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Tension sur le carburant à l'est du pays

par A. Mallem Et A. Ouelaa

« C'est à croire que la crise qui est partie de la wilaya de Tlemcen, a emprunté la voie rapide de l'autoroute Est-Ouest pour atteindre en si peu de temps les wilayas de l'extrême Est», a commenté ironiquement, hier, un chauffeur de taxi en parlant du phénomène de la tension sur le carburant (essence et gasoil) qui vient de faire son apparition à l'est du pays après avoir sévi à l'Ouest et au Centre. Notre interlocuteur s'est plaint en effet d'avoir passé toute la demi-journée à faire la queue, à une station d'essence de Skikda, pour faire le plein. Dans la région est, donc, la crise qui a commencé dans les villes frontalières de l'Ouest, qui avait atteint le centre du pays en faisant tâche d'huile vient d'atteindre les grands pôles urbains. «A Skikda, le pôle qui alimente la région est, nous ont déclaré hier des taxis qui font les lignes inter wilayas, la crise commence à se faire sentir puisque nous avons fait la queue durant presque une journée, pour être servis». Et l'information a été vérifiée hier matin à Constantine où nous avons pu constater dans plusieurs stations d'essence de longues files de véhicules venus s'approvisionner. «Oui, on peut dire que la crise est arrivée chez nous», nous a confirmé un automobiliste qui sortait d'une station-service après avoir passé deux heures pour arriver à la pompe et faire le plein. «Et c'est comme ça dans plusieurs wilayas », a soutenu encore un taxis faisant la ligne Constantine-Jijel qui s'est posé des questions sur les raisons de cette tension.

Des questions et des interrogations, il y en a beaucoup parmi les transporteurs et des rumeurs ont commencé à circuler sur de prétendues pannes au niveau des raffineries ou des centres distributeurs. Et des réponses convaincantes venant des responsables du secteur concerné, il y a en a eu très peu. Le directeur de l'énergie et des mines de la wilaya de Constantine, M. Bouzidi, que nous avons interrogé hier, a affirmé catégoriquement que «toutes les stations-service de la capitale de l'Est et de ses environs sont approvisionnées régulièrement. D'autant plus que Constantine est heureusement alimentée à partir de la raffinerie de Skikda, non par des camions citernes, mais par un pipeline qui débouche au centre de Naftal de Bounouara». Lui faisant remarquer que c'est un phénomène rampant qui est parti de l'extrême ouest du pays et vient d'atteindre maintenant l'extrême Est, nous avons demandé où se situent les carences ? Et notre interlocuteur de s'aligner sur les dernières déclarations du PDG de Naftal en évoquant la pression qui s'exerce toujours en début de l'été, période qui coïncide cette année avec l'arrivée du mois de Ramadan, durant laquelle et selon lui, les gens ont tendance à beaucoup bouger. Et il a expliqué enfin que Constantine, qui constitue un carrefour entre le Nord et le Sud, l'Est et l'Ouest, s'en trouve naturellement touchée par cette forte convergence d'automobilistes. Refusant de parler de pénurie, M. Bouzidi a pointé du doigt les passagers venant des wilayas environnantes «qui ont provoqué cette pression dans les stations d'essence», a-t-il dit.

En tout cas, il semble évident maintenant que toute la région est se trouve à son tour affectée par le phénomène de la contrebande de carburant qui sévit plus particulièrement tout le long de l'année sur la bande frontalière avec le pays voisin de l'Est. Selon des informations recueillies dans la wilaya d'El-Tarf, la tension, sur le gasoil notamment, s'est accentuée et de longues chaînes de véhicules de tous tonnages sont aujourd'hui visibles dans les stations-service. D'autre part, les gérants de ces stations ont signalé que les quantités de carburants qui leur sont distribuées habituellement ont été réduites de moitié. Avec les besoins grandissants des engins utilisés dans l'agriculture ou dans les travaux publics ou les motopompes pour l'irrigation des terres qui fonctionnent à plein régime durant la période estivale, l'explication est vite trouvée. Et dès lors, le phénomène de la contrebande transfrontalière est pointé du doigt, celui-ci étant devenu désormais un commerce très lucratif. Les informations indiquent que les nombreux véhicules utilitaires, tels que les Toyota Hilux, les Mercedes et les Peugeot dont le réservoir peut contenir plus de 100 litres, viennent plus fréquemment faire la chaîne dans les stations et ils sont pour beaucoup dans cette pénurie. Et leurs propriétaires n'hésitent pas à les envoyer, plus loin dans les autres wilayas de l'Est pour s'approvisionner. Ce qui explique peut-être les pénuries qui commencent à se généraliser.