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Grève des fonctionnaires de la justice: Des tribunaux paralysés

par Houari Saaïdia & A. Mallem

La grève des fonctionnaires de la justice, lancée mardi à l'appel du Conseil national des fonctionnaires de la justice affilié au syndicat autonome Snapap, s'est poursuivie hier.

Le taux de suivi a toutefois légèrement régressé. Dans certaines juridictions, une reprise partielle et graduelle du travail a été enregistrée. Au niveau de la cour d'Oran, en particulier, le débrayage a subi un frein sec, un retour aux postes à 100% ayant été enregistré dès 8 heures. A Alger, et dans une grande partie du Centre, la situation était flottante. En ce sens que, par exemple, le siège de la cour d'Alger fonctionnait normalement alors que les cinq tribunaux qui en dépendent (Alger, Sidi M'hamed, Bir Mourad Raïs, El-Harrach et Hussein Day) étaient toujours paralysés; seul le service minimum y était assuré. Ceci alors que dans la majorité des structures judiciaires du pays, certains tribunaux administratifs compris, le boycott du travail par le personnel des greffes et les corps communs n'a pas baissé d'un iota au deuxième et avant-dernier jour de la grève. C'est le cas, par exemple, des cours d'Annaba, de Tizi-Ouzou et de Boumerdès. Là, les affaires enrôlées aux audiences d'hier, en pénal comme en civil, ont été renvoyées toutes en bloc à une date ultérieure. La tentative de certains tribunaux de parer au plus pressé en installant un huissier de justice au lieu et à la place du greffier d'audience, bien qu'elle soit une manoeuvre légale, a été mal perçue par les avocats qui s'y ont opposés. Il faut reconnaître que ce mode d'emploi, parfois controversé mais toujours sujet à discussion, s'il a fonctionné dans le passé comme un moyen alternatif -et même dissuasif- qu'on utilise en temps de crise, est largement décrié aujourd'hui et fort peu efficace. Au niveau de la cour d'Oran, l'une des quatre structures dites «Grandes cours» avec celles d'Alger, de Constantine et d'Ouargla, la rupture de la grève a eu lieu grâce -ou à cause, c'est selon- à la démarche entreprise dès avant-hier par le parquet général. En effet, sur directive du procureur général près cette cour, Sâadallah Bahri, une réunion a été convoquée, mardi matin, dans l'une des salles du palais de justice, avec comme objectif: trouver une sortie à cette situation conflictuelle. Ainsi, tout le personnel interne, en premier lieu les greffiers, a été invité à prendre part à cette rencontre pour que chacun exprime son point de vue et les revendications à l'origine de cette action et ce, en présence du premier procureur général adjoint (PGA) et du greffier en chef de la cour. Une réunion au cours de laquelle un message de sensibilisation, alternant le ton doux et l'accent rigoureux, a été véhiculé par le représentant du ministère public à l'égard des «grévistes». Il semble a priori que la démarche a porté ses fruits au vu du gel total de la grève et la reprise générale du service enregistrés le lendemain (hier).

Dans la région de Constantine, au deuxième jour de la grève des fonctionnaires de la justice, les tribunaux ont été quasiment fermés en l'absence de fonctionnement des services annexes tenus par les greffiers. Et ceux qui se sont plaints le plus de cette situation sont les avocats qui ont vu leurs affaires systématiquement renvoyées, nous ont déclaré, hier, des robes noires. Dans la journée d'hier, à Constantine, l'administration a réquisitionné des huissiers de justice pour tenter de remplacer les grévistes dans les audiences des affaires qui ont été traitées, mais dans leur totalité, les avocats se sont retirés estimant qu'il était illégal de remplacer un greffier par un huissier de justice. Contacté hier par nos soins, Maître Lenouar Mustapha, président de l'Union nationale des barreaux d'Algérie et bâtonnier de Constantine, a confirmé la situation de blocage des tribunaux tout en ajoutant que seules une à deux audiences se sont déroulées normalement au tribunal d'El-Khroub et dans certains autres, mais celles-ci n'ont pu aboutir en l'absence des secrétaires greffiers, et c'est ainsi que toutes les affaires programmées ont été ajournées. «C'est le même constat qu'on peut faire pour la région, notamment au niveau des wilayas de Skikda, Jijel et Mila», a affirmé Me Lenouar.