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Quatre condamnations dans une affaire de fausse monnaie

par Houari Saaïdia

Dimanche 11 mars. Tribunal criminel d'Oran. Une affaire de trafic de faux billets de banque est appelée. Trois mis en cause répondent présents au box. Un quatrième est absent ; il est en état en fuite. Après la lecture donnée par le greffier des faits consignés sur l'arrêt de la chambre d'accusation, les accusés comparaissent à la barre, à tour de rôle. La présidente d'audience les interroge, les confronte, leur pose des questions-pièges? A chaque fois où un accusé fait un revirement dans ses déclarations, elle lui lit son PV d'audition devant le juge d'instruction. Là, le prévenu ne peut plus prétexter une quelconque contrainte ou pression qui aurait été exercée sur lui pour lui arracher des aveux, contrairement au cas où il est question de P.V de police. Lequel document n'a d'ailleurs pas, devant la justice, le même crédit que le PV du juge d'instruction, sa valeur juridique se limitant au titre du simple renseignement. Peu à peu, le public et les deux jurés que le tirage au sort a fait d'eux juges, le temps d'un procès, sont éclairés sur l'affaire, en saisissent les détails.

 Tout a commencé par une plainte d'un citoyen. Le 7 septembre, un mandataire exerçant aux halles centrales se présente auprès du commissariat du 6e arrondissement, munis de 4 faux billets de 1.000 DA, portant le même numéro de série. Ces coupures contrefaites les lui ont été glissées dans un paquet de vrais billets, par un client qui lui a acheté des fruits et légumes. Identifié, le client mis en cause est arrêté le lendemain, dans le même marché de gros. Il affirme avoir été victime d'un abus de confiance par deux hommes habitant à El-Hamri, qui lui ont fait passer sous le nez une liasse de faux billets, lors d'une petite transaction commerciale. Après une perqusition «négative» dans le domicile de ce revendeur de légumes, la police met la main sur leux deux suspects qu'il a lui-même dénoncés. Le même récit se répète. D'arrestation en arrestation, la chaîne s'allonge, la piste bifurque sur plusieurs voies. Mais toujours rien de palpable jusque-là, aucun élément matériel (autres faux billets, matériel de contrefaçon?) n'est détecté.

 De fil en aiguille, et au bout d'une longue investigation, les enquêteurs remontent enfin à la source du trafic.

 Il s'agit d'un jeune de 29 ans, répondant aux initiales M.A. La police fouille sa maison à Gambetta et y trouve un lot de matériel informatique qui était utilisé pour scanner des billets. Le faussaire reconnaît avoir fabriqué dans son petit atelier, 42.000 DA. Il en était qu'à ses débuts. Pour mettre en circulation la fausse monnaie, il comptait sur l'aide de 2 complices, F.A. et B.F. Ces derniers tomberont facilement dans les filets, mais nieront tout.

 Dans sa plaidoirie, l'avocat du principal accusé a souligné que «le tribunal doit prendre en considération, une fois dans la salle des délibérés, qu'il a affaire dans le cas d'espèce à un petit contrefacteur amateur, plutôt naïf, et non à un réseau de faux monnayeurs bien structuré et équipé, d'où ma sollicitation de remettre ce dossier à sa juste proportion, tout en accordant les plus larges circonstances atténuantes à ce cas social.» Le ministère public a requis 15 ans de réclusion contre les trois accusés détenus, pour «assaociation de malfaiteurs, contrefaçon de papier-monnaie ayant un cours légal et distribution de faux billets de banque.» A l'issue des délibérations, le principal accusé a écopé de 4 ans d'emprisonnement. Ses 2 complices ont écopé de 3 ans d'emprisonnement. Le quatrième accusé, en fuite, a été condamné à la réclusion à perpétuité par contumace.