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Skikda: Canicule, estivants et routes bloquées

par A. Boudrouma

Skikda et ses environs ont été le théâtre de plusieurs manifestations caractérisées par des fermetures de routes par une population excédée dont l'unique revendication se rapporte au logement. En effet, frustrés de ne pas faire partie du lot des centaines de citoyens relogés dont les listes ont été largement relayées sur les réseaux sociaux, des jeunes ont investi plusieurs points de la ville et de sa banlieue pour y ériger des barricades.

Ainsi, coïncidant avec la venue du ministre de la Formation professionnelle, la journée de jeudi dernier a drainé malgré la canicule de nombreux jeunes qui ont fait le guet à Hamrouch Hamoudi pour interdire l'accès de la ville sur la RN44. Du coup, les nombreuses unités économiques implantées dans la zone d'activités proche en ont pâti, puisque qu'elles ont été confrontées à des perturbations et les transporteurs publics, du moins les plus débrouillards d'entre eux, ont été obligés de dévier de leur itinéraire habituel moyennant de longs contournements. D'autres ont dû se délester de leurs passagers qui ont opté pour le système D, à savoir traverser les barrages et continuer à pied ou bien chercher un autre moyen de transport. Un autre barrage a été dressé par les habitants du bidonville de la gare ?'El Barani», non loin de la gare routière Mohamed Boudiaf, perturbant sérieusement le mouvement des bus et des taxis et entraînant une pagaille indescriptible.

Deux autres barrages ont été érigés au chef-lieu de commune de Hamadi Krouma, entraînant des restrictions sévères dans les déplacements des habitants, et le second à l'entrée du village où au départ les manifestants ont montré une volonté de dialogue, ce à quoi le P/APC intérimaire présent sur place en compagnie d'un officier de police a rétorqué : «C'est pas la peine, les autorités sont en compagnie du ministre de la Formation professionnelle, autrement le chef de daïra serait venu à coup sûr...». Il poursuivra pour se justifier : «Le logement ne fait pas partie des prérogatives de l'APC, donc nous ne pouvons nous avancer à ce sujet ...», ceci dans le même temps où le policier tout sourire s'affairait avec plusieurs groupuscules pour tenter de convaincre les frondeurs sur la nécessité de désigner des représentants pour aller présenter leurs doléances aux autorités. Certains n'ont pas hésité pourtant à accuser le P/APC qui venait de sortir en congé de les avoir abandonnés en leur fermant au nez la porte du dialogue et en faisant fi de la menace du recours à la fermeture de routes. Cette attitude a quelque peu attisé leur colère, débouchant sur la mise à exécution des menaces. Si la RN44 a pu être évacuée sans heurts quelques heures après sa fermeture, à Hamadi Krouma par contre la situation s'enlisait, les manifestants campaient toujours sur leurs positions. Les habitants du bidonville champignon, surplombant la route menant à Hamadi Krouma, étaient permissifs au départ en orientant les automobilistes vers une autre voie de sortie traversant la cité autoconstruction et menant à la Cité Zeramna à Skikda, mais ne voyant rien venir, ils décident de la fermer en y brûlant des pneus usés, achevant ainsi la fermeture complète de Hamadi Krouma à la circulation automobile. C'est ainsi que les citoyens livrés à leur sort n'ont eu d'autre alternative que de se débrouiller soit par de longues marches à pieds sous un soleil tapant créant un spectacle insolite de longues cohortes de femmes, d'hommes et d'enfants, ou bien annuler le déplacement. Et voila que, fait inédit, Hamadi Krouma s'est retrouvée prise en otage durant toute la journée de jeudi dernier ! Ce n'est que vers la fin de la journée que les manifestants décident enfin de mettre un terme à leur action en libérant le village. Un émissaire dépêché par la wilaya leur a proposé la tenue d'une réunion dès dimanche au siège de l'APC de Hamadi Krouma... Ce n'est pas le cas à la ?'Gare El Barani», non loin de la gare routière Mohamed Boudiaf, où les lieux ont été évacués par la force publique, dans un violent affrontement entre policiers et manifestants qui ont utilisé toutes sortes de projectiles.

En l'espace de dix jours, Skikda est devenue une destination de choix, puisque 3 ministres s'y sont relayés, forcément car à Bouchetata par exemple, le ministre de l'Intérieur, quelques jours avant, a eu droit à un accueil spécial, au son de la zorna... Néanmoins à Skikda, on imagine aisément les encombrements consécutifs à l'arrivée massive d'estivants, un jour de week-end, des routes coupées par des manifestants du logement et enfin, cerise sur le gâteau, un ministre qui s'invite un jeudi, par une journée de canicule sans précédent...