Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

La réconciliation des mémoires, mode d'emploi

par Farid Rahal*

Réconcilier les mémoires des peuples est essentiel pour asseoir des relations internationales apaisées. C'est le cas des peuples du tiers-monde qui ont subi des injustices planifiées méthodiquement par des gouvernements principalement européens.

La colonisation est l'une de ces injustices les plus flagrantes dont la plus emblématique, est l'agression de l'Algérie par la France durant 132 longues années. Une agression contre les personnes, leurs biens, leurs terres, leur civilisation et leur mémoire. Une mémoire que le système coloniale avait voulu effacer en inculquant aux écoliers algériens qu'ils avaient des Gaulois pour ancêtres et en bannissant tout relent de la civilisation algérienne profondément ancrés dans l'histoire.

Malgré les différentes méthodologies employées par la France officielle et officieuse, la mémoire algérienne est restée vivace. Elle s'est renforcée encore en s'imprégnant des luttes, des souffrances et des drames durant la nuit coloniale. Cette mémoire mérite amplement d'être reconnue et considérée par des actions simples, mais sincères. En effet, la sincérité est la clé de réussite de toute action visant à réconcilier les mémoires.

Ce n'est certainement pas les opérations de communications savamment orchestrées au sein du microcosme parisien et de ses relais, que cette réconciliation pourra aboutir. Ce n'est pas non plus, la politique des échantillons qui pourra réussir bien que portée par une théâtralité et les réflexions d'un brillant historien. Ce n'est pas aussi avec une néo-bleuite empoisonnant les esprits et semant le doute, que ce dossier pourra avancer. Les ravages de la bleuite initiale pensée dans un certain bureau, le deuxième du nom, se font ressentir jusqu'à maintenant. Enfin, ce n'est pas en transformant la réconciliation des mémoires en carte de négociation dans un environnement international bouillonnant, que cela aidera à avancer dans cette noble quête.

La réconciliation des mémoires passe par un postulat simple : Un agresseur ne pourra et ne sera jamais sur le même pied d'égalité qu'un agressé. Il s'agit alors pour la France officielle de reconnaitre les crimes planifiés et commis par la France officielle lors de la période coloniale.

Plus le temps passe, plus il sera difficile de réconcilier les mémoires. En effet, les générations post-indépendance de l'Algérie auront l'appréhension de transgresser les droits et la mémoire de leurs valeureux aïeux.

Il aurait été plus aisé pour la France officielle d'entamer cette réconciliation avec les Algériens qui ont connu la guerre de Libération nationale. Car, ce sont des hommes et des femmes qui peuvent dépasser les événements douloureux qu'ils ont vécu dans leurs chairs et regarder paisiblement vers l'avenir.

Mais est-ce que l'ADN de la France officielle permettra de dépasser les rancœurs, de bannir les méthodologies coloniales et de de bâtir une relation saine et durable avec l'Algérie ?

La collusion avec les systèmes coloniaux actuels permet d'en douter.

La déclaration du premier représentant de l'ancienne puissance coloniale au sujet de l'Ile de la grande glorieuse revendiquée par le peuple malgache permet d'en douter aussi.

L'expansionnisme d'Etat, est toujours d'actualité malgré les discours lénifiants sur les méfaits de la colonisation. Cependant, le comportement admirable de bon nombre de Français durant la période coloniale laisse entrevoir qu'il est possible de construire une relation apaisée entre l'Algérie et la France. Ils ont sauvé l'honneur de la France mais aussi parié sur l'avenir. Un pari gagnant, s'il est porté par des actions sincères.

*Universitaire - Oran - Algérie.