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Le courroux du patronat privé

par G. O.

Les propos tenus mercredi par le patronat privé dénotent une certaine animosité envers les membres du gouvernement qui, disent-ils, ne les ont pas consultés dans la prise des dernières mesures économiques et financières.

La réunion qu'a présidée mercredi le ministre de l'Industrie et des Mines en prévision de la tripartite devant se tenir en octobre prochain à Biskra, a été émaillée de propos qui ne cachent pas le courroux des responsables des organisations patronales privées. Ils avaient tous apporté par leurs contributions respectives la contradiction aux discours optimistes du ministre et du secrétaire général de l'UGTA. «Nous nous devons d'apporter des solutions à la situation sociale des Algériens qui n'est pas aussi brillante que nous le pensons», a commencé par dire Habib Yousfi, président de la CGEA. Yousfi réclame d'emblée «un dialogue sincère et non biaisé» dénonçant dans la foulée «la prise de mesures unilatérales par le gouvernement». Le président de la CGEA qualifiera d'ailleurs celle relative à l'économie informelle de «petites mesurettes pour ramasser des sommes faramineuses». Il fera remarquer que «le patronat est majeur, on a vu des mesures dans la LFC à la confection de laquelle on doit en principe participer».

Boualem Marrakchi, président de la CAP a affirmé entre autres que «l'Algérie est en situation difficile y compris sur le plan sécuritaire, nous avons 7 frontières». Il réclamera «l'instauration d'arbitrages pour régler des problèmes techniques et de créances notamment dans le BTPH». Le ministre le rassure que «c'est pris en charge dans le code des marchés publics».

«DES PATRONS QUI PAIENT PLUS POUR NE PAS DECLARER»

Le président de la CIPA, Abdelaziz M'henni, a évoqué «des investissements agricoles qui s'étalent sur 16.000 hectares, 1000 h par investissements, nous avons même des partenaires étrangers parmi nous». Il lance cependant un appel «en haut pour qu'en bas, ça marche, le wali n'a aucun pouvoir, il y en a qui ragda oua tmangé». Il indique qu'il y a des unités industrielles qui ferment à cause des problèmes qui s'accumulent. «C'est comme la BADR, elle a pris des terres mais ne les travaille pas», dit-il mécontent. Il affirme par ailleurs son accord pour la suppression du 87 bis mais fait savoir qu'«il y a des privés qui ne paient pas 18.000 DA et il y en a qui paient plus pour ne pas déclarer leurs employés». Ce qui lui fait dire que «c'est faux de penser que nous sommes un patronat uni, il y a des sensibilités, un ministre qui travaille beaucoup avec le FCE, il n'y a pas de petit ni de grand patron, nous sommes tous semblables».

Brahim Benabdessalem qui représente le FCE rebondit : «le FCE n'a jamais revendiqué d'être premier du patronat». Il corrigera aussi ceux qui parlent «aujourd'hui» de mesures économiques efficientes. «Elles ont été prises depuis 99», dit-il. Il évoquera ainsi «la politique volontariste de l'Etat en finançant l'investissement avec l'argent public, le paiement de la dette rubis sur l'ongle». Mais, relève-t-il, «quelles que soient les propositions, elles ne remplaceront pas une vision pour une Algérie émergente». Il estime que «les 16 propositions du FCE vont dans ce sens, elles reposent sur trois volets essentiels : la décision ne vaut que par son mode opératoire, il faut dépasser la proposition pour booster la production nationale». Ses remarques-propositions : «Nous sommes un pays désindustrialisé, nous avons aussi toujours compté sur les financements bancaires, ce n'est pas normal que la bourse d'Alger fait des transactions de seulement quelques milliers de dinars, nous avons une bulle immobilière parce qu'en l'absence de financements alternatifs, ceux qui ont de l'argent investissent dans l'immobilier, nous avons de sérieux problèmes de gouvernance économique en l'absence de systèmes de pilotage».

«L'ETAT C'EST NOUS !»

Les partenaires sociaux mettront sur la table de la tripartite de Biskra un rapport d'étapes «qu'il faut encore peaufiner et compléter», dit le ministre. Rapport qui repose sur deux thématiques : relance de la production nationale et amélioration du climat des affaires. Ils auront ainsi à évaluer les mesures mises en œuvre au titre de la tripartite de 2014 et du pacte national économique et social. Bouchouareb espère qu'«en octobre, nous aurons une matrice bien noircie avec l'exécution de tout ce qui a été demandé». Il reconnaîtra que tout ce qui a été fait depuis 99 «ce ne sont pas des mesures qui représentent la panacée, ni des objectifs en soi, parce qu'il était impossible de parler à l'époque d'une Algérie émergente, il fallait donc construire les infrastructures nécessaires, c'est ce qui a été fait, sans ça, aujourd'hui, il nous faut une croissance réelle, forte et cumulable qui apporte des solutions à notre économie, ce mouvement de réformes et de mesures que nous entreprenons est pour y arriver». Il enchaîne : «Ce ne sont pas des mesurettes (?)» répondant ainsi à Yousfi. «Le gouvernement ne mène pas une politique d'austérité mais rationnelle et optimale». Pour lui, il est possible de «réveiller la bourse d'Alger, d'aller aussi vers des fonds privés nationaux d'investissement». Il évalue la collecte financière visée par le gouvernement à partir de l'économie informelle à 1500 milliards de DA «même si on sait qu'on peut aller à 3500 milliards de DA». Le ministre affirme que «le gouvernement se fait une obligation de faire de l'Algérie un pays émergent, c'est une dimension incontournable(?).» Il conclura son intervention en lançant : «l'Etat, c'est nous !, la tripartite de Biskra nous permettra de mobiliser tous les moyens et les atouts pour une économie forte».