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Conférence du recteur de l'université des Nations unies à Oran: La coopération académique avec l'Algérie entre dans sa phase pratique

par Ziad Salah

De passage à Oran, le professeur Hans Van Ginkel, recteur de l'université des Nations unies à Tokyo, a donné une conférence à l'IDRH (Institut de développement des ressources humaines) sur le thème « Capital humain, savoir et développement durable ». L'hôte d'Oran est l'invité spécial du président de la République. C'est ce qu'a annoncé Mohamed Seghir Babès, président du CNES, qui accompagne l'éminent professeur dans son périple à travers l'ouest du pays. Après Oran où il s'est rendu notamment au mont El Murdjajo pour découvrir le fort et la basilique de Santa Cruz, Hans Van Ginkel est parti hier en début de matinée à Tlemcen, dernière étape de son périple avant son retour à Alger.

Avant d'entamer sa conférence, à inscrire dans le programme des « jeudis de l'IDRH », le professeur Hans Van Ginkel est revenu sur la prochaine ouverture à Alger de l'Institut des Nations unies des ressources humaines. Un membre de la délégation l'accompagnant nous affirme que le stade des formalités est finalisé et que cette institution ouvrira ses portes à partir de septembre prochain. Par ailleurs, Mohamed Seghir Babès, président du CNES, à qui échoit l'honneur de clôturer la rencontre d'hier à l'IDRH, annoncera que les experts affiliés à son organisme sont sur le point d'achever les textes se rapportant à la création d'un réseau sur « l'économie du savoir ». Il ajoutera que dans les semaines à venir, une rencontre doit regrouper des membres de l'exécutif, les experts du CNES ainsi que les enseignants et chercheurs des différentes universités algériennes pour formaliser le projet de création de cette nouvelle discipline, présentée comme une urgence sur le plan académique. Afin de mieux mettre en exergue le caractère impératif de cette discipline, Babès renvoie l'assistance à un des derniers discours du président de la République consacré à cette question.

Hormis ces annonces, l'essentiel de la séance du jeudi après-midi a été consacré à l'intervention du recteur de l'université des Nations unies et aux débats qui s'en sont suivis. Evoquant l'institution qu'il dirige, il précisera qu'elle se « désintéresse » volontairement des préoccupations de la recherche que ce soit en sciences ou en sciences sociales. Il citera entre autres axes de recherches de l'université des Nations unies : les Droits humains ; le Développement durable et depuis bientôt dix ans les problèmes du Futur. Il tentera d'expliquer cette orientation en affirmant que depuis la seconde moitié du XXème siècle, l'humanité a assisté à l'émergence d'un nouveau monde. Et de remarquer que ce sont les artistes qui ont les premiers perçu ce changement. Le tableau de Salvador Dali, peint en 1943 et intitulé « l'enfant regardant la naissance du nouveau monde », lui servira d'argument pour étayer son propos.

Ce monde nouveau se caractérise, selon le conférencier, par le triomphe de la globalisation, le développement de la société de connaissance et surtout l'importance que requièrent désormais les questions des valeurs et de l'éthique. Dans ce sens, il avancera un exemple éloquent. La durée de vie moyenne du Japonais est passée en ce début de siècle à 81 ans alors que celle de l'habitant du Malawi a chuté à 40 ans. Et de s'interroger « qui a décidé que le Japonais vit deux fois plus que le Malawien ? ». Voilà une des grandes questions éthiques qui se posent à l'humanité, selon ses dires. Il avancera un autre constat pour appuyer son assertion : les catastrophes naturelles, qu'on peut prévenir et endiguer, souligne-t-il, entraînent plus de dégâts humains que les violences et les guerres. Ces interrogations l'amènent à fixer le rôle de l'Université, notamment celle qu'il dirige. En dehors de sa mission traditionnelle, il incombe désormais à l'Université de contribuer au développement humain, à participer à la préservation de l'identité culturelle des peuples et groupes humains et à favoriser et améliorer le dialogue au sein des sociétés humaines. Il s'attardera sur la notion « du développement durable » produit d'un compromis entre les pays développés et ceux en voie de développement. Le compromis consiste en la prise en ligne de compte de deux impératifs : celui des pays développés qui ont mis en avance la préoccupation écologiste se rapportant notamment au taux d'émission du CO2 dans l'espace et celui des pays en voie de développement présentant comme revendication légitime l'accès au développement. D'ailleurs, lors des débats, un universitaire oranais fera remarquer que la suspicion que suscite la notion de « développement durable » provient justement de sa parenté avec les institutions internationales, dont certaines ne jouissent pas de bonne presse auprès des populations du Sud. Et de citer la Banque mondiale et le FMI. Retenons que Hans Van Ginkel récuse d'attribuer la naissance de cette notion aux pays du Nord.

Pour sa part, Mohamed Seghir Babès prendra l'engagement de revenir à Oran pour débattre des questions qui ont un lien direct avec la situation économique, sociale et culturelle de l'Algérie. Il laissera entendre que c'est une nouvelle orientation qu'entame l'organisme qu'il dirige où il y aura place même pour les voix discordantes. L'auditoire de la salle de conférence de l'IDRH, formé dans sa majorité d'universitaires, a pris note de l'engagement du président du CNES.