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Syrie : Bachar Al Assad dit qu'il ne partira pas

par Yazid Alilat

Le président syrien Bachar Al Assad ne partira pas, ne cèdera pas le pouvoir et la révolte sera vaincue. C'est en quelque sorte le message qu'il a adressé, hier mercredi, aux pays occidentaux qui veulent le pousser vers la porte de sortie, et que la réunion jeudi du Conseil de sécurité de l'ONU, convoquée par la France qui va en assurer la présidence, devrait confirmer. Dans une interview à la chaîne TV syrienne privée «Addounia», il explique : «je peux résumer la situation en une phrase : nous progressons, la situation sur le terrain est meilleure mais nous n'avons pas encore gagné, cela nécessite encore du temps». Il attaque même de front l'idée de la création de zones tampons, lancée aussi bien par la France que par la Turquie dans les zones de combat. «Parler de zones tampons n'est premièrement pas sur la table, et deuxièmement c'est une idée irréaliste même pour les Etats hostiles et ennemis de la Syrie», a-t-il dit. D'autre part, il s'est moqué des déserteurs et ceux qui ont fui le pays. «Les gens patriotes et les gens bien ne s'enfuient pas, ne quittent pas la patrie. Finalement, cette opération est positive, c'est une opération d'auto-nettoyage de l'Etat premièrement et de la nation en général», a-t-il relevé, avant de saluer les forces armées du régime qui «mènent des actes héroïques». «Ce sont les forces armées qui résistent le plus dans ce pays», a-t-il précisé, affirmant que le peuple syrien le soutient toujours. «Malgré les nombreuses erreurs, il existe un lien solide» entre le régime et le peuple syriens, selon Assad qui a affirmé en outre que «tout le monde est inquiet pour sa patrie, c'est normal. Mais ils (les anti-régime) ne parviendront pas à répandre la peur, ils n'y parviendront jamais». «Je dis aux Syriens, le destin est entre vos mains et pas entre les mains d'autrui», avant de relever que ?la Syrie n'a pas besoin de leçons dans les questions de souveraineté ni les questions nationales, ni des pays amis, ni des pays ennemis». Cette sortie du président syrien coïncide en fait avec les préparatifs d'un sommet des pays non alignés à Téhéran où la Syrie sera, bien entendu, au menu des travaux de cette rencontre que l'Iran voudrait orienter vers la création d'un groupe de sages pour amorcer un dialogue serein entre le régime et l'opposition.

L'Iran doit présenter au sommet des non-alignés (jeudi et vendredi) une «proposition» de règlement, dont les détails n'ont pas été révélés. Même si, dimanche dernier, le chef de l'Etat syrien avait fermé la porte à tout dialogue avec l'opposition. En recevant un émissaire iranien, Alaeddine Boroujerdi, il a martelé que «le peuple syrien ne permettra pas au complot étranger de réussir» et le vaincra «à n'importe quel prix».

FAROUK AL-CHAREH CROIT AU DIALOGUE

Par contre, l'inamovible Farouk Al-Chareh, le vice-président syrien, est plus nuancé. Dans des déclarations rapportées mardi par le quotidien local El Watan, il a estimé que la solution en Syrie passait par «un arrêt des violences de la part de toutes les parties» afin de permettre «un dialogue national».

 «La base d'un règlement sans conditions préalables de la crise en Syrie passe par l'arrêt des violences de la part de toutes les parties et le lancement d'un dialogue national», a-t-il déclaré, selon son directeur de cabinet, à M. Boroujerdi. Cela «aidera l'ensemble des Syriens, au gouvernement comme dans l'opposition, à entrer dans un dialogue national et à en accepter les résultats», a-t-il encore affirmé à Alaeddine Boroujerdi, président de la commission parlementaire iranienne pour la politique étrangère. Celui-ci a de son côté estimé que la solution militaire était «dans l'impasse», et appelé à «favoriser la solution politique», dans une allusion à peine voilée au dialogue entre le régime et l'opposition.

Sur le front diplomatique, la France va présider jeudi soir à New York une réunion du Conseil de sécurité sur la Syrie avec la présence des ministres des Affaires étrangères du Liban, de la Jordanie, de la Turquie et l'Irak, voisin de la Syrie. Mais, à cette réunion, qui devrait lancer un «appel à la conscience mondiale et à la mobilisation» humanitaire, seront absents les chefs de la diplomatie de Chine, de Russie et des Etats-Unis. Une sorte de «fin de non-recevoir» décrétée par les trois pays membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU à l'initiative française. Par ailleurs, la Russie, alliée du régime syrien, a exigé une «enquête impartiale» en Syrie après l'attentat meurtrier de mardi près de Damas qui a fait 27 morts selon un bilan définitif, et la découverte deux jours plus tôt de plus de 200 corps à la suite d'offensives de l'armée, a indiqué mercredi le ministère des Affaires étrangères.

Sur le terrain, les combats n'ont pas baissé d'intensité, et se poursuivent dans et autour des villages périphériques de Damas, ainsi qu'à Alep où les deux parties semblent se neutraliser. Pour autant, le mouvement des réfugiés se poursuit, des milliers de personnes fuyant le pays qui s'est inexorablement enfoncé dans la guerre.