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Athlétisme - Evocation : Hadj Boutaleb, ou l'amertume d'un ancien champion

par Mohamed Ghriss

Hadj Boutaleb est un ancien athlète chélifien qui a obtenu lors du championnat national militaire du marathon de 1978 la médaille d'or et a connu également la même consécration lors du championnat militaire en 1979 à Tamanrasset. Né en 1954 à El Marsa, dans la wilaya Chlef, Hadj Boutaleb a effectué ses études primaires à l'école du quartier Hay Bensouna de Chlef avant de se retrouver tôt plongé dans la vie active tout en s'attachant à la pratique sportive de la marche. Remarqué pour sa prestance, il poursuit cette activité lorsqu'il adhère en 1971 au FAJ, le foyer d'animation des jeunes du quartier. Depuis, il se consacra corps et âme à la pratique de la marche et du cross-country, prenant exemple sur le grand athlète chélifien Gouasmi des années soixante-dix, bien avant l'apparition du grand champion Noureddine Morcelli. Par la suite, au championnat régional militaire du marathon à Boumerdes, en 1978, le jeune Boutaleb obtient la 2ème place, sur un parcours de 20 km, devancé par le grand espoir de cette époque Kachkouch Ammar, champion d'Afrique de sa catégorie. Auparavant, il s'était également classé second toujours après Kachkouch, lors du championnat organisé à Oran. Et pour rappel, dans cette même capitale de l'Ouest, fut organisé en 1976 le cross international Junior «Chahid Othmane» sur un parcours de 8km où Hadj Boutaleb s'est classé quatrième, devançant le jeune Saïd Aouita, avant son heure de gloire. Quelques années plus tard, au championnat national de cross-country au 5 juillet à Alger en 1980, Boutaleb arrive en 4ème position. Par ailleurs, la raison de la montée en flèche de l'athlète marocain Said Aouita et de la méforme affichée des athlètes algériens de sa génération, tels que Hadj Boutaleb et autres, sont que ces derniers n'étaient pas suffisamment pris en charge. Hadj Boutaleb, par exemple, était supposé parrainé par l'entreprise de la DNC après son service national. Mais dans les faits, il y avait un manque de suivi dans la préparation adéquate aux compétitions sportives nationales et internationales. Pour le reste, Hadj Boutaleb doit sa subsistance grâce au métier de menuisier qu'il apprit afin d'assurer les revenus de ses vieux jours, ce qui a mis fin à ses espoirs de prise en charge effective par les instances sportives nationales. A ce propos, Hadj nous confiera ses regrets et son dépit de voir les équipes de football privilégiées au détriment des athlètes des différentes catégories sportives. Et pourtant, observe pertinemment Hadj Boutaleb, «l'investissement dans un athlète revient de loin beaucoup moins cher que dans des équipes car tout le monde sait que lors des compétitions internationales, tels que les jeux olympiques, ce sont ces derniers qui ont à chaque fois contribué à hisser haut les couleurs nationales ! En somme, un seul athlète vaut son pesant d'or par rapport à des dizaines d'autres disciplines sportives, ceci dit sans chercher à diminuer le mérite d'une quelconque pratique sportive. Mais le fait est là, on a laissé tomber beaucoup d'athlètes nationaux alors très prometteurs en leur temps et on a préféré investir très largement dans des secteurs sportifs voués aux échecs qui se répétaient d'année en année jusqu'à ce qu'on soit arrivé à recourir à l'apport des sportifs binationaux ! Pourtant on aurait pu privilégier la formation et le suivi tant à ce niveau qu'à celui des athlètes des autres catégories dont nombreux ont dû être contraints d'abandonner, complètement délaissés», témoignera-t-il. Et d'ajouter : «Et effectivement, c'est bien ce qu'on constate aujourd'hui avec nombre d'athlètes nationaux, tels les Brahmia, Morcelli, Mekhloufi, etc, qui doivent leurs hautes performances au bon suivi dans un cadre préparatoire hautement compétitif à l'étranger. Aussi, il est grand temps qu'une véritable réforme touche ce secteur sportif et celui de l'éducation sportive, en général, afin d'entrevoir dès aujourd'hui de possibles satisfactions à l'avenir». Avant de clore cette rétrospective, il y a lieu de signaler que le fils de Hadj, en l'occurrence Abdelhak Boutaleb, 26 ans, est devenu lui également un adepte de la marche et du cross-country , un mordu du sport comme son père, qui a pris part à la dernière compétition internationale du semi- marathon de Bruxelles du 27 mai 2012 écoulé. Et sur 35 000 participants, le jeune algérien s'est classé 3ème, une performance source d'une grande satisfaction pour Abdelhak Boutaleb et son père Hadj, surtout que ce jeune espoir marathonien a participé à ce meeting organisé en Belgique avec ses propres moyens, l'athlète n'ayant jamais été à ce jour pris en charge par quiconque bien qu'il en avait exprimé maintes fois le vœu. Comme quoi, il reste beaucoup à faire pour les instances publiques nationales en matière de prospection et d'encouragement des espoirs dans les diverses disciplines sportives du secteur et pas seulement dans celui du sport roi. en l'occurrence le football, assez connu pour mobiliser la part du lion, question investissements, comparativement aux maigres fonds alloués à la promotion des diverses branches de l'athlétisme dont les adeptes ont pourtant, bien souvent, valu de grandes satisfactions à l'Algérie au niveau international?alors que la plupart des familiers de cette discipline sont relégués à l'oubli, pour ne pas dire l'abandon, en cours de route. Inutile d'ajouter à ce propos, que l'idée en l'air d'une réforme du secteur des sports, est ardemment souhaitée par la quasi -totalité des milieux sportifs du pays, à l'instar des réformes annoncées dans les autres domaines de la vie nationale.