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Algérie : plusieurs facteurs freinent l’émergence d’un écosystème de data mobile

par Farid Farah

Plus de douze années d’ouverture à la concurrence dans la téléphonie mobile, et après le lancement de la 3G, il est temps de permettre l’émergence d’un écosystème de la data mobile en Algérie. Il existe des facteurs bloquants.

En Algérie, la dernière décennie a été marquée par les offres lowcost dans les services voix de la téléphonie mobile mobile, et 2013 demeurera l’année du lancement historique de la 3G dans ce pays. Le passage à l’UMTS, qui a fait les gros titres des médias, depuis plusieurs mois, illustre un basculement des usages de la voix vers la data mobile. Si la 3G a vu l’émergence de plusieurs stations de base dans plusieurs villes du pays, elle est loin de générer une adoption massive. L’essor n’est pas au rendez-vous malgré la croissance enregistrée dans le marché algérien des smartphones. Aujourd’hui, plusieurs facteurs freinent le décollage de la data mobile en Algérie.

Côté vitesse, vu que la quasi-totalité des données consommées par les mobinautes proviennent des serveurs localisés à l’étranger, une bande passante internationale non dégroupée nuit beaucoup aux performances de la 3G en matière de débit. Le maintien du monopole d’Algérie Télécom sur la bande passante à l’international réduit le confort des usagers de la connexion 3G, dont la puissance du débit est, théoriquement, 7 fois plus rapide que celle d’une connexion ADSL . Cependant, depuis la mi-décembre de l’année dernière, date du lancement de la 3G, les opérateurs n’ont pas penser lancer des offres qui se focalisent sur autre chose que le prix du mégaoctet et le volume de données mensuel, jugé très insuffisant par les clients. Il faut reconnaître que les facteurs du succès de l’Internet mobile en Algérie ne peuvent aucunement être limités aux performances technologiques, mais devraient également englober des stratégies d’usage et de modèle économique.

Le débit n’est pas le seul critère

En clair, la vitesse d’une connexion 3G ne constitue pas le seul critère pour évaluer la santé économique d’un opérateur de la téléphonie mobile. Le cadre de travail incluant exclusivement une collaboration technologique avec d’autres entreprises comme les fabricants d’applications mobiles et celles qui stockent et sécurisent les données est aussi un critère qui garantie les meilleures chances de succès pour l’opérateur et des retombées économiques pour le pays. Ceci amène à dire qu’aujourd’hui, en Algérie, l’écosystème de la data mobile est quasi inexistant. En voie de disparition dans d’autres pays, la technologie UMTS a été lancée en Algérie dans le but de devenir une porte d’entrée vers un nouvel univers, celui de la data mobile. Avec cette technologie, le temps de réponse d’une connexion sera réduit ouvrant ainsi un nouveau type d’usage d’Internet, qui a nécessairement besoin d’un écosystème spécifique.

C’est en se regroupant à travers des structures favorisant une concurrence loyale, une création de la valeur, un accès au marché, et une innovation technologique, que l’écosystème de la data mobile en Algérie verra le jour. Sa création fera éviter à la 3G de devenir "antiéconomique" pour le pays. Pour cela, il est nécessaire de relever deux grands défis pour lesquels le gouvernement a un rôle clé à jouer. Premièrement, l’instauration d’une réflexion sur l’architecture des réseaux déployée par les opérateurs, afin de pousser ces derniers vers l’intégration des technologies de virtualisation pour créer un environnement local de stockage des données.

Stockage local

Le stockage local est l’ADN de l’écosystème de la data mobile. Son industrialisation dans le pays, via les dernières technologies comme le SDN, fera baisser davantage le prix du mégaoctet consommé par le mobinaute algérien. Mieux, l’infrastructure réseaux, hébergeant la vie numérique des algériens, ainsi constituée, sera plus adaptative aux architectures de demain comme le Cloud. Aujourd’hui, dans le monde, on ne parle d’écosystème de la data mobile que si les opérateurs assurent aux utilisateurs de disposer en permanence de leurs contenus, utilisés chez soi, sur smartphone ou tablette sans le moindre coût supplémentaire.

Deuxièmement, la multiplicité des technologies de transmission des données dans les réseaux cellulaires tels que la 3G, incite à tenir en compte de l’impact économique. Par exemple, les fournisseurs de contenus sont amenés à développer des applications en relation avec la montée des débits et les besoins des clients. La performance technologique du réseau de l’opérateur deviendra alors un vecteur de croissance. Dans ce contexte, l’opérateur est positionné au coeur de tout projet de création d’un écosystème de la data mobile. Sa croissance, issue de cet écosystème, financera son innovation technologique. En clair, un réseau 3G rentable facilitera la migration vers la 4G. Pour cela, l’opérateur doit faire payer sa 3G au prix de la réalité du service apporté. Malheureusement, pour le cas de l’Algérie, faute d’un écosystème de la data mobile et d’une régulation normalisée, claire et transparente, les opérateurs ne peuvent que se mener une guerre des prix destructrice, avec comme conséquence leur éventuel désengagement dans l’extension de la couverture vers les zones blanches. Car c’est bien la création de valeur générée cette année qui permettra de financer celle de l’année suivante.