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Un G20 qui a fait pschitt

par Akram Belkaïd, Paris

Cela ressemble à ces manifestations d’auto-célébration qui précèdent la catastrophe, un peu à l’image du ouf de soulagement que poussent les protagonistes d’un film d’horreur, avant que des créatures sorties de terre ne leur fassent un mauvais sort... Officiellement, et à en croire ses participants, Obama, Brown et Sarkozy en tête, le dernier G20 a été une réussite. Tout serait réglé : circulez il n’y a plus rien à voir. La croissance, cette fille prodigue, serait même de retour d’ici 2010. On respire !

 

Un nombre important de problèmes en suspens

 

A dire vrai, ce sommet d’un jour n’a tenu aucune de ses promesses et cela ne peut qu’augurer de grandes difficultés à venir. Rien de concret n’a, par exemple, été décidé en ce qui concerne les banques, alors que ces dernières sont à l’origine et au centre de la crise.

On pensait que le G20 prendrait le taureau par les cornes et imposerait à ces dernières des règles prudentielles plus rigoureuses. Cela ne fut pas le cas. Mais ce n’est pas tout. La question des finances publiques, puits dont on ne voit plus le fond, n’a été évoquée que par le biais de l’expression habituelle de la « soutenabilité de long terme des politiques budgétaires ». La conséquence de cela est que l’hypothèse d’un krach sur le marché obligataire n’est absolument pas à exclure. Tant de dettes émises par les Etats finiront par tuer la dette et faire plonger la valeur des créances déjà émises.

Plus préoccupant encore, aucun pas sérieux n’a été franchi en ce qui concerne la prise en compte des problèmes monétaires mondiaux. Tout le monde, à commencer par les Chinois, s’accorde à dire que le dollar américain ne peut plus être la monnaie étalon.

Ce « privilège exorbitant » de l’Amérique est une source permanente de déséquilibres et il faudra, tôt ou tard, trouver une solution pour réorganiser le système monétaire international avec, pourquoi pas, la création d’une devise-monde qui sera la contrepartie des monnaies nationales. De cela, malheureusement, les participants du G20 n’ont pas parlé.

Et qu’ont dit les représentants de ces 19 pays (l’Union européenne est le vingtième membre du G20), qui représentent 85 % du PIB mondial et 65 % de la population, à propos de la dualité plan de relance contre durcissement de la régulation financière ? Rien ou presque. Aux exhortations d’Obama qui a demandé aux Européens d’injecter plus d’argent dans leurs économies, ces derniers ont opposé un refus poli. Et pour ne pas donner l’impression d’être divisés ou en désaccord, les deux parties se sont entendues pour encourager les pays émergents à doper leurs plans de relances et à créditer le Fonds monétaire international (FMI) de nouvelles responsabilités dans la lutte contre la crise, responsabilités plutôt vagues qui ne sauraient faire oublier que cette vénérable institution est complètement passée à côté de la déferlante des subprimes.

 

Le gag des paradis fiscaux

 

Enfin, last but not least, la comédie autour des paradis fiscaux pourrait arracher quelques sourires à ceux qui ignorent encore le rôle néfaste de ces places, qui servent tout autant à blanchir l’argent du crime organisé que celui des évasions fiscales organisées par des multinationales ou des particuliers. On a vu avec plus ou moins de surprise des pays être inclus dans des listes grise (Luxembourg, Belgique,...) ou noire (Uruguay, Malaisie,...) tandis que d’autres n’ont jamais été nommés (Jersey, Hong Kong, Macao, Delaware). Le matin même du G20, des pays auraient « téléphoné » pour promettre qu’ils seraient plus coopératifs à l’avenir et, bien entendu, ils ont été retirés de la liste car comment croire qu’il ne s’agissait-là que d’une manœuvre ? Tout cela n’est guère sérieux et l’urgence de la situation aurait mérité plus de conviction de la part des grands de ce monde.