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Détention préventive, âge de responsabilité pénale, enlèvement d'enfants : Les précisions du ministre de la Justice

par Moncef Wafi

Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Louh, a de nouveau évoqué, ce jeudi, le dossier de la détention provisoire en se prononçant notamment sur la possibilité de son annulation. Dans une déclaration à la presse en marge de la session consacrée aux questions orales à l'Assemblée populaire nationale (APN) sur le projet de loi amendant et complétant l'ordonnance du 8 juin 1966 portant code pénal, le ministre a déclaré que l'atelier national consacré à l'examen de l'amendement du code de procédures pénales examine la possibilité d'annuler la détention provisoire et de maintenir la présomption d'innocence. La concertation autour de ce dossier sera élargie aux juristes et aux avocats, a-t-il expliqué. Un sujet déjà abordé, le 21 novembre dernier, lors d'un point de presse en marge d'une séance plénière à l'APN où il avait déjà rappelé le caractère exceptionnel de la détention préventive en annonçant que le code de procédure pénale sera revu à cet effet. La détention préventive est depuis longtemps décriée par les hommes de loi algériens alors que le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, estime qu'elle a donné lieu à « une industrie de mandats de dépôt » étant donné qu'elle est « abusivement appliquée » par les magistrats algériens.

L'atelier examine également la possibilité de prévoir un article sur la protection des témoins lors des différentes affaires de justice. Une révision phare, déjà annoncée par M. Louh, et qui touchera le code de procédure pénale avec la protection des témoins notamment en justice pénale. Le ministre avait reconnu, en novembre, les limites du présent code qui « ne contient pas de garanties pour le témoin dans les affaires pénales». Des garanties qualifiées de «nécessaires » surtout lorsqu'on connaît la difficulté qu'éprouvent les témoins et les pressions et intimidations subies de la part de la famille ou des amis d'un accusé. Concernant la modernisation de la justice, le ministre a affirmé que les prestations fournies par les différentes structures du secteur seront améliorées notamment à travers la création d'une banque de données.

Il a rappelé à cet effet que le citoyen pourra présenter un seul dossier pour le retrait du certificat de nationalité, dossier introduit dans la banque de donnée alors que l'opération devra être généralisée pour le casier judiciaire. Une démarche, précisera le ministre, à même d'alléger les contraintes bureaucratiques et améliorer le service. Il dira que plus de 1200000 cas administratifs et judiciaires ont été corrigés jusqu'à présent. Par ailleurs, et abordant un des sujets les plus médiatisés ces deux dernières années, le ministre de la Justice a jugé nécessaire d'appliquer les peines maximales contre les auteurs d'enlèvements, d'agressions sexuelles ou d'homicides sur des enfants.

En mars dernier, et au plus fort de la mobilisation citoyenne et l'emballement médiatique après les derniers meurtres d'enfants, Dahou Ould Kablia, alors ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales avait indiqué que le gouvernement envisageait la révision du code pénal dans sa partie relative aux peines appliquées aux auteurs d'enlèvements d'enfants. Rappelons que 204 cas d'enlèvement d'enfants ou de détournement de mineurs, dont 170 filles, ont été enregistrés par les services de la Sûreté nationale en 2012 contre 221 cas, dont 169 filles en 2011. Le premier trimestre 2013, les services de la police ont recensé près de 30 cas d'enlèvement dont 4 se sont terminés par un assassinat. Le volet des enlèvements d'enfants a été commenté par la classe politique puisque la députée FLN, Kheira Krifli, a salué les dispositions coercitives prévues par le texte en direction des auteurs d'enlèvement d'enfants. Les élus de l'alliance de l'Algérie verte (AAV) abondent dans le même sens que le FLN et le FJD et vont jusqu'à préconiser un durcissement des peines contre les coupables en appelant à l'application de la peine capitale devant l'extension des pratiques criminelles dans notre pays. Quant au PT, il s'est dit opposé à l'application de la peine de mort. Le ministre de la Justice a également insisté sur la protection des mineurs de moins de 10 ans et de ne pas les traduire devant la justice lorsqu'ils commettent des forfaits. Les mineurs âgés entre 10, 13 et 18 ans peuvent être déférés à la justice et condamnés à des peines légères ou des mesures sécuritaires dans les centres de rééducation, a soutenu M. Louh. Pour sa part, le RND par l'entremise de sa députée, Zina Wakni, estime «excessif» de réduire l'âge de responsabilité pénale à 10 ans au regard du nombre de crimes commis par des enfants âgés de 10 à 13 ans. Le FLN qualifie d'«injuste» la réduction à 10 ans l'âge de responsabilité pénale des mineurs; le PT, lui, la juge par contre «raisonnable». Le ministre de la Justice est revenu sur les derniers incidents survenus à Guerara, dans la wilaya de Ghardaïa en déclarant que des prévenus ont été placés en détention préventive que d'autres ont été relâchés et que l'enquête suit son cours.