans l'administration, dans la politique ou dans l'action sociale; que vous soyez dans le sport, dans l'art ou dans la culture; que vous soyez dans le public ou dans le privé, dans la sécurité ou dans la justice; que vous soyez actif ou toujours en recherche d'emploi, vous êtes la véritable richesse de l'Algérie, son héritage, son présent et son avenir; avec vous, les choses iront de mieux en mieux. Nous avons trop douté. Nous avons nourri beaucoup de suspicion. A ce rythme, nous allons droit vers l'impasse. L'incertitude mine la vie de nos concitoyens et paralyse toute action tournée vers le futur. Je peux comprendre que l'on a des appréhensions et des hésitations. Les uns vous diront: «Oui mais, on n'a pas de temps», les autres encore: «On ne sait pas si on peut faire quelque chose», et les derniers : «Oui, nous, on est là, mais les autres ne font rien». Pour le manque de temps, sachez que personne n'a de temps à perdre, la vie d'aujourd'hui nous offre tellement de facilités que nous pouvons multiplier le temps à l'infini. Pour les questions sur quoi faire, sachez aussi que tout le monde a quelque chose à offrir. Chacun de nous est bon quelque part, alors ne vous posez plus cette question, dites plutôt : «Voici mes domaines de compétence et voilà ce que je vais faire».

Et pour les autres qui ne font rien, laissez tomber, le problème ce n'est jamais les autres, c'est nous-mêmes, alors faites ce vous avez à faire, vous, c'est ce qui vous est demandé et laissez les autres assumer leur action ou leur inaction. Nous voulons écrire ce qui reste de nos vies, notre avenir, ensemble et agir pour convertir les aléas de la vie en opportunités, pour transformer nos déceptions en espérances. Ah j'oubliais, on devait parler du 19 Mars, vous aurez l'impression qu'on n'en a pas parlé du tout, et pourtant je n'ai fait que ça tout au long de ma chronique. Différemment. Le 19 Mars n'est pas une date qui symbolise la révolution, c'est une date qui symbolise la paix, le progrès et l'avenir. Un anniversaire et les célébrations qui l'entourent, c'est parfois un peu nostalgique.

Loin du rite que nous devons célébrer chaque année par habitude, nous voulons qu'il soit une source d'inspiration inépuisable, un rayonnement de notre histoire et l'espoir d'un avenir encore meilleur. Nous voulons avoir un regard en arrière afin de nous projeter, ensuite, dans l'avenir. Un avenir que nous construisons tous les jours, tous ensembles. Nous nous souviendrons, encore et toujours, des hommes et des femmes qui ont marqué cette date et de leurs successeurs depuis 1962. Nous nous devons, à notre tour, de relever les défis d'aujourd'hui et de se préparer pour ceux de demain : à chaque époque ses défis, mais aussi ses contextes et surtout ses hommes et ses femmes. De tout temps et à toutes époques, les Hommes ont réalisé des œuvres, les meilleurs d'entre eux ont réalisé de grandes œuvres. Pour cet anniversaire, les gens, par habitude, vous diront probablement : «Souvenez-vous». Moi-même, je n'y ai pas fait exception : l'héritage en vaut le détour. Aujourd'hui, j'ai envie d'aller plus loin, j'ai envie de vous dire : « Imaginez-vous », car là aussi, l'ambition en vaut le détour.