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Intervention militaire française en Centrafrique

par Michel Cariou, De L'afp

L'armée française a lancé son opération en Centrafrique avec un renforcement dans un premier temps des patrouilles dans Bangui, qui présentait hier matin un visage de ville morte après les massacres de la veille. «L'opération a commencé» et les forces françaises présentes en Centrafrique «ont développé des patrouilles dans Bangui», a affirmé hier le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian à RFI. Dans les rues de Bangui, sous l'orage et la pluie, où toute circulation de véhicules civils est interrompue depuis jeudi, aucun déploiement massif des troupes françaises n'était visible dans la matinée. Pendant quelques minutes deux avions de combat, impossibles à identifier à cause du plafond nuageux très bas, ont survolé la ville. Comme chaque jour, des patrouilles -véhicules légers et blindés- circulent sur les principaux boulevards de la capitale. Des détachements de la force africaine (Misca) étaient eux aussi postés à leurs emplacements habituels. En revanche, contrairement à la veille où ils avaient patrouillé toute la journée, les pick-up bondés de soldats centrafricains se faisaient discrets. Des tirs sporadiques d'armes automatiques ont été entendus dans la nuit de jeudi à vendredi dans plusieurs quartiers, selon des habitants contactés par l'AFP. «On ne sait pas pourquoi ils tiraient. On n'a pas entendu parler d'incidents», a expliqué un habitant du quartier de Ben Zvi. Aucun bilan d'éventuelles victimes de ces tirs qui, par endroits, ont cessé à l'aube, n'était disponible dans l'immédiat, après une nuit pendant laquelle la grande majorité de la population craignait qu'elle ne soit l'occasion de nouvelles tueries. Malgré la levée du couvre-feu à 06h00, les rues restaient vides dans la matinée et la quasi-totalité des commerces étaient fermés. Après le feu vert de l'ONU à une opération conjointe de forces africaines et françaises pour rétablir la sécurité, le président français François Hollande avait annoncé dès le soir une action militaire «immédiate» en Centrafrique. «Une compagnie est arrivée de Libreville hier soir et aujourd'hui un détachement d'hélicoptères sera sur zone», a indiqué M. Le Drian. Une compagnie de l'armée française comprend généralement quelque 150 hommes. La mission des militaires français, en appui de la force africaine sur place, est d'assurer «une sécurité minimum, permettant à une intervention humanitaire de se mettre en œuvre, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui». Elle passe «par la sécurisation des rues, des itinéraires principaux pour permettre aux gens d'aller même à l'hôpital», a-t-il souligné. Jeudi, avant l'aube, de violents affrontements ont éclaté dans le nord de la capitale. «Des groupes armés ont lancé une offensive sur la ville. Les forces de l'ex-Séléka (ex-rébellion au pouvoir) ont rétorqué», selon Médecins sans frontières (MSF). Dans l'après-midi, les journalistes de l'AFP ont comptabilisé au moins 54 cadavres rassemblés dans une mosquée du centre-ville, et 25 cadavres gisant dans les rues voisines, abandonnés sur le bas-côté. Les corps portaient des marques de blessures à l'arme blanche et par balle. A l'hôpital communautaire de Bangui, MSF avait recensé 50 morts en fin de journée. Plusieurs quartiers touchés par ces violences restaient inaccessibles vendredi matin du fait de l'insécurité, laissant présager d'un bilan plus élevé du massacre. La Centrafrique est plongée dans le chaos et un engrenage de violences communautaires et inter-religieuses entre chrétiens et musulmans depuis le renversement en mars du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par Michel Djotodia, qui l'a ensuite dissoute, tout en intégrant une partie de ses combattants dans les nouvelles forces de sécurité.