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Avertissements

par Mahdi Boukhalfa

Cela a la forme d'une mise en garde et d'un sérieux avertissement aux autorités du pays. La boucle du mécontentement social serait en train de se fermer avec ces bouillonnements dangereux qui sont en train de se manifester dans plusieurs secteurs socioprofessionnels. Les grèves cycliques, la grogne sociale et le marasme au sein de plusieurs secteurs font que la situation est en train de prendre des contours inquiétants, assez pour que le gouvernement mette fin à son silence et intervienne là où il faut pour endiguer cette crise sociale qui pourrait le déborder si des solutions urgentes ne sont pas mises en place.

La grève des médecins résidents est plus un appel d'air d'une corporation qui a le plus de contact avec la population, et donc qui pourrait constituer de prétexte pour d'autres explosions sociales, d'autres revendications qui à ce moment mettraient vraiment le gouvernement dos au mur. Et, comme les solutions prises dans la précipitation ne sont pas forcément les meilleures, cela ouvrirait la voie à d'autres dérapages. Cela fait plus d'un mois que les médecins résidents sont en grève et cela fait plus de deux mois que le gouvernement n'arrive pas à proposer des alternatives acceptables aux revendications de cette corporation socioprofessionnelle.

A l'autre extrémité de cette fronde, il y a le secteur de l'Education nationale qui continue de battre de l'aile. La grève du Cnapeste, le spectre de l'année blanche, un dialogue de sourds font que ce secteur tangue dangereusement depuis plusieurs années. De petites réformes qui n'ont pas recueilli l'adhésion des professionnels ne sont pas vraiment des solutions au marasme social et professionnel qui mine ce secteur entré dans une crise structurelle depuis au moins les années 1990. Là également, le gouvernement Ouyahia, même s'il a hérité d'un passif catastrophique, doit trouver les ressorts nécessaires et la voie du dialogue pour ne pas stresser davantage un front social devenu exigeant et, surtout, qui ne se satisfait plus de demi-mesures, prises juste pour une paix sociale passagère, limitée dans le temps.

L'avertissement lancé aux autorités par les grèves de ces dernières semaines, y compris à Air Algérie, est le signe d'un brusque retour à un bouillonnement social dans le pays, et ce n'est pas une simple réaction épidermique face à une dislocation des rapports de force entre travailleurs et gouvernement, par rapport à une préoccupante crise de confiance entre les deux parties, qui est en train d'ouvrir la voie à un torrent de contestations sociales qui serait ensuite impossible de contenir. D'autant que le gouvernement est tout aussi concerné par le traitement de cette fronde qui pourrait l'encercler et devenir très coûteuse socialement et politiquement, si trop de temps est mis pour aller vers les vrais consensus socioprofessionnels en ces moments difficiles pour les Algériens avec l'accélération de la cadence des hausses de prix tous azimuts. Là, le Premier ministre doit intervenir pour calmer, sinon rendre confiance au front social, car dans la balance il y va de ses réformes. Et de son gouvernement.