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Escalades des tensions entre l'Algérie et la France: La coopération économique «affectée»

par A. Z.

D'habitude rassurant sur le cadre «stable et solide» des relations professionnelles dans lequel évoluent les entreprises françaises en Algérie, et ce malgré l'environnement politique délétère marquant les relations bilatérales depuis plus de huit mois, Michel Bisac, président de la Chambre de commerce et d'industrie algéro-française (CCIAF), a le ton plus alerte face à la récente escalade des tensions entre les deux pays. Une escalade qui a affecté la coopération économique, notamment «au niveau de l'investissement et du développement des entreprises françaises en Algérie», déplore un communiqué de la CCIAF, signé par son président, Michel Bisac. Exprimant regret et préoccupation face à la dégradation des relations diplomatiques entre Alger et Paris, le communiqué évoque l'impact engendré par la résurgence des tensions dans les relations bilatérales sur le climat des affaires entre les deux pays. « Les relations algéro-françaises ont connu ces derniers jours une nouvelle montée des tensions, ce qui a malheureusement affecté la coopération économique, notamment en matière d'investissement et de développement des entreprises françaises en Algérie », affirme le même texte.

Rappelons que cela survient dans un moment où les milieux d'affaires français avaient récemment poussé un soupir de soulagement, suite au communiqué conjoint publié après l'appel téléphonique entre le président Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron le 31 mars dernier, dans lequel les deux chefs d'Etat ont mis l'accent sur la reprise de la coopération économique. La CCIAF ne manque pas de le relever dans son communiqué, rappelant que cette montée de tension s'est produite seulement quelques jours après la reprise d'un « dialogue constructif » entre les deux présidents, qui avaient mis les intérêts des deux pays au centre des liens multiples qui les unissent. Considérant que les relations économiques représentent « un enjeu fondamental qu'il faut préserver et renforcer », car elles reposent, selon elle, sur « des liens humains et sociaux capables de garantir l'avenir, quelles que soient les turbulences actuelles », la CCIAF appelle les entreprises françaises et algériennes, ainsi que les sociétés issues de la diaspora, à s'inscrire dans la dynamique lancée par les deux chefs d'Etat, « afin de préserver le lien économique et le protéger des conséquences des déclarations partisanes ».

Le MOUDAF dénonce «les multiples provocations» du ministre français de l'Intérieur

«La Chambre de commerce et d'industrie algéro-française encourage les entreprises affectées par la détérioration du climat des affaires, qui travaillent depuis la France avec des partenaires algériens, à communiquer avec ses services afin de confirmer leur volonté de maintenir leurs partenariats, qui, ne l'oublions pas, visent également à maintenir des emplois stables en France», conclut le communiqué.

La crise diplomatique entre les deux pays est plus proche que jamais d'une rupture brutale après que l'Algérie et Paris ont échangé des expulsions de diplomates (12 agents de chaque côté) à la suite de l'arrestation d'un agent consulaire algérien à Paris le 8 avril. Rappelons dans ce contexte de l'impact de la crise entre les deux pays sur la coopération économique, l'annulation de la visite que devait effectuer le Conseil du Renouveau économique algérien (CREA) en France, ainsi que de la rencontre prévue avec le Mouvement des entreprises de France (MEDEF).

De son côté, le Mouvement dynamique des Algériens en France (MOUDAF) dénonce clairement «les multiples provocations» du ministre français de l'Intérieur, Bruno Retailleau, à l'égard de l'Algérie. Dans un communiqué, publié jeudi, signé par son secrétaire général Nasser Khabat, le MOUDAF rappelle que «depuis plusieurs mois, le ministre de l'Intérieur français multiplie les provocations, les contre-vérités et les invectives à l'égard de l'Algérie». «Faut-il y voir l'empreinte d'une ligne politique assumée, ou celle, plus insidieuse, d'une soumission rampante aux injonctions de l'extrême droite et de la fachosphère, cette nébuleuse réactionnaire qui rêve encore d'Empire et de domination coloniale?», s'est-il demandé. «Quoi qu'il en soit, le constat est clair : en se faisant le porte-voix d'un ressentiment colonial à peine voilé, ce ministre ne parle pas pour la France mais pour une certaine idée de la France nostalgique et autoritaire. Quand il ose évoquer une prétendue ‘humiliation' de la France face à l'Algérie, c'est une insulte faite à l'Histoire », a-t-il enchaîné. «Elle ravive les braises d'un passé non digéré, au lieu de construire les conditions d'un dialogue apaisé entre les deux pays», dit-il.

En outre, le secrétaire général du MOUDAF a tenu à préciser que le silence des membres de la diaspora algérienne «n'est pas un signe de soumission. Il est celui d'une maturité politique que beaucoup dans l'appareil d'Etat français semblent avoir perdue». «Nous refusons d'être les spectateurs muets d'une dérive nationaliste qui instrumentalise nos histoires, nos identités, et notre citoyenneté plurielle à des fins électoralistes», a-t-il conclu.