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Présidence de l'APN : Le FLN défend son choix

par Ghania Oukazi

Le FLN encense Larbi Ould Khlifa et le présente «fièrement» comme étant «l'homme de la situation» après l'avoir «élu» à la majorité absolue comme président de la 7è Assemblée nationale.

C'est contre toute attente et à la surprise de tout le monde que Larbi Ould Khlifa a succédé, samedi dernier, à Abdelaziz Ziari, au perchoir de l'Assemblée issue des élections législatives du 10 mai dernier. A aucun moment, le FLN ne pensait élire celui qui présidait le Haut Conseil de la langue arabe à la tête de l'APN. Il est clair que la décision ne lui incombe pas. Elle lui a été dictée par la présidence de la république dont le premier responsable semble commencer à faire attention à tout ce qui pourrait porter préjudice à son choix des hommes auxquels il a ,grandement, failli depuis 1999, année de sa première élection à la magistrature suprême. Mais d'avis d'observateurs, il n'a pas fait mieux aujourd'hui en concédant le poste de président de l'APN à, disent-ils «un inconnu des rangs du FLN», le parti majoritaire. C'est ainsi que Rachid Hraoubia semble avoir été victime de manœuvres de dernières minutes et de dernière instance. Le ministre de l'Enseignement supérieur avait toutes les garanties requises pour succéder à Ziari. Il devait d'ailleurs être pour cela, tête de liste FLN dans la capitale mais les fortes contestations des jeunes militants du parti notamment avaient obligé les véritables responsables de l'élaboration des listes des candidatures à le placer à la tête de la liste de sa ville natale Souk Ahras. «Pourra-t-il prétendre à la présidence de l'Assemblée alors qu'il ne dirige pas la liste d'Alger?» avions-nous interrogé à l'époque au niveau du FLN. «Rien, ni aucun texte réglementaire n'empêcherait de l'élire en tant que tel même s'il n'est pas candidat à Alger,» nous avait répondu un responsable sûr de ce qu'il avançait.

L'on dit toujours que le pouvoir en place garde en main plus d'une carte pour les abattre au moment opportun. Il en donne, aujourd'hui, encore une fois la grande preuve. Il est évident que le fait que Hraoubia ait été donné comme très proche de Saïd Bouteflika, le frère du chef de l'Etat, ait beaucoup joué dans le refus de le désigner comme président de l'Assemblée. Proches collaborateurs l'un de l'autre lorsqu'ils étaient tous les deux, le premier recteur et le second enseignant à l'université de Bab Ezzouar , Rachid Hraoubia et Saïd Bouteflika ont, selon des sources sûres, directement, contribué à la confection des listes FLN pour les élections passées. Il paraît que pour le président de la République, il n'est pas question de laisser «spéculer» sur la chose plus qu'il n'en faut.

LE CHOIX INATTENDU D'UN «INCONNU DES RANGS DU FLN»

«Oui? mais il fallait aller vers le plus convaincant des choix,» nous a répondu, hier, avec une grande hésitation, un responsable du FLN à propos de ce rejet inattendu du ministre de l'Enseignement supérieur et du choix définitif de Ould Khlifa. Ce dernier est du coup présenté comme étant «l'homme qu'il faut à la place qu'il faut.» Des sources de la présidence de la république mettent en avant les origines et le caractère de l'homme qui ont prévalu à son intronisation à la tête de l'APN. «Il est né à Tizi Ouzou, en grande Kabylie, il maîtrise parfaitement la langue arabe, c'est un universitaire, il est intègre?» commencent nos interlocuteurs à dire. Il est présenté comme étant «un homme consensuel». L'on note ainsi que Ould Khlifa répond à des considérations d'équilibre régional que le pouvoir s'impose de prendre en compte. «Il est du centre du pays et n'a jamais été un homme de conflit,» souligne-t-on. L'on rappelle pour la circonstance que le nouveau président de l'APN a été cette carte que le président de la République avait sortie à la dernière minute pour pourvoir le tête-de-liste de la capitale.

En effet, pris d'assaut par les contestataires des listes électorales, entre militants de base, ministres et autres hauts responsables d'institutions dont les va et vient étaient devenus incessants, le Mouflon d'Or où Belkhadem passait le plus gros de son temps à l'approche des élections législatives, n'avait vu arriver Ould Khlifa qu'à une heure à peine avant la clôture définitive des candidatures. Il y était venu ce jour là vers 10h du matin avec son chauffeur et il était rentré par une porte que personne n'avait le droit d'emprunter, excepté le secrétaire général du FLN. Une heure à peine après, il en était ressorti aussi discrètement qu'il en était entré.

«CETTE ASSEMBLEE VERRA DE GRANDES SURPRISES»

A cet instant, les yeux des contestataires s'étaient rivés sur la voiture qu'il l'avait ramené et l'avait repris en étant garé le plus près possible de la fameuse porte. De courts instants après, les listes des candidatures commençaient à être divulguées au grand jour.

C'est dire que Ould Khlifa été le nom de la personne qui avait été trouvé à la dernière minute pour sauver la face à des faiseurs de candidats qui voulaient se montrer attentifs aux doléances des contestataires. A l'époque, les noms des ministres FLN comme têtes de listes de nombreuses wilayas, provoquaient de l'urticaire à leurs collègues militants notamment les jeunes qui voulaient tout autant l'être au nom du «changement».

Reste à savoir si Hraoubia pourra récupérer son siège de ministre qu'il a cédé temporairement pour raison de campagne électorale, au ministre de la jeunesse et des sports El Hachemi Djiar. Mais ceci est une autre question de calculs et de choix qui prévaleraient pour le changement ou pas du gouvernement Ouyahia.

Au passage, et du coup aussi, on dit que Hraoubia ne pouvait présider l'APN parce qu'il est malade. «Le président de la nouvelle assemblée doit être féroce,» avait lâché Belkhadem il y a quelques jours, sûrement avant que le nom de Ould Khlifa ne lui soit imposé. Parce qu'entre être féroce et être nerveux, il y a toute une philosophie de calculs que seuls les premiers détenteurs du pouvoir maîtrisent. Ils savent pertinemment en effet, que Ould Khlifa est juste très nerveux. Au FLN, on met en avant ses nombreux écrits sur, particulièrement, la philosophie, la langue arabe, les sources identitaires pour dire de l'homme qu' «il peut être féroce dans le choix de ses idées.»

«Il saura l'être quand il le faut,» nous dit-on à ce niveau. «Cette Assemblée verra de grandes surprises,» promet-on en plus. Le FLN compte beaucoup sur les présidents des différentes commissions parlementaires qu'il doit choisir en tant que parti majoritaire. Ould Khlifa pourra certainement compter sur ces futurs responsables de l'Assemblée qui l'aideront sans nul doute, à devenir «féroce» quand il le faut.