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L'arrêté sur le registre de commerce va faire des vagues en 2012

par Hafidh Abdelsalam

L'application du nouvel arrêté du 13 juin 2011 portant renouvellement du registre de commerce arrive à échéance pour les 35.518 sociétés d'import-export inscrites au registre de commerce et les 1.802 commerçants étrangers opérant dans les activités de distribution de détail.

Ces deux catégories ont jusqu'au 31 décembre 2011 pour se conformer à la nouvelle règlementation.

Mais à quelques jours de l'expiration de ce délai, cette nouvelle mesure soulève râles et soupirs. Elle a aussi quelques partisans. Enquête.

Pour de nombreux opérateurs économiques, les dispositions de l'arrêté portant renouvellement du registre de commerce «visent d'abord à traquer la fraude. Ensuite? à traquer la fraude». Mais, pour le directeur du Centre national du registre de commerce (CNRC) d'Oran, M. Azzedine Dif cet arrêté répond à un besoin de maîtrise de l'activité et d'une réorganisation dans le secteur. «Avant le registre était définitif, maintenant, il devient valable deux ans pour trois catégories d'activité, à savoir, ceux qui font l'import-export, ceux qui font le gros et les étrangers qui exercent dans le détail. Les mesures d'application ne se font pas d'un seul coup mais progressivement». «Pour le moment», dira-t-il, «sont concernés par le renouvellement les sociétés d'import-export. Pour toutes ces activités, Il y a le principe de l'homogénéité de l'activité à respecter, précise M.Azzedine Dif. Les importateurs étaient libres avant d'importer tout ce qu'ils voulaient avec un seul registre et avoir autant de codes qu'ils voulaient. Ils pouvaient importer aussi bien les produits agricoles que la quincaillerie. Mais, maintenant, la nouvelle règlementation impose aux importateurs d'opérer en groupes d'activité. «Une forme de spécialisation des importateurs», indique le directeur du CNRC d'Oran, avec une précision de taille, «cette spécialisation ne signifie pas une restriction pour d'autres activités. Il faut pour cela des registres secondaires avec de nouveaux locaux». Un importateur spécialisé dans la décoration, par exemple, est autorisé à prendre tous les codes d'importations des articles de la décoration. Mais s'il veut faire dans l'importation des produits pharmaceutiques, il doit se doter d'un autre registre avec un autre local. «Dans ce cas, l'homogénéité est basée sur trois principes. Le premier est celui du respect de la santé du consommateur. Le deuxième est le respect de l'environnement et enfin le respect du produit lui-même. Si l'importateur importe du médicament, il ne doit pas le mettre avec des produits périssables ou avec des produits chimiques qui dégagent des gaz», souligne le premier responsable du CNRC d'Oran.

L'UNOP DEPLORE

Pour de nombreux importateurs, cela représente un acte bureaucratique et une formalité supplémentaire. Ce à quoi répond le même responsable qui rassure que le délai de délivraison du sésame pour commercer a été réduit entre 24h et 48h et pour des cas exceptionnels, le registre peut être délivré sur place monnayant un casier judiciaire, un extrait de naissance, un bail de location et le paiement des frais d'enregistrement. Kada Berrahal, seul importateur de sucre à l'Ouest, estime que «cette nouvelle mesure représente une bureaucratie de plus pour les gens qui sont en règle dans leur activité même si au départ le but de cette opération était d'assainir la situation des fraudeurs qui ne payent pas leurs impôts». Cette nouvelle procédure avec constitution du dossier et paiement des frais d'enregistrement est un travail de plus qui met l'importateur à l'épreuve de la bureaucratie. Quant à l'efficacité du remède, beaucoup sont dubitatifs et considèrent qu'il y a d'autres moyens pour traquer les fraudeurs. Le dépôt du G50 (déclaration mensuelle d'impôts) chaque mois est une solution contre ce phénomène. «Si l'opérateur ne dépose pas son G50, il doit être automatiquement bloqué pour l'accomplissement de toute autre opération de transaction. Alors qu'avec le renouvellement du registre tous les deux ans, il faut attendre 24 mois pour les identifier». Concernant la diversification des registres en fonction de la multiplication de l'activité, le même opérateur économique explique qu'avant un seul registre était valable pour l'importation, la transformation et les prestations avec des codes différents, maintenant, il faut un registre pour chacune de ces activités et cela pose plusieurs problèmes bureaucratiques.

«CONFUSION»

Le président de l'Union des opérateurs de la pharmacie (UNOP), M.Nabil Mellah, considère, pour sa part, que «cette nouvelle mesure constitue une bureaucratie de plus pour les importateurs et producteurs de médicaments étant donné que la traçabilité de cette activité est parfaite puisque l'opérateur détient un agrément et une autorisation d'exercer dans le secteur. «Le problème qui se pose actuellement est l'obligation de créer un registre secondaire pour autre activité. C'est le cas de l'importation des laits médicaux. Pour un chiffre d'affaires de 2%, l'importateur doit faire toute une procédure administrative et louer un local pour pouvoir importer ces produits essentiels pour les bébés atteints de maladies orphelines». Pour les producteurs de médicaments qui font dans l'exportation également, il faut courir dans tous les sens pour avoir le registre secondaire, nous explique le président de l'UNOP. Selon lui, il aurait été plus judicieux d'exonérer les activités sous agrément de cette nouvelle mesure et ne pas faire du renouvellement du registre une solution généraliste. «Les bons payent toujours pour les mauvais». Un avis très partagé par les opérateurs économiques activant dans le même secteur. C'est le cas de cette femme exerçant dans la vente et la distribution de médicaments. «Si on est ancien dans l'activité et qu'on détient, déjà, un registre de commerce depuis des années pourquoi le renouveler maintenant ?», s'interroge-t-elle. Le problème qui se pose pour cette pharmacienne est l'obligation de changer des codes lors du renouvellement du registre. «J'ai été contactée par la DCP (Direction de la concurrence et des prix) et je suis en train de voir avec le CNRC, les deux organismes ont des avis différents. Du côté de la direction du CNRC, on nous dit qu'il y a quelques codes qui ne doivent pas être enlevés, mais au niveau de la DCP, on nous demande de modifier le registre de commerce. C'est la confusion pour nous et ce n'est pas clair», dira-t-elle.

«POURQUOI PAS TOUS LES SIX MOIS !»

M. Louafi, gérant de la société ALDIP, spécialisée dans l'importation de matériels agricoles considère cependant que cette nouvelle mesure est positive pour lutter contre la concurrence déloyale. «C'est le seul moyen d'identifier les sociétés fictives qui apparaissent et disparaissent sans aucune localisation ou identification et avec un seul registre activent dans l'importation de matériels industriels, des chaussures et même d'ameublement. Cet importateur propose même que le renouvellement soit imposé tous les six mois pour assainir la situation». Il existe des importateurs qui pensent comme M Louafi, que la bureaucratie pèse moins lourd face au phénomène de la concurrence déloyale imposée par des sociétés écrans qui gangrènent l'économie nationale. A revoir après l'entrée en vigueur du texte.