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Notre supplément économie avec la collaboration de «MAGHREB EMERGENT» : Algérie 2011 : l'irrésistible attrait de l'import-import

par Salim Rabia

A quoi peuvent rêver des jeunes Algériens «réalistes» qui évalueraient de manière rationnelle les options d'avenir à partir de ce qui existe ? Les réalistes ne font pas les révolutions même s'ils peuvent en profiter? Il n'est donc pas anormal de les voir applaudir le printemps chez les autres et croire, qu'ici, les desseins collectifs sont moins «faisables» que la débrouille individuelle. Ils observeront dans les bilans, chiffrés, que la presse publie qu'il n'est pas très intéressant de faire de grandes études et que cela rapporte beaucoup plus d'être député. Mais là, les places sont restreintes et leur mode d'affectation trop mystérieux pour que cela devienne une option. Exit donc la politique que ce soit pour faire la révolution ou pour faire carrière. L'offre est nécessairement réduite même si l'arrivée annoncée de nouveaux partis peut élargir la demande un petit chouia. Bien sûr, on peut aussi choisir de faire carrière dans le football mais là il faut du talent et du travail. Et nécessairement, le succès n'est au rendez-vous que pour un petit nombre. Et finalement, il ne reste que la bonne vieille «tijara», petite, moyenne ou grande, comme option. Les études, c'est l'idée dominante chez beaucoup de jeunes, c'est pour les filles. Etre grossiste, on le sait depuis les émeutes de janvier de l'année finissante, c'est avoir un pouvoir reconnu ? c'est un grand miracle ? par le gouvernement. Et qui s'est traduit par une retraite en rase campagne sur l'imposition du recours au chèque et l'encouragement quasi-officiel au recours, «comme d'habitude», au bon vieux sachet noir. Les grossistes sont si forts qu'ils échappent aux modifications «purificatrices» du registre de commerce qui ne les concernent pas. Les importateurs sont concernés. Et il y a de tout dans ce monde de l'import, du bon, du moins bon et du glauque. Il est avéré que c'est un champ où l'on peut faire fortune avec un peu de chance et beaucoup d'appuis. Et bien entendu, c'est un terrain où beaucoup veulent entrer. Et quand le gouvernement se mêle d'essayer de «réguler», on le soupçonne de vouloir réserver le domaine à des happy few. Le commerce extérieur, c'est sérieux en Algérie. Depuis la Régence. Et dans les chiffres de 2011, les chercheurs de filon ne peuvent pas s'empêcher de noter l'irrésistible attractivité de l'activité d'import. C'est tellement irrésistible que même la proverbiale «instruction» qu'affectionne Ouyahia n'y peut rien. On importe de tout. Même ce dont on n'a pas besoin. On importe de l'étranger jusqu'à des études que des têtes bien faites pourraient faire sans difficulté en Algérie. Et que des étrangers qui ont tout compris font faire par ces têtes en rade en Algérie que l'on pousse à partir ou à faire de la Tijara. Heureusement qu'il existe encore des jeunes en Algérie qui ne regardent pas les bilans des importations pour se faire une idée de ce qu'ils veulent être. Heureusement qu'il en reste qui en rêvent de révolution et de poésie, des jeunes qui veulent savoir, comprendre et apprendre et qui se disent qu'il faut essayer de construire. Même s'ils ne sont pas nombreux, ceux-là nous aident à envisager 2012 avec un chouia de sérénité.