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Transfert illégal de capitaux vers l'Espagne: Le procès de nouveau reporté

par Houari Saaïdia

Prévue hier devant la cour d'Alger, l'affaire du transfert illégal de capitaux vers l'Espagne a été renvoyée au jeudi 5 avril.

C'est le deuxième report consécutif que connaît ce procès en appel, impliquant 53 personnes entre businessmen, entrepreneurs, commerçants ou de simples passeurs de devises et autres courtiers, et portant sur plus de 600 millions d'euros. Le motif d'ajournement, cette fois-ci, est en rapport avec les conditions d'organisation de l'audience qui, selon les avocats à l'origine de la demande de renvoi, ne se prêtaient pas à la tenue d'un procès de cette envergure, notamment l'exiguïté du prétoire et l'enrôlement du dossier parmi un gros paquet d'affaires de droit commun. Les robes noires ont ainsi réclamé la programmation d'une audience exclusive pour cette affaire. Le tribunal a accédé à cette demande, accordant en même temps un délai suffisant pour cela.

 Au premier jugement rendu le 5 janvier par le pôle spécialisé du Centre, sis tribunal de Sidi M'hamed, les 53 accusés avaient été tous condamnés, écopant de peines entre 10, 7 et 3 ans de prison ferme, assorties de lourdes amendes. Quinze d'entre eux ont été condamnés, par défaut, à la peine maximale prévue par la loi, à savoir 10 ans d'emprisonnement, soit la sentence requise par le représentant du droit public. Treize accusés, qui étaient en détention provisoire, avaient écopé de 7 ans de prison ferme, alors que vingt-cinq autres, en liberté provisoire, avaient été condamnés à 3 ans d'emprisonnement. Les 53 personnes condamnées devaient, en outre, verser solidairement un montant faramineux à la Douane algérienne. La partie civile avait en effet vu sa demande d'être dédommagée à hauteur de cinq fois le montant global des devises transférées, soit l'équivalent de quelque 3 milliards d'euros accordés par la justice au titre de l'action civile.

 Outre le délit de contrebande (de devises), passible d'une peine d'emprisonnement de 1 à 5 ans, assortie d'une amende égale à 5 fois la valeur de la marchandise sur laquelle porte l'infraction, les 53 accusés sont sous le coup de l'article 1 de l'ordonnance 10-03 du 26 août 2010 relative à la répression de l'infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l'étranger. Le blanchiment d'argent fait partie également des griefs retenus contre nombre de mis en cause.

 A l'origine du déclenchement de toute cette affaire : une liste «noire» où figuraient 43 noms d'Algériens suspectés d'appartenir à un réseau transfrontalier de soutien financier au terrorisme et au crime organisé, transmise par les autorités espagnoles à l'Algérie, au milieu de l'année 2009, dans le cadre de la coopération judicaire entre les deux pays. Etablie dans le cadre de la traque des fonds susceptibles de financer le terrorisme et le grand banditisme, des recherches pour définir la traçabilité des fonds transférés par des étrangers vers des banques ibériques ont accouché de cette liste nominative et ont servi de fil d'Ariane aux enquêteurs algériens. Le 13 janvier 2010, la PJ de la sûreté de wilaya d'Alger clôt son enquête préliminaire visant 44 «passeurs» présumés de devises fortes vers l'autre bout de la Méditerranée, ordonnée 9 mois auparavant par le parquet général d'Alger. Avril 2009, le dossier gagnera en épaisseur suite à une plainte des services de la Douane de l'aéroport d'Alger, et à une autre procédure déclenchée par le tribunal d'Oran concernant 27 opérateurs basés dans l'Oranie.