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Union europeenne - Chine : Le choc des Titans

par Bureau De Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med

Disposant des plus grandes réserves financières au monde et du premier marché de consommation, la Chine négocie avec l'UE une stratégie économique du gagnant-gagnant.

A Bruxelles, un «Traité sur l'investissement» a été évoqué.

Lorsque l'UE, première économie mondiale, rencontre la deuxième économie mondiale qu'est la Chine, il ne peut être question autre que de commerce et d'affaires. A aucun moment il n'a été question de politique et de droits de l'homme, entre les deux partenaires, durant les deux jours de la visite du 1er Ministre chinois à Bruxelles (mercredi et jeudi). C'est que la coopération entre les deux parties progresse, malgré les aléas liés aux problématiques des libertés et droits humains, si chers à l'Europe, à la vitesse grand «V» en volume et en qualité. Alors que dans les années 80, la coopération sino européenne était nulle, elle «explosa» dès que la Chine fut devenue membre de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), en décembre 2001.

Ainsi, au cours de ces dernières années, l'échange commercial entre la Chine et l'UE a augmenté de 400%, passant de 101 milliards d'euros en 2000 à 395 milliards d'euros en 2010. Toutefois, le solde est en faveur des Chinois. 113 milliards d'euros de marchandises européennes exportées vers la Chine en 2010, contre 282 milliards d'importations chinoises. Le déficit commercial européen concerne, essentiellement, le secteur des produits manufacturés, représentant 94,6 % des importations totales de l'UE, avec un total de 193 milliards d'euros, en faveur de la Chine. Mais au-delà de ces chiffres impressionnants, les dirigeants européens ont tenu à soulever un nombre d'obstacles d'ordre juridique et politique qui faussent le jeu de la concurrence entre les deux partenaires, au détriment des entreprises européennes. Les Européens reprochent au gouvernement chinois d'user du dumping économique en subventionnant les entreprises chinoises, notamment dans le secteur de la construction automobile et de l'industrie lourde. De même pour la faible protection de la propriété intellectuelle qui hypothèque l'expansion des entreprises européenne en Chine. Bref, les Européens reprochent aux Chinois de ne pas respecter les règles du jeu, malgré leur adhésion au protocole des accords de l'OMC. Ils estiment aussi que la bureaucratie chinoise (et la corruption) est un véritable frein au développement d'un partenariat sain et équilibré.

Pour sa défense, la Chine estime que l'ouverture totale de son marché, soit sa libéralisation, demande du temps et progresse par paliers. C'est pourquoi la Chine tient à ce que ses entreprises, dans le secteur de l'automobile ou des télécommunications par exemple, disposent de la majorité (51 %) dans le partenariat et le système de «Joint Venture». Cependant, la Chine dispose d'un argument de taille pour défendre sa politique commerciale : une partie de l'excédent commercial chinois vers l'Europe est due à des exportations d'entreprises européennes installées (délocalisées) en Chine. Ce qui revient à cette étrange conclusion : les entreprises européennes installées en Chine exportent en quantité vers l'Europe et gonflent le chiffre des exportations chinoises, alors qu'elles rapatrient une majorité de leurs capitaux en Europe. Cependant, les deux parties en reconnu que les difficultés et incompatibilités politiques d'aujourd'hui ne doivent pas hypothéquer leur avenir. Les études stratégiques montrent que d'ici l'an 2025, la Chine sera la première économie mondiale en termes de volume de consommation, d'autant plus qu'elle disposera d'une classe moyenne supérieure en nombre à l'UE. D'où l'idée d'un «Traité d'investissement» entendue, jeudi à Bruxelles qui recadrerait les relations commerciales et économiques. Pour l'heure, la Chine s'est dite disposée à aider plus l'UE dans la résorption de sa crise des dettes souveraines. La Chine participe déjà au rachat des titres de dettes européennes et a engagé 43 milliards de dollars au FMI ainsi qu'un soutien, à la demande de l'Europe, au Mécanisme européen de sauvetage (MES). Enfin, à Bruxelles ont été signés quatre accords concernant l'innovation, la concurrence, l'industrie spatiale et l'environnement.