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La CGATA répond au ministre du Travail

par M. Aziza

Les récentes déclarations du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, Mourad Zemali, ont été mal digérées par le bureau national de la Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA) qui a affirmé, dans un communiqué rendu public, que «c'est les lois algériennes qui sont hors la loi puisqu'elles ne sont pas conformes à l'esprit et à la lettre de la Constitution algérienne»

Il y a deux jours, le ministre du Travail avait alerté l'opinion publique et tous les employeurs contre des groupes qui, se présentant comme des organisations syndicales, mais qui sont en réalité «en infraction par rapport à la législation du travail et ne représentent aucune catégorie socioprofessionnelle». Il a clairement nommé ces syndicats, «la pseudo-Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA) ainsi que les groupements de personnes utilisant la dénomination syndicale de l'ex-SNATEGS qui a en toute indépendance déclaré sa dissolution conformément à son statut». Et de souligner que ces derniers «sont en infraction par rapport à la législation du travail et ne représentent aucune catégorie socioprofessionnelle, aussi bien dans le secteur de la fonction publique que dans le secteur économique public et privé».

En réponse à Mourad Zemali, les membres de la CGATA ont reconnu dans leur déclaration que leur syndicat n'est pas enregistré en Algérie. Mais, ils ont tenu à expliquer à l'opinion publique que c'est l'administration qui a refusé «arbitrairement» cet enregistrement. «Car non seulement les lois algériennes ne sont pas conformes aux conventions ratifiées par l'Algérie alors que la Constitution énonce que les traités et conventions sont supérieurs aux lois internes mais, en plus, même ces lois ne sont pas appliquées et c'est parce que du point de vue de la convention 87, notre dossier est conforme que la CSI (Confédération syndicale internationale) a accepté notre adhésion».

Le bureau de la CGATA rappelle que le Bureau International du travail (le BIT) a affirmé à plusieurs reprises que les lois algériennes n'étaient pas conformes aux conventions. Pourtant, précise-t-on dans le communiqué, «des représentants de l'Etat avaient déjà demandé l'aide du BIT pour corriger les failles, mais en vain, c'est toujours le statu quo».

Les syndicalistes dénoncés par le ministre ont évoqué le cas du SNAPAP qui «a été cloné par l'administration en plaçant à sa tête celui qui était un député à l'époque et qui est maintenant à la retraite mais le fait de ne pas respecter la loi ne semble pas du tout vous gêner, car ni un député en cours de mandat ni un retraité (à plus forte raison quand il prend sa retraite en tant que député) ne peuvent avoir un mandat de délégué syndical». «Mais vous n'êtes pas à un déni de droit près», ajoutent-ils.

Les rédacteurs du communiqué concluent que «la CSI ainsi que la commission des normes, qui est composée, elle, de personnalités indépendantes, avaient compris le grossier manège et elle reconnaît la plainte du SNAPAP, c'est pourquoi elle a, à plusieurs reprises, demandé l'enregistrement des syndicats, la réintégration des syndicalistes suspendus et licenciés ainsi que le traitement des organisations syndicales sans violence et dans un climat apaisé».

Pour ce qui est du SNATEGS, précisent les rédacteurs du communiqué, «ceux qui portent atteinte à l'Etat et à sa crédibilité sont bien ceux qui parlent en son nom», en citant l'ex-ministre du Travail qui avait signé un papier pour signifier le retrait de l'enregistrement du SNATEGS en mai 2017, alors qu'il n'en avait pas le droit. Ce qui a poussé le secrétaire général du ministère de nier les faits devant la commission des normes (conférence internationale du travail de juin 2017). Pourtant, précisent les syndicalistes, «nous avons entre nos mains la lettre citée».

La CGATA saisit l'occasion pour «rappeler au ministre qu'il avait oublié de citer le SESS (Syndicat des enseignants du supérieur solidaires) et le SNAVA (Syndicat national autonome des avocats algériens), qui attendent désespérément leur enregistrement».

La marginalisation de 55 organisations syndicales dénoncée

Les rédacteurs du communiqué ont tenté, à travers cette mise au point, de répondre aux déclarations du ministre du Travail point par point. Ils ont ainsi commenté les chiffres avancés par M. Zemali sur l'existence d'une pluralité syndicale, en avançant le chiffre de 66 organisations qui exercent en Algérie. Pour ces syndicalistes, «la majorité des enregistrements date de l'ouverture démocratique en Algérie, le tout début des années 90, depuis c'est la mise entre parenthèses de l'ouverture démocratique que l'on vit». Et de dénoncer le fait que sur les 66 organisations, seule une dizaine d'organisations syndicales s'est réunie avec l'ancien ministre du Travail en mai 2017. Et d'ajouter: «pour ensuite dire au niveau de la conférence internationale du travail? il y a un vrai dialogue entre les autorités et les organisations syndicales».

Le bureau syndical de la CGATA affirme qu'il est dans son droit et continuera à exiger, que ce soit au niveau interne ou au niveau international, le respect des conventions internationales ratifiées par l'Algérie et le respect du libre exercice du droit syndical. «N'oubliez surtout pas qu'à terme, c'est le Tribunal international de la justice de La Haye qui aura à traiter de ces cas et c'est votre abus de la position que vous occupez qui mènera à cela, même si nous savons qu'il y a d'autres acteurs qui décident sur ces questions», conclut le communiqué.