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Présidentielles françaises: Les musulmans en rangs dispersés

par Moncef Wafi

Aspect non négligeable dans la course à l'Elysée, l'électorat musulman est perçu autant comme cible privilégiée d'une campagne présidentielle à la lisière du racisme et jouant insidieusement sur la fibre anti-islam, thèmes chers à l'extrême droite, copier-coller par le parti au pouvoir en panne de programme, mais aussi vivier incontestable de voix pouvant départager Sarkozy et Hollande au deuxième tour, si d'aventure ces deux candidats respectaient les sondages d'opinions. Pourtant, cette «entité» qui pourrait départager les candidats en lice n'apparaît pas comme une force de frappe, minée qu'elle est par des dissensions internes apparues au grand jour ces dernières années avec la mainmise de l'Administration sur certains aspects de culte liés à la communauté musulmane. Cette campagne présidentielle, qui a braqué la lumière des projecteurs sur les musulmans de France à travers la polémique de la viande hallal lancée par les «Lepénistes» et reprise comme un thème électoral par les «Sarkozystes» met à nu un clivage sans cesse grandissant entre les principaux courants qui quadrillent les musulmans hexagonaux. Le CFCM, Conseil français du culte musulman, créé par Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'Intérieur, chargé des cultes, représente théoriquement les 2,1 millions de musulmans déclarés, alors que d'autres statistiques non officielles les estiment entre 4 et 6 millions. Un poids électoral important qui peut peser mais qui se trouve tiraillé entre la Fédération Nationale de la Grande Mosquée de Paris (FNGMP), que l'on dit proche de l'Algérie, le Rassemblement des musulmans de France (RMF), proche, quant à lui, de Rabat et l'Union des Organisations Islamiques de France (UOIF) sous obédience des Frères musulmans. L'élection de Mohammed Moussaoui à la tête du CFCM, en juin dernier, a accentué ces différences puisque la FNGMP l'avait critiqué avant de faire marche arrière et l'UOIF l'avait rejeté. La réaction de M. Moussaoui aux propos du Premier ministre français François Fillon sur l'abattage hallal a été jugée tardive et timide par rapport à celle du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) qui n'avait pas tardé à réagir fortement. Ainsi, et sur fond des présidentielles françaises, certains courants, comme l'UOIF, pourraient se replacer sur l'échiquier du CFCM dont la réforme de ses statuts, prévue début 2012, était renvoyée après les deux tours présidentiels. Ce projet signé par le CFCM, le 16 février dernier, repose sur trois points principaux: un nouveau mode de gouvernance avec des consultations électorales plus espacées, une collégialité accrue et une représentativité au m2 plus équilibrée, ce que conteste l'UOIF.